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Top 1000 : les meilleurs joueurs du championnat de France (710-701)
Quel est le meilleur joueur de l'histoire du championnat de France depuis sa création en 1932 jusqu'à 2022 ? Statistiques, palmarès, trajectoires personnelles, classe, dégaine, empreinte laissée : autant de critères qui nous ont permis d'établir notre classement très subjectif des mille joueurs les plus marquants de Division 1 et de Ligue 1. Le credo d'un feuilleton qui va durer précisément 100 jours.
#710 - Pierre Bini
Pierre Bini
Reims (1946-1951), Saint-Étienne (1951-1952)
Un surnom en dit souvent beaucoup sur les qualités d’un joueur et, surtout, sur l’image qu’il renvoie auprès du public. Ceux auxquels a droit Pierre Bini au cours de sa carrière ne sont, à première vue, pas très flatteurs : la Chèvre d’abord, le Râteau ensuite. Mais il ne faut pas qu’il y ait de méprise. Son premier sobriquet fait référence à ses longues jambes et non pas à une quelconque déficience technique sur le terrain. Quant au second, il lui est attribué en raison de sa hargne et de sa combativité, qui enchante les supporters rémois. Cet élément polyvalent, tantôt milieu offensif, tantôt ailier droit, est d’ailleurs sacré champion de France avec le club champenois en 1949. De son unique saison chez les Verts, on retient trois doublés (dont deux face à l’OM) et une apparition étonnante dans la cage contre Bordeaux pour remplacer Jacques Ferrière, blessé (six buts encaissés, avant de subir un pépin physique à son tour). Le père de Bruno – futur sélectionneur de l’équipe de France féminine – raccroche en 1952, à cause d’un genou trop abîmé. Aujourd’hui, le stade de Laragne-Montéglin, qui l’a vu naître et dont il a été maire, porte son nom.
#709 - Cor van der Hart
Cor van der Hart
Lille (1950-1954)
À son échelle, Cornelis van der Hart aura permis de révolutionner le football néerlandais. Né et élevé à Amsterdam, l’élégant défenseur a naturellement intégré l’école de l’Ajax à l’âge de dix ans. Invité à une journée d’essai, aux côté de 300 jeunes amstellodamois, « Cor » sera ainsi l’un des deux seuls sélectionnés. L’autre garçon étant un certain Rinus Michels. Débutant en équipe première à 19 ans, en 1947, et après trois saisons chez lui, il reçoit finalement une offre qu’il ne peut se permettre de refuser : celle du professionnalisme, venue de Lille. Amateur aux Pays-Bas, Van der Hart accepte alors la proposition nordiste, au sein d’une équipe qui terminera deuxième, dès sa première saison.
Dans le LOSC de Jean Baratte, André Strappe, Jean Vincent ou Gérard Bourbotte, le géant se mue en valeur sûre (114 rencontres disputées), glanant la Coupe de France en 1953 face à Nancy (2-1), puis le grand titre de champion national en 1954, dans un sprint final épique, voyant les Dogues l’emporter à deux journées de la fin, un point devant le Stade de Reims et les Girondins de Bordeaux. Mais la plus belle réalisation du Oranje (44 capes) se déroulera loin des pelouses. En effet, en ralliant l’Hexagone, Cor van der Hart fut suspendu par la fédération néerlandaise (KNVB), interdisant à ses footballeurs de signer un contrat professionnel à l’étranger. C’est ainsi loin de ses terres que le 12 mars 1953, il décida d’organiser le « Watersnoodwedstrijd » (le Match contre les inondations en VF). Un match de charité visant à récolter des fonds en aide aux personnes victimes du raz-de-marée en mer du Nord de 1953, en Belgique et aux Pays-Bas.
