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Top 10 : les voleurs de but
Ces hommes sans foi ni loi ont un jour volé un but tout fait à leur coéquipier. Un comportement indigne qui s'explique principalement par la soif du buteur, jamais rassasiée, doublée d'un égoïsme flagrant, qui jette l'opprobre sur toute une profession. Absolument dégueulasse et révoltant.
1) Salaheddine Bassir (Christophe Landrin)
C’est une des grandes énigmes de l’histoire du foot, et elle ne sera probablement jamais élucidée. Qui a marqué le premier but des Lillois, brillants vainqueurs de Parme lors du troisième tour préliminaire de la Ligue des champions 2001/2002 ? Les versions diffèrent, mais l’UEFA, obligée de trancher, a finalement attribué sa paternité au Marocain Salaheddine Bassir après des débats houleux. Perplexes à la vue des images, les commentateurs, déboussolés par tant d’opportunisme, changent de version sur chaque ralenti, pour finalement s’accorder sur un mièvre « moitié-moitié » . Le toujours discret Christophe Landrin ne portera pas réclamation après son centre victorieux, qui était tout de même bien raté. D’autant plus que son raccroc de coéquipier, sans remords et sans regrets, est déjà occupé à célébrer son exploit en solo sur la pelouse du stade Ennio Tardini. Le second but de Johnny Ecker, auteur d’un coup franc magistral, ne souffre en revanche d’aucune contestation.
2) Jérôme Leroy (Ronaldinho)
On peut l’aimer ou le détester, mais force est de constater que Jérôme Leroy est un esthète. À l’aise balle au pied, l’ancien joueur du PSG et de l’OM s’est avant tout signalé sur les pelouses de Ligue 1 par sa facilité technique et son sens du spectacle invétéré. Plus que tout autre, il connaît la valeur d’un but bien fait. Nul ne sait donc pourquoi il s’est mis en tête de voler à Ronaldinho les honneurs d’une réalisation splendide face à l’OM en mars 2003, lors d’un succès mémorable au Vélodrome. Après un fantastique déboulé, le Brésilien dribble Runje puis Hemdani, avant de tirer mollement dans le but vide. Lancé comme une balle, Jérôme Leroy s’arrache sans raison valable pour pousser la balle au fond, à la grande stupéfaction de son coéquipier. Le pire, c’est qu’il a l’air fier d’avoir détruit le chef-d’œuvre, et qu’il part, le bras levé et le buste haut, fêter son geste indigne de son côté. Lucides, ses coéquipiers ne s’y trompent pas et viennent féliciter Ronnie, qui vient d’éparpiller l’OM façon puzzle.
3) Pierre-Emerick Aubameyang (Robert Lewandowski)
Le plus récent des vols recensés dans ce top. Mené 2-0 sur la pelouse d’Hoffenheim, le Borussia Dortmund a la gueule de bois après sa récente qualification pour les huitièmes de finale de la ligue des champions. Tandis que les hommes de Jürgen Klopp errent sur le terrain, ils se voient offrir un cadeau du ciel à trois minutes de la mi-temps. Suite à une boulette affreuse de Jens Grahl, le portier adverse, Robert Lewandowski, à l’affût, ne se fait pas prier fait pour frapper le ballon d’une petite pichenette opportuniste. L’attaquant polonais croit inscrire son 12e but de la saison en Bundesliga, mais c’est sans compter sur le pouvoir d’accélération de ce roublard de Pierre-Emerick Aubameyang, qui sprinte pour pousser la balle au fond. Dépourvu d’ambition et de fierté, l’ancien Stéphanois inscrit ainsi son 9e but en championnat. Et comme tout est bien qui finit bien, Dortmund arrache finalement le nul 2-2.
4) Pierre Issa (Thierry Henry)
Lancé pour son premier but en Coupe du monde, au terme d’un grand pont plein de talent, Thierry Henry ne marquera pourtant jamais vraiment contre l’Afrique du Sud. La faute à l’inénarrable Pierre Issa, auteur ce jour-là de deux CSC absolument hideux, et qui a injustement sucré une réalisation au meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France. Alors que le ballon file tranquillement vers les filets pour un 3-0 mérité, le maladroit s’arrache pour réaliser un double contact de toute beauté sur la ligne de but. Ce qui lui vaudra quelques années plus tard ce commentaire acerbe de la part de Quinton Fortune : « Sérieusement ? Il était payé ou quelque chose comme ça ! Seul devant son gardien, il préférait la mettre au fond. Je pensais même qu’il allait célébrer avec les Français ! » . Le plus triste, c’est que l’ancien défenseur de l’OM n’était pas payé, il essayait seulement d’aider avec ses pieds carrés.
5) Pedro Rodríguez (Neymar)
Le 11 décembre dernier. Étincelant tout au long du match et parfaitement servi dans la profondeur, Neymar s’élance en vue d’un quadruplé face au Celtic en Ligue des champions (6-1). C’était sans compter sur son coéquipier Pedro, toujours volontaire. Alors qu’il a dribblé le gardien et s’apprête à marquer, le Brésilien voit l’ailier catalan arriver à toute vitesse et le heurter, pour finalement lui chiper le ballon et envoyer un cachou détourné en corner par le défenseur. Pire encore que le voleur de but, voici le voleur de but foireux, une espèce de la pire engeance. Allez, sans rancune pour cette fois.
6) Nani (Cristiano Ronaldo)
Sans aucun doute le fleuron de ce classement. Parti dans une série de dribbles dont il a le secret, Cristiano Ronaldo humilie la défense espagnole avant de lober astucieusement un Iker Casillas crucifié. Le ballon franchit la ligne de but d’un bon mètre, mais son coéquipier Nani a la brillante idée d’aller y mettre son coup de tête. Signalé hors-jeu, l’ailier portugais sabote la plus belle action de CR7 puisque le but, parfaitement valable, est finalement refusé. Conscient de la gaffe, le joueur de Manchester United a tenu à demander pardon à l’issue de la rencontre, heureusement remportée 4-0 par les Lusitaniens. « J’ai touché la balle car je pensais ne pas être hors-jeu. Tout est arrivé très vite. Après avoir réfléchi, j’ai présenté mes excuses à Ronaldo. C’était une magnifique action et je n’aurais pas dû la ruiner » . Clément, CR7 n’en voulait pas vraiment à son coéquipier, mais davantage aux arbitres frappés de cécité : « Je ne comprends pas, le ballon était déjà entré d’un bon mètre, même un aveugle aurait pu le voir. Je ne sais pas si c’est une coïncidence, mais mes plus beaux buts avec l’équipe nationale sont toujours annulés » . Encore un complot de Michel Platini ?
7) Miroslav Klose (Mesut Özil)
En cette soirée du 2 septembre 2011, l’Allemagne est occupée à fesser l’Autriche (6-2) lors des qualifications pour l’Euro. Auteur de 14 réalisations en Coupe du monde, Miroslav Klose est au sommet de son art et empile les buts comme les perles. Cependant, il se rend ce soir-là coupable d’un grave coup d’intox, qui confine à la malhonnêteté. Alors que le talentueux Mesut Özil ouvre le score d’une frappe à l’entrée de la surface, l’attaquant de la Lazio fait comme s’il avait dévié la balle et part célébrer son but comme s’il était le véritable buteur. Le ralenti est pourtant formel : Miroslav Klose n’a rien dévié du tout. Naïvement, tout le monde s’est fait avoir sans se poser de questions, à commencer par le meneur de jeu du Real Madrid, bien ingénu sur le coup. On appelle ça profiter honteusement de sa réputation, ou plus trivialement, un abus de position dominante.
8) Franck Ribéry (Mario Gómez)
Nous sommes en décembre 2011 et le Bayern façonné par Jupp Heynckes commence à prendre forme, même s’il terminera dauphin du Borussia Dortmund à l’issue du championnat et perdra contre Chelsea en finale de Ligue des champions. En attendant, les Bavarois s’occupent à rosser le Werder Brême, comme ils en ont pris l’habitude depuis quelques années (4-1). À la 77e minute, Mario Gómez est lancé dans la surface et dribble le gardien d’une poussée assez large. Alors qu’il s’apprête à conclure tranquillement, le grand échalas a la surprise de voir un Ribéry affamé arriver à toute vitesse et lui griller la priorité. Pas rancunier, le buteur du Bayern accepte cependant d’enlacer un Kaiser Franck touchant de bonheur et de naïveté, qui signe ce jour-là un doublé de bandit. C’est aussi ça l’amitié franco-allemande.
9) John Dahl Tomasson (Filippo Inzaghi)
On accuse souvent Pippo Inzaghi d’avoir marqué principalement des buts de merde. Et c’est vrai. À la vérité, l’Italien n’était pas le plus séduisant et le plus esthétique des attaquants, mais il avait néanmoins pour lui un véritable sens du but qui a fait ses preuves dans le Calcio et en Coupe d’Europe. Comme ce soir d’avril 2003 en quart de finale de Ligue des champions contre l’Ajax de Zlatan Ibrahimović. Auteur d’un match nul 0-0 à l’aller, le Milan AC se retrouve virtuellement éliminé à la 90e minute de jeu, alors que le score est encore de 2-2 dans un San Siro dépité. C’est le moment choisi par Inzaghi pour surgir devant Bogdan Lobont suite à une remise de la tête de la dernière chance d’Ambrosini. Le Diavolo lobe astucieusement le gardien roumain et envoie pratiquement le ballon au fond des filets, avant que l’affreux John Dahl Tomasson ne décide de saloper ce qui aurait pu être l’un des buts les plus importants de la solide carrière de l’Italien, via une simple petite touche du pied. Encore plus raccroc que son maître à penser, le Danois s’assure une postérité et efface des tablettes le héros de la soirée, qui pourra néanmoins se consoler avec le respect des tifosis et son nom scandé dans une ambiance de folie.
10) Ilija Sivoncic (Pedro Morales)
Le Chilien Pedro Morales, ancien milieu offensif du Dinamo Zagreb, pensait inscrire un but chanceux dans le derby croate en lobant le gardien du Cibalia d’une reprise ratée. Mais alors que le ballon s’apprête à franchir la ligne, son coéquipier Ilija Sivonjic juge utile de prolonger la frappe afin de s’attirer gloire et notoriété. Malheureusement pour notre voleur, il joue de malchance, et se fourvoie gravement en marchant sur le ballon, qui pile net à quelques centimètres du but. Un raté mémorable qui combine manque de justesse technique et mentalité dégueulasse, en plus d’annuler totalement un but tout fait. Si le Dinamo parviendra finalement à égaliser pour arracher le match nul (1-1), nul doute que Sivoncic a depuis eu le temps de méditer cette maxime pleine de vérité : bien mal acquis ne profite jamais.
BONUS :
Le voleur du futur : Tomas Brolin (Roland Nilsson)
Tomas Brolin, l’ancien attaquant de Parme et de Leeds aujourd’hui âgé de 40 ans, est visiblement féru de statistiques et soucieux de la trace qu’il va laisser dans l’histoire. En 2010, soit 19 ans après les faits, le buteur suédois a revendiqué la paternité d’un but inscrit par son compatriote Roland Nilsson lors d’un match amical face à la Norvège le 8 août 1991. « Roland Nilsson m’a volé un but » a notamment expliqué le Suédois sur les ondes de la BBC. Il affirme en effet avoir contré du dos la frappe du défenseur de Coventry mais ne pas avoir voulu gâcher à l’époque la joie de son coéquipier, auteur de son premier but en sélection. Seulement, cet épisode lui est resté en travers de la gorge, et prend aujourd’hui une importance particulière après une carrière marquée par de nombreuses blessures et une demi-finale de Coupe du monde 1994. Pourquoi cette sinistre motivation ? Parce que de petits détails entraînent parfois de petits effets : si ce but lui était finalement attribué, notre héros deviendrait, avec 27 buts au compteur, le septième meilleur buteur de l’histoire de la sélection suédoise… A votre bon cœur m’sieur dames.
Par Christophe Gleizes