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Top 1000 : les meilleurs joueurs du championnat de France (620-611)

Par Quentin Ballue, Jérémie Baron, Adel Bentaha, Raphaël Brosse, Clément Gavard et Steven Oliveira, avec toute la rédaction de SF

Quel est le meilleur joueur de l'histoire du championnat de France depuis sa création en 1932 jusqu'à 2022 ? Statistiques, palmarès, trajectoires personnelles, classe, dégaine, empreinte laissée : autant de critères qui nous ont permis d'établir notre classement très subjectif des mille joueurs les plus marquants de Division 1 et de Ligue 1. Le credo d'un feuilleton qui va durer précisément 100 jours.

#620 - Geoffrey Dernis

Geoffrey Dernis
Lille (2000-2001 puis 2003-2006), Saint-Étienne (2006-2009), Montpellier (2009-2012), Brest (2012-2014)

Pendant près de quinze ans, Geoffrey Dernis a fait partie des meubles du championnat de France. Pas un meuble très moderne, c’est vrai, mais du genre de ceux réconfortants que l’on trouve chez la grand-mère. De Lille à Saint-Étienne, le petit blond s’est imposé comme un milieu de terrain fiable, technique et à l’état d’esprit irréprochable. Ce qu’il a pu montrer à Montpellier, où il était plus souvent sur le banc que sur le terrain l’année du titre, en étant l’ambianceur de service dans le vestiaire. Un bon gars, un bon vivant et un champion de France, mine de rien. « Quand tu parles avec les gens du coin, tu sens qu’on a laissé une trace, qu’on a créé des images. Ils nous disent : « On était heureux, vous n’imaginez même pas…  » Mais si, on imagine très bien, parce qu’on l’était autant que vous ! Un titre, c’est intense émotionnellement, nous racontait-il au printemps dernier. De l’extérieur, les gens estiment que les joueurs doivent juste donner des émotions, mais on en ressent aussi. Et quand on a repris quelques semaines plus tard, on était encore dans les images, les émotions, l’intensité du titre… Le plus dur, c’est de repartir après ça, même si à 32 ans, je savais que je ne pouvais plus faire mieux. »

#619 - Félix Lacuesta

Félix Lacuesta
Saint-Étienne (1974-1977), Bastia (1977-1979 puis 1980-1981 et 1985-1986), Bordeaux (1979-1980), Strasbourg (1981-1984), Monaco (1986), Lille (1986-1987), Cannes (1987-1990)

Champion de France en 1975 et en 1976, mais dans la peau d’un remplaçant, avec l’AS Saint-Étienne, Felix Lacuesta prend véritablement son envol à Bastia. Membre du grand Sporting finaliste de la Coupe UEFA en 1978 et vainqueur de la Coupe de France en 1981, le milieu de terrain tutoie les sommets et se crée des souvenirs inoubliables. « Avec Saint-Étienne, le Sporting, c’est mon club de cœur. Quand je viens ici (en Corse), j’essaie toujours de dire à Paul Marchioni, Charles Orlanducci, Fanfan Felix, de faire un petit repas entre amis et on parle évidemment de notre affaire d’il y a 40 ans. Ce sont des gens exceptionnels, je les aimerai toute ma vie » , confiait le joueur aux plus de 300 matchs de D1 à Radio Sporting en 2020. « Félix Lacuesta préfigure le n°8 moderne, capable aussi bien de défendre que d’attaquer » , décrit même le site Racing Stub. L’Île de Beauté ne pouvait que l’apprécier.

#618 - Émile Bongiorni

Émile Bongiorni
CA Paris (1937-1942), RC Paris (1942-1943 puis 1944-1948), Paris-Capitale (1943-1944)

Une carrière pleine de promesses, avant une fin tragique. Émile Bongiorni, c’est d’abord un attaquant au sens du but affiné, qui sévit dans la capitale sous les couleurs du CA Paris, puis du Racing. Devenu international français au sortir de la Seconde Guerre mondiale, ce fils de ramoneur continue d’empiler les pions, marquant même à 16 reprises (pour 25 matchs disputés) en 1947-1948. L’heure est alors venue de quitter la Ville lumière et de tenter l’aventure avec le Grande Torino, qui domine le calcio à l’époque. Hélas, Milo et ses coéquipiers disparaissent le 4 mai 1949 dans un accident d’avion, resté tristement célèbre sous le nom de tragédie de Superga. Un terrible drame.