« Lorsque je jouais en France, je n’avais aucun accès au informations venant des Pays-Bas, racontera-il à la chaîne de télévision NOS. C’est en tombant, par hasard, sur une émission de radio, que j’ai appris que de sérieuses inondations touchaient mon pays. Alors, j’ai contacté mes compatriotes évoluant en France, à savoir Bram Appel (Reims), Theo Timmermans (Nîmes), Bertus de Harder (Bordeaux) et Kees Rijvers (Saint-Étienne) afin d’organiser cette rencontre de charité. » Disputée au Parc des Princes, cette partie opposant des « All-Stars » bataves à l’équipe de France est un succès, par la qualité de jeu affichée. Attirant près de 10 000 supporters néerlandais, son retentissement médiatique permet en effet aux médias locaux de relancer le débat sur le professionnalisme à échelle locale. Une réforme que la KNVB acceptera finalement moins d’un an plus tard. Une révolution majeure donc, dans laquelle Cornelis van der Hart a joué un rôle essentiel. Les finalistes du Mondial 1974 lui doivent beaucoup…
#708 - Steve Savidan
Steve Savidan
Valenciennes (2006-2008), Caen (2008-2009)
Avant d’occuper son après-carrière en vendant d’obscures formations digitales à 1500 euros pour devenir footballeur professionnel, Steve Savidan a été un brillant acteur du championnat de France, ayant fait la gloire du Valenciennes Football Club, qu’il a aidé à passer du National à la Ligue 1 en deux ans (avec une place dans l’équipe type de L1 en 2007), puis de Malherbe pendant une saison dans l’élite. Joueur frisson et à part, entré dans le monde pro par la porte de derrière avec son passé d’éboueur, l’attaquant marqua 40 fois en trois saisons et 110 matchs de première division (dont quelques bicyclettes et un quadruplé à la Beaujoire face à Fabien Barthez), et sa carrière se brisa aussi brutalement que sa progression aura été fulgurante, une anomalie cardiaque détectée lors de la visite médicale l’ayant empêché de signer à l’AS Monaco, à l’été 2009, alors que le club de la Principauté avait posé entre trois et quatre millions sur la table.
Avant ça, le buteur avait réussi l’exploit d’être appelé chez les Bleus en portant le maillot caennais, signant une prestation mémorable face à l’Uruguay de Diego Lugano, tombé sous son charme. Aujourd’hui, il reste le souvenir de ce vent de fraîcheur insufflé par l’avant-centre, partout où il passait : « Quatre joueurs qui venaient du National étaient titulaires en Ligue 1 : José Saez, Rudy Mater, Eric Chelle et moi, nous racontait-il en 2019. […] Le club avait un peu peur de nous, parce qu’on était libres. Ce que l’on avait vécu en National, on le vivait pareil en Ligue 1. […] Les joueurs qui arrivaient à Valenciennes pour signer hallucinaient en nous voyant aller au PMU, prendre notre café en terrasse tranquillement. Les joueurs qui arrivaient de clubs de Ligue 1 pétaient les plombs, pensaient qu’on était tarés. En arrivant au stade, on arrêtait le bus pour prendre un café sur la terrasse du café juste à côté. On s’arrêtait pour dire bonjour aux gens. […] Quand je suis arrivé à Châteauroux (en D2 en 1999), je voulais boire des coups avec mes potes en plus de faire l’entraînement ! Les gens me demandent toujours pourquoi j’arrive à 30 ans en équipe de France sans avoir fait de sélections jeunes. Voilà la réponse. »
#707 - Guy Huguet
Guy Huguet
Saint-Étienne (1945-1952), Nice (1952-1955)
Décédé le 12 juin 1991, Guy Huguet a une allée à son nom, quasiment au pied du stade Geoffroy-Guichard, depuis le 12 janvier 1998. Arrivé à l’ASSE en 1945 après s’être fait remarquer du côté de Clermont-Ferrand, l’ailier devenu latéral droit a fait partie de l’équipe qui a hissé les Verts sur la deuxième marche du podium pour la première fois de l’histoire du club, lors de la saison suivant la Libération. International à douze reprises, il a fait partie des figures du championnat de France de l’après-guerre, apparaissant 221 fois sous les couleurs stéphanoises (D1 et Coupe de France confondues) et 257 fois dans l’élite (en comptant ses trois exercices en fin de carrière avec le Gym). Son après-carrière de magistrat sera riche avec des casquettes diverses (juge d’instruction, conseiller à la cour d’appel de Bourges, mais aussi membre du Conseil fédéral de la FFF).
#706 - Farès Bousdira
Farès Bousdira
Lens (1973-1978), Nice (1978-1980), Angers (1980-1981), Rennes (1983-1984)
Farès Bousdira n’est pas seulement le premier Algérien à avoir été sélectionné en équipe de France (en 1976, quatorze ans après l’indépendance), c’était aussi un formidable joueur de football. Un meneur de jeu beau à voir jouer, parfois fantasque, souvent fin techniquement. S’il a navigué entre la première et la deuxième divisions tout au long de sa carrière, terminant notamment celle-ci à Béziers et Montceau, il a d’abord brillé dans l’élite sous le maillot sang et or six ans après avoir fait le voyage de l’Algérie jusqu’au nord de la France pour fuir l’arrivée de Boumedième au pouvoir à la suite d’un coup d’État. Bousdira aura été l’un des joueurs majeurs de cette période à Lens, avant de mettre le cap au sud, à Nice, pour rejoindre un club habitué à jouer les premiers rôles en championnat. Une aventure plutôt mitigée avant des passages dans l’Ouest, à Angers et à Rennes, où il aura l’occasion de signer quelques caramels, mais où il connaîtra également deux relégations à l’échelon inférieur. Ce n’est pas une raison pour l’oublier.
