- France
- Lille
Sylvain Armand, pour l’exemple ou pour rien ?
Le coordinateur sportif du LOSC, Sylvain Armand, a été finalement sanctionné par la commission de discipline de la LFP. Une décision attendue tant les écarts et les esclandres de l’ancien joueur parisien avait pu défrayer la chronique, nourrir les débats sur les plateaux télé et les réactions, pas toujours mesurées, sur les réseaux sociaux. Alors, finalement, une juste punition ou un petit soufflet pour donner le change ?
Sylvain Armand se retrouve donc privé « de banc de touche, de vestiaire d’arbitres et de toutes fonctions officielles jusqu’au 31 mai », avec la menace hypothétique d’une amende (avec sursis) de 10 000 euros à régler en cas de rechute. Chacun est libre d’estimer à sa juste valeur cette annonce au regard des faits incriminés. L’accusé les avait reconnus sans grande difficulté, tout s’était largement déroulé sous le regard des caméras et devant témoins. Il les avait presque crânement revendiqués un certain temps, au nom de son refus éthique de « l’injustice » . « Je peux m’excuser de défendre mon équipe, mais ma réaction aurait été la même à la fin du match. » Il avait depuis tenté un petit mea culpa dans les colonnes de L’Équipe, surtout soucieux de corriger l’impression que ses actes pourraient laisser auprès de la profession, voire dans l’opinion ou dans sa fiche Wikipédia. « Je n’ai pas à réagir comme ça, ce n’est pas ma personnalité. Je ne suis ni violent ni méchant, ce n’est pas l’image que j’ai voulu donner dans ma carrière pendant vingt ans. »
Dangereux récidiviste ?
Pour la LFP, il s’agissait surtout et sûrement de réaffirmer son autorité auprès d’un récidiviste. Car avant de s’en prendre au corps arbitral à Nantes le 19 mars dernier, ulcéré par l’expulsion de Timothy Weah, lors de la rencontre entre les Dogues et les Canaris, il avait déjà participé à une rixe avec Frédéric Antonetti, entraîneur de Metz, le 18 février, soit un petit mois auparavant. L’enchaînement chronologique ne plaidait pas véritablement en sa faveur. Ce premier exploit lui avait valu quatre matchs de mise à l’écart. Bref, quoi qu’il en soit, il n’avait pas à interpeller le quatrième arbitre, tout simplement parce qu’il n’avait pas à être présent dans cet espace de l’enceinte. La LFP ne pouvait laisser passer cela, le risque étant de se renier ou de réduire considérablement sa crédibilité en tant qu’instance régulatrice. Un tel manque de respect pour les règlements intérieurs du foot pro, quitte à mettre son employeur en porte-à-faux, sonne pour le moins contradictoire quand par ailleurs Sylvain Armand n’a pas manqué l’occasion de se plaindre du manque de respect et de compétences des arbitres. « On leur parle toujours mal. On ne peut pas avoir de communication, ils font des erreurs, mais ne sont pas sanctionnés… »
Ce dernier point n’est pas le moindre peut-être. Les hommes et femmes en noir se sentent de plus en plus un cœur de cible – la VAR les a encore davantage mis sur le gril – aussi bien pour les joueurs que de la part des clubs. Par ailleurs, les récentes violences au niveau amateur (à Melun par exemple) ne s’avèrent pas de nature à les rassurer sur le climat général à leur encontre dans le petit monde du ballon rond. Faute de pouvoir proposer l’autoarbitrage qui responsabiliserait tous les concernés et priverait les staffs de bouc émissaire, la ligue devait les rassurer d’une manière ou d’une autre.
Un geste qui ménage la chèvre et le chou. Le Lillois n’aura pas trop à en souffrir professionnellement. Il pourra même solder l’affaire en matière de communication. Rappelons que des peines allant de deux mois à un an de prison avec sursis, assorties d’interdictions de stade de un à trois ans, ont été requises contres des supporters angevins pour des « délits » assez similaires à ce qui a pu être observé de la part de Sylvain Armand (bagarre, envahissement de terrain). À y regarder donc de près, la justice de la Ligue reste pour le moins compréhensive, tiraillée entre le souci de frapper « pour l’exemple » , sous la pression médiatique, et une relative clémence pour les membres de la « famille » . Pour conclure, le même jour, la commission de discipline abattait une main beaucoup plus lourde sur la question des supporters. L’Olympique de Marseille va payer une amende de 35 000 euros (sans sursis) pour « usage d’engins pyrotechniques, utilisation de laser et intrusion d’un spectateur sur la pelouse » et les tribunes Sud du vélodrome, de Bordeaux et de Nantes seront également fermées. Même pour Sylvain Armand, semble-t-il.
Par Nicolas Kssis-Martov