#617 - Christophe Le Roux

Christophe Le Roux
Nantes (1996-1998)

Valeureux soldat de Lorient et Guingamp au tournant des années 1980-1990, le Morbihannais n’a découvert la D1 qu’à 27 ans, sous les couleurs du FCNA. Et il n’aura jamais trahi sa Breizh natale, passant ensuite par le Stade rennais avant de revenir à l’En Avant, devenu une équipe de l’élite, puis de boucler la boucle dans le 56 du côté de Vannes, en troisième division. Soit cinq clubs bretons (sans compter le CS Quéven lorsqu’il était minot) pour ce milieu de terrain 100% pur beurre. Les souvenirs qu’il a laissés en D1, au-delà de ses 223 apparitions ? Ses quatre exercices à six réalisations, la formidable saison 2002-2003 avec l’EAG (aux côtés de Didier Drogba, Florent Malouda, Coco Michel, Stéphane Carnot, Néstor Fabbri, Cédric Bardon, Wagneau Eloi…), son but avec le SRFC lors d’une victoire 6-1 à Roudourou, ou encore la schizophrénie qui a symbolisé sa carrière, lui qui a marqué contre à peu près tous les clubs dont il a porté les couleurs.

#616 - Vladimír Šmicer

Vladimír Šmicer
Lens (1996-1999), Bordeaux (2005-2007)

En Tchéquie, on le surnomme Lucky Man. Et pour cause, Vladimír Šmicer a soulevé des trophées partout où il est passé. Y compris lors de son passage en France. Dans la foulée de l’Euro 1996, l’élégant meneur de jeu a posé ses valises à Lens. « C’était le transfert parfait pour ma carrière, assurait-il à So Foot en 2018. J’avais le support des dirigeants, de l’équipe, des supporters. Le foot, c’est tout pour eux. Je n’avais pas besoin du soleil, d’amusement, j’avais juste besoin de football. Le championnat français est meilleur que le championnat tchèque, j’apprenais à chaque match. Pendant trois ans, je suis devenu un meilleur joueur. » Un joueur sacré champion de France en 1998, à l’issue d’une saison qui l’a vu éclabousser le championnat de sa remarquable vista. Son passage à Bordeaux, quelques années plus tard, a été plus discret… mais malgré tout couronné d’une victoire en Coupe de la Ligue (2007). Lucky Man a encore frappé.

#615 - Marc Keller

Marc Keller
Mulhouse (1989-1990), Strasbourg (1992-1996)

Avant la chemise du président, Marc Keller portait le maillot du joueur. Passé pro à Mulhouse, l’attaquant alsacien rejoint en 1991 le voisin strasbourgeois, où il vit une remontée en D1, quatre saisons et 24 buts dans l’élite, une finale de Coupe de France et une victoire en Intertoto en 1995, tout en passant sa licence de sciences économiques à la fac. Des perfs qui lui ouvrent les portes de l’équipe de France. « Il était super fort tactiquement, avec un placement toujours parfait. Il avait une capacité à armer très rapidement. C’était un joueur très collectif » , louait son ancien coéquipier Ivan Hasek dans les colonnes de L’Équipe. Carlo Molinari, qui avait essayé de l’attirer à Metz, ne tarissait pas d’éloges non plus : « C’était un ailier à l’ancienne, un joueur de grande classe, fin, percutant, adroit techniquement et intelligent dans le jeu. » Tel joueur, tel président.

#614 - Fabrizio Ravanelli

Fabrizio Ravanelli
OM (1997-1999)

Il n’y a pas toujours besoin de rester une décennie dans un championnat pour marquer les esprits. En 1997, Fabrizio Ravanelli passe de Middlesbrough à Marseille contre un chèque de 48 millions de francs (et un joli salaire de 500 000 francs net mensuel). Le 8 octobre, l’attaquant fait ses débuts en Ligue 1 à Rennes, où il offre une passe décisive à Claude Makélélé et transforme un penalty après avoir demandé à Laurent Blanc de le lui laisser pour pouvoir marquer dès son premier match. Le numéro 11 n’a même pas besoin de ça pour se faire adopter par le public du Vélodrome. L’Italien sait marquer des buts, mais se fait aussi remarquer pour sa roublardise. Tout le monde se souvient du 8 novembre 1997, quand Ravanelli réalise peut-être la plus belle simulation de l’histoire de notre championnat et parvient à entuber Éric Rabesandratana et l’arbitre M. Puyalte. Un penalty qui sera finalement manqué par Blanc… mais qui contribue grandement à la légende du blond platine, capable de s’embrouiller avec n’importe quel adversaire.