#705 - Jean-Claude Osman
Jean-Claude Osman
Nantes (1967-1978), Angers (1978-1979)
Jean-Claude Osman, c’est d’abord un surnom : « La rouille » . C’est aussi un CV garni de 285 apparitions en D1, mais surtout deux titres de champion de France avec son club formateur, le FC Nantes, en 1973 (où il est un pilier de l’équipe) et 1977. La carrière du latéral droit, réalisée presque uniquement dans la cité des ducs de Bretagne, est sabotée par une vilaine blessure à l’œil en 1974, quelques mois après son unique sélection en équipe de France A, pour celui qui fréquentait également la sélection militaire. Un évènement qui l’éloignera des terrains pendant un an, et freinera une carrière qui avait presque démarré sur un malentendu : « Jacky Simon voulait partir à Bordeaux. J’ai donc pris sa place lors d’un match contre Sedan et j’ai marqué, raconte-t-il au site Tribune C au sujet de sa première titularisation avec les Canaris. Après, on va à Metz, on fait 1-1, et je marque encore. Pour mon troisième match, on reçoit Aix-en-Provence, je ne marque pas, mais c’est le meilleur match que je fais. Ma carrière était lancée. […] Ce qui a précipité ma venue en équipe première, c’est ce match de préparation entre les joueurs de l’équipe de France. Ils étaient en préparation à La Baule et ils faisaient une opposition […]. Ils manquaient trois joueurs et je fis partie des trois désignés pour compléter l’équipe. J’avais joué en défense centrale avec Aimé Jacquet. Par la suite, les médias ont relaté ma bonne prestation. Huit jours après, me voilà titulaire avec les Canaris. […] Pour anecdote, j’ai su longtemps après ma carrière, par le biais des journaux, que j’étais sur les tablettes de l’Ajax Amsterdam de Cruyff. Si le club ne voulait pas, c’était comme ça. » Pas si rouillé que ça, finalement.
#704 - Jean Luciano
Jean Luciano
Nice-Côte d’Azur (1943-1944), Stade français (1946-1947), Roubaix-Tourcoing (1947-1948), Nice (1948-1950 puis 1955-1957)
Le siège de l’OGC Nice se trouve actuellement au 19, boulevard Jean Luciano, et c’est plutôt un joli clin d’œil. Car le nom de cet ancien joueur puis entraîneur est intimement lié au Gym emballant du début des Trente Glorieuses. Milieu élégant et très habile techniquement, Luciano dicte le jeu des Aiglons pendant deux saisons. Ses performances lui valent d’être repéré par le Real Madrid, qui l’enrôle en 1950 et va même jusqu’à lui confier le numéro 10. Une fois la parenthèse espagnole refermée, l’international français revient sur la Côte d’Azur, y décroche un titre de champion de France en 1956, puis récidive en 1959, cette fois en tant que coach. Avec lui, c’était vraiment « Nissa la Bella » .
#703 - Gérard Bernardet
Gérard Bernardet
Valenciennes (1980-1981), Brest (1981-1983 puis 1985-1986), Montpellier (1987-1989), OM (1989-1990), Toulon (1989-1990) et Nîmes (1990-1992)
Énorme bourlingueur (neuf changements de clubs au cours de sa carrière), Gérard Bernardet a connu la D1 – et surtout son ventre mou – avec pas moins de six équipes différentes. Le milieu offensif peut même se targuer de compter deux titres de champion de France avec l’OM (1988-1989 et 1989-1990), même si sa contribution à ces trophées reste toute relative (cinq matchs la première saison, trois la suivante), lui qui n’est resté que six mois sur la Canebière durant l’année 1989. C’est plutôt à VA, Brest et Montpellier que Bernardet a rayonné dans l’élite, après avoir explosé très jeune à l’étage plus bas avec le FC Lorient, sous les ordres de Jean Vincent. Avec sa qualité technique, ses choix de clubs toujours plus étonnants et ses 44 réalisations en 287 rencontres de première division (dont deux saisons à huit buts), il aura laissé son empreinte dans le championnat (ayant notamment fait remonter la Paillade avant de hisser le promu à la troisième place en 1987-1988 avec Christian Pérez, Laurent Blanc ou Roger Milla), même si c’est principalement en D2 qu’il a brillé.
#702 - Pierre Duhart
Pierre Duhart
Sochaux (1934-1937)
Entre footballeurs et journalistes, les relations n’ont jamais été au beau fixe. Pourtant, dans certains cas, l’un peut être au service de l’autre. Demandez donc à Pedro Duhart. Joueur phare du Nacional, l’Uruguayen, d’ascendance française, est repéré en 1931 par Gabriel Hanot, journaliste pour le magazine Football, parti couvrir le derby de Montevideo face à Peñarol. Sous ses yeux, la plume française assiste à un récital de l’attaquant, alors véritable canonnier des Bolsos. En 69 rencontres, le goleador inscrit 31 buts, s’attirant ainsi les faveurs de Hanot, désireux de ramener sa pépite dans l’Hexagone. Chose faite à l’été 1934, pour le plus grand bonheur de Sochaux, qui rafle la mise. Dans le Doubs, Pedro est naturalisé français, son prénom modifié en « Pierre » et son statut de vedette fructifie rapidement. Au passeport se joignent en effet les premières capes en Bleu. Et l’hebdomadaire Football aura, là, également une part importante. Ses rédacteurs font effectivement pression auprès de la FFF, au nom d’un traité signé entre la France et certains pays d’Amérique du Sud, autorisant les ressortissants sud-américains, d’origine française, à disposer de la nationalité.
Avant-centre à l’uruguayenne, loin de faire dans le détail, Duhart est sacré champion de France dès sa première saison, en 1934-1935, et se mue au service de ses compères offensifs, André Abelggen et Roger Courtois, qui termineront aux deux premières places du classement des buteurs (30 réalisations pour Abelggen, 29 pour Courtois). Lui ne marquera que huit fois durant cette campagne victorieuse, pour un total de 24 réalisations en 62 parties, jusqu’à son départ en 1937. Cette même année, en cadeau d’adieu, il jouera un rôle crucial dans le succès sochalien en finale de la Coupe de France face à Strasbourg (2-1). Pedro « Pierre » Duhart ne sera ainsi finalement resté que trois ans en France, suffisant pour marquer son passage. En Bleu roi ou en Celeste.
#701 - Benoît & Bruno Cheyrou
Benoît & Bruno Cheyrou
Benoît : Lille (2000-2004), Auxerre (2004-2007), OM (2007-2014) // Bruno : Lille (2000-2002), OM (2004-2005), Bordeaux (2005-2006), Rennes (2006-2010)
Si la plupart des fans du championnat de France voient le nom Cheyrou accolé au Lille OSC, c’est bien au Racing Club de Paris que Benoît a réalisé ses premières étincelles. Directeur du centre de formation du LOSC en 1993, Jean-Michel Vandamme garde la mémoire fraîche au moment d’observer les U15 lillois dans le 92. « Un gamin me saute aux yeux, narre Vandamme pour le site du LOSC en décembre dernier. C’était le capitaine, avec une personnalité exceptionnelle, beaucoup de caractère. Il reprenait ses partenaires de volée, les remettait en place. Un vrai patron. Je tombe raide dingue de ce gosse, avec une belle patte gauche. Je me dis : « Lui, je ne dois pas le rater ». Je me renseigne et j’apprends qu’il s’appelle Benoît Cheyrou et qu’il est le frère de Bruno, dont je connais déjà bien la famille. » Et pour cause : Vandamme avait fait avancer les négociations avec le Racing Club de Lens, club où il exerçait au préalable, pour y faire signer l’aîné.
Trois ans plus tard, Bruno n’a pas convaincu à Lens. Les deux Cheyrou rejoignent alors le LOSC et vont effectuer leurs débuts en Ligue 1 lors de la saison 2000-2001. Deux décennies plus tard, l’heure est venue de compter les piges passées dans le championnat de France. Benoît cumule 406 matchs en L1 contre 192 pour son grand frère, rapidement parti s’exiler à Liverpool. Et au moment de ressasser les souvenirs, la balance penche également en faveur de Benoît : recrue de choix puis capitaine emblématique de l’AJ Auxerre entre 2004 et 2007, acteur majeur dans le mythique OL-OM (5-5) en 2009-2010 et champion de France à l’issue de cette saison. Surnommé « Le Philosophe » par Vahid Halilhodžić après un recadrage dans le bureau du coach bosnien, le cadet des Cheyrou savait utiliser son cerveau pour le collectif. Cela étant, Benoît aurait-il eu une carrière aussi fructueuse sans Bruno ? Difficile d’y répondre avec certitude. En cela, les deux frangins méritent amplement cette 701e place.
Par Quentin Ballue, Jérémie Baron, Adel Bentaha, Raphaël Brosse, Clément Gavard et Steven Oliveira, avec toute la rédaction de SF