- CAN
- Finale
- Sénégal-Égypte
Sénégal-Égypte : duel de générations
La finale de la Coupe d'Afrique des nations 2021 qui opposera le Sénégal à l’Égypte ce dimanche soir offre un choc de générations assumé. Celles de deux équipes au style similaire qui chercheront confirmation pour l’une et révélation pour l’autre.
Pas vraiment attendu en entame de tournoi, le duel qui se prépare entre le Sénégal et l’Égypte en cette finale de CAN ressemble de plus en plus à une logique respectée. Deux équipes solides, portées par des individualités affirmées et avec, au bout, l’occasion de donner à sa génération de joueurs un sacre légitime. Empli de clins d’œil à une riche histoire.
De 2002 au « Cissé ball »
Vingt ans. C’est le temps qu’il aura fallu au Sénégal pour retrouver un groupe à même de se hisser au sommet. En 2002, les Lions de la Téranga faisaient en effet trembler le monde, au sortir d’une tournée au Japon et en Corée du Sud devenue mythique. Et en Asie, le capitaine se nommait alors Aliou Cissé. Comme un symbole, l’homme aux dreadlocks est de nouveau investi de ce rôle de guide, cette fois dans le survêtement de sélectionneur. Lui qui, avant de se poser sur le banc, était de ceux qui avaient vécu la triste soirée de Bamako, théâtre d’une finale de CAN perdue en cette même année 2002, manquant le tir au but décisif face au Cameroun. Lui qui, également, dirigeait les siens en Égypte pour l’édition 2019, avant de trébucher (encore une fois) sur la dernière marche, algérienne cette fois. Aujourd’hui et plus que jamais, le contingent semble donc enfin avoir appris de ses erreurs, et le Sénégal n’a peut-être jamais été aussi proche d’inscrire son nom au palmarès de la CAN pour la première fois de son histoire.
Un jeu simple, peu spectaculaire, mais ultra efficace : le « Cissé ball », comme on aime l’appeler au pays. Rien étonnant, dès lors, de voir les Sénégalais sortir en tête de leur groupe avec un seul but marqué (victoire 1-0 face au Zimbabwe puis deux nuls 0-0 devant la Guinée et le Malawi). Mais qu’importe, critiquée à ses débuts, cette facette a vite laissé place à un enthousiasme certain. Une entrée en douceur avant de monter en puissance, en quarts puis en demies. Au milieu de ces garanties de résultat, il y a Sadio Mané. Capitaine exemplaire, le sourire toujours en coin, l’attaquant de Liverpool n’a jamais semblé aussi impliqué. Le même qui s’est arraché en taclant le ballon dans les pieds d’Issoufou Dayo pour le deuxième but des siens contre le Burkina Faso. Car tel qu’il aime à le dire : « J’ai chassé toute ma carrière, mais peu importe ce que j’ai attrapé, j’ai toujours faim. Mon peuple a attendu longtemps. Je suis prêt à tout échanger pour gagner ce match. C’est mon heure. Le lion rugit. »
Un rugissement désormais attendu par 28 joueurs et plus de 16 millions d’âmes. Conscients qu’après Fadiga, Camara, Diouf ou Bouba Diop, Kouyaté