Mi-ange, mi-démon, comme le racontera Pierre Ducrocq des années après avoir croisé la route de Ravanelli : «  Si je devais garder une image d’un Clásico que j’ai vécu, ce serait mon tête à tête avec Fabrizio Ravanelli. Je m’en souviens parce que Guérin se blesse au bout d’une demi-heure de jeu. Quand j’entre, Dugarry et Ravanelli discutent ensemble, et en gros, j’entends : « Le petit jeune, il faut le faire craquer ». J’ai encore des photos où on voit Dugarry qui est à terre et qui m’attrape le pied avec la main. Je tombe, et là, Ravanelli vient tout de suite. Avec un petit coup de genou, il me bouscule un peu, donc moi, je me relève, on se parle assez sèchement. On est nez contre nez, et la photo a été prise. Ce qui est marrant, c’est que quelques années plus tard, on s’est retrouvé à Derby County où j’étais prêté un an et où Fabrizio avait un contrat. On y est devenus très copains, c’est un mec super . » Sacrée Penna Bianca.

#613 - Roby Langers

Roby Langers
Metz (1983-1984), Nice (1989-1991), Cannes (1991-1992)

Si peu de joueurs luxembourgeois sont passés par le championnat de France, le nom de Robert « Roby » Langers restera assurément comme l’un des plus marquants. Recruté par Metz à l’été 1982, en provenance du Borussia Mönchengladbach, l’attaquant formé à l’Union Luxembourg doit en réalité attendre huit ans pour s’exprimer dans l’élite, la faute à un long voyage en deuxième division (prêté à Marseille, Guingamp et Quimper puis vendu à Orléans).

C’est finalement l’OGC Nice qui lui offre sa chance, en 1989, pour seulement deux saisons, dont une première d’anthologie. Auteur de 17 buts, au sein d’un effectif luttant pourtant pour le maintien, Langers met sa science du but à profit, au moment adéquat. Barragiste, l’OGCN est effectivement battu à l’aller par Strasbourg (3-1), malgré une réalisation de son goleador à la Meinau.

Le 29 mai 1990, pour le retour au Ray, Roby enfile alors son costume de sauveur, inscrivant un quadruplé légendaire, pour un succès majuscule (6-0). Et ses célébrations au milieu des supporters, les mains sur le grillage, restent encore gravées dans les mémoires de la tribune Sud. Malheureusement, la relégation administrative des Aiglons, la saison suivante, oblige le Duc Langers à s’envoler pour une ultime pige à Cannes. Parti aussi vite qu’il n’a rayonné.

Crédit photo : OGC Nice

#612 - Roger Gabet

Roger Gabet
Racing Paris (1946-1953 puis 1954-1956)

Dennis Bergkamp n’a rien inventé. 50 ans avant Le Hollandais volant, Roger Gabet a lui aussi traîné son aviophobie tout au long de son parcours. La raison pour laquelle le milieu de terrain a sacrifié sa carrière internationale (seulement trois capes avec les Bleus) pour ne jamais avoir à s’aventurer dans les airs ? Une photo de lui en 1949 le montrant aux côtés de son confrère Émile Bongiorni (voir #618) et du boxeur Marcel Cerdan, tous les deux disparus en 1949 dans des accidents aériens, Gabet s’est mis en tête qu’il allait être la troisième victime d’une malédiction. Par conséquent, il n’a jamais quitté l’Hexagone, faisant toute sa carrière de première division au Racing Paris qui trustait la première partie de tableau à la fin des années 1940 (213 matchs de championnat avec des saisons à sept puis six buts, et deux finales de Coupe de France dont une remportée), puis en D2 au FC Nantes. Il s’est éteint le 20 février 2007, au Mans, où il avait d’ailleurs terminé sa carrière de joueur.

#611 - Dado Pršo

Dado Pršo
Monaco (1999-2004)

Dado Pršo est avant tout une queue de cheval, une gueule, un style. La tige de Zadar, 190 centimètres, est aussi une histoire : celle d’un type à qui on a d’abord diagnostiqué une faiblesse cardiaque, qui a ensuite fui la guerre et qui aurait pu commencer son histoire avec la France au FC Nantes. C’est finalement à Rouen que son affaire française a commencé, Pršo devenant une tronche héroïque à Robert-Diochon, mais aussi en ville, où, à l’aide d’une vie nocturne agitée et d’un paquet d’excès, le buteur fera péter la balance. « Sur une séance d’une heure et demie, il ne tient qu’une demi-heure » , lâchera à l’époque Daniel Zorzetto, son entraîneur en Seine-Maritime. Puis, Dado s’est repris en main, a rencontré une femme, a filé à Saint-Raphaël, a bossé comme un dingue et a tapé un jour dans l’œil de Gérard Banide lors d’un match face à la réserve de l’AS Monaco. Bingo : d’abord recruté pour faire le nombre, il fera un tour en Corse, à Ajaccio, et s’est fait, entre les pépins, sa petite histoire sur le Rocher – 45 buts en 146 matchs, dont un quadruplé face à La Corogne le jour de ses 29 ans – avant de s’offrir le contrat d’une vie chez les Rangers. Un roi, tout simplement.

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