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Theo Hernandez, pas vraiment l’assurance tous risques

Par Tristan Pubert
5 minutes
Theo Hernandez, pas vraiment l’assurance tous risques

Devenu titulaire indiscutable dans le couloir gauche de l’équipe de France après la blessure de son frère Lucas face à l'Australie, Theo Hernandez est parvenu à se montrer décisif dans ce Mondial 2022. Néanmoins, le natif de Marseille n’inspire toujours pas une grande confiance défensivement, a fortiori lorsque les Bleus sont acculés dans leurs 25 derniers mètres.

C’est peu dire que Theo Hernandez a vécu un début de Mondial atypique. Initialement cantonné à un rôle de doublure, le latéral gauche de 25 ans a profité de la blessure de son frère Lucas, au bout de treize minutes contre l’Australie (4-1) pour connaître ses premières minutes jouées en Coupe du monde et devenir titulaire de l’équipe de France. Ce jour-là, un quart d’heure après son entrée en jeu, il a d’ailleurs délivré une passe décisive pour Adrien Rabiot, qui a véritablement lancé le Mondial des Bleus. Rapidement décisif et en l’absence d’une concurrence fiable à son poste, le chouchou de San Siro s’est imposé comme un élément indéboulonnable du onze de Didier Deschamps.

Une énergie (trop) débordante

En l’espace de quatre saisons au Milan, Theo Hernandez s’est bâti une réputation de latéral offensif, multipliant les percées dans son couloir gauche. Un apport offensif qui cache toutefois ses importantes largesses défensives, qui deviennent flagrantes lorsque son équipe se retrouve acculée dans les 25 derniers mètres. Et ce manque de rigueur défensive a fait transpirer les supporters tricolores lors du quart de finale face à l’Angleterre (2-1). À la 84e minute, le benjamin de la fratrie Hernandez a concédé un penalty pour le moins stupide en poussant Mason Mount dans le dos. Une intervention à la limite du ridicule, qui a particulièrement agacé Deschamps. Heureusement, Harry Kane a envoyé un missile dans le ciel de Doha. Ce manque de concentration et de maîtrise, Theo Hernandez en est coutumier. Quatre jours plus tard, face au Maroc (2-0), le Rossonero a été l’auteur d’une intervention litigieuse sur Sofiane Boufal, que l’arbitre de la rencontre, César Ramos Palazuelos, n’a cependant pas sanctionnée d’un penalty.

Lorsque la France (ou bien l’AC Milan) maîtrise son sujet et ne se retrouve pas acculée dans ses 25 mètres, Theo Hernandez ne souffre pas et fait preuve de sérénité. Exemple face au Danemark : 100% de tacles réussis, 70% de duels gagnés et une superbe passe décisive pour Kylian Mbappé. Un changement d’ambiance brutal lorsque les Bleus sont en difficulté, comme les prestations face aux Lions anglais et marocains ont pu le montrer. Au moment de préparer sa demie, Walid Regragui a très vite compris la fébrilité défensive du couloir gauche français. Le sélectionneur marocain a insisté sur cette fragilité en forçant les offensives sur le front gauche de la défense tricolore (53% des attaques marocaines face aux Bleus sont venus de ce côté). Si son but inscrit au bout de six minutes de jeu (qui a battu au passage un vieux record) a sauvé sa copie, la performance défensive du champion d’Italie en titre s’est avérée quelque peu inquiétante avant d’affronter un certain Lionel Messi.

Kyk’s dans les pattes

Buteur et double passeur décisif dans ce Mondial qatari, Theo Hernandez peut donc mettre en avant son apport offensif. Mais ses percées ne sont pas forcément couvertes par un Sandro Tonali qui, à Milan, assure les arrières du natif de Marseille. Mais c’est surtout la présence dans son couloir de Kylian Mbappé qui l’empêche véritablement d’exploiter tout son potentiel offensif. Si les deux hommes sont parvenus à combiner contre le Danemark avec une sublime passe décisive de Theo pour « Kyk’s » , la cohabitation reste étroite et compliquée entre les deux hommes. Faute d’automatismes, ils se retrouvent souvent à se marcher dessus. À la différence de Milan, où Rafael Leão a tendance à rentrer dans l’axe pour laisser le couloir à Hernandez, Mbappé reste globalement collé à sa ligne, ne laissant rien, même pas des miettes, à l’ancien coéquipier de Cristiano Ronaldo.

Dans ce Mondial, le latéral lombard a ainsi un apport offensif beaucoup plus faible qu’à Milan : 2,2 tirs/match en moyenne en Serie A depuis le début de saison, contre une moyenne d’un tir par match au Qatar. Avec DD, les latéraux sont avant tout des défenseurs, et cela vaut aussi pour Theo Hernandez (2,6 tacles réussis/match dans ce Mondial contre 1,8 en Serie A cette saison). « À Milan, Theo est beaucoup plus libre et se projette beaucoup plus vers l’avant, a remarqué à juste titre Arrigo Sacchi dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport. C’est totalement différent avec la France, où on lui demande de respecter le véritable rôle de défenseur. »

La Pulga, l’épreuve de force

Au sortir de la victoire contre les Lions de l’Atlas, Theo Hernandez s’est présenté devant les médias avec le sourire aux lèvres, avant de lâcher : « Messi ne me fait pas peur. » Excès de confiance ou détermination, le natif de Marseille devra, quoi qu’il arrive, gommer son manque de rigueur défensive face au co-meilleur buteur de la compétition. Outre le fait que Lionel Messi s’amuse avec les défenses adverses depuis le début du tournoi – ce qui, en soi, est déjà un argument suffisant -, le septuple Ballon d’or est typiquement le style de joueur que redoute le latéral français.

Pour preuve, le calvaire qu’il a subi face à Bukayo Saka qui, toutes proportions gardées, présente quelques similitudes avec la Pulga. Petit gabarit, vif, capable de faire la différence dans les petits espaces et doté d’une excellente vision de jeu, l’ailier droit anglais lui a donné une leçon pendant 90 minutes. Ce soir-là, Theo Hernandez n’a remporté que 50% de ses duels, a perdu onze ballons et n’a réussi qu’une seule interception. Face à l’Argentine, les interrogations subsistent donc concernant la solidité de ce couloir gauche tricolore. Les Bleus ne devront pas se mettre dans la même situation que lors des deux tours précédents. Face à un Lionel Messi des grands soirs, Theo Hernandez ne devra pas uniquement compter sur son énergie débordante, mais en premier lieu sur sa rigueur défensive. Après tout, c’est bien ce que l’on attend en priorité de la part d’un défenseur, non ?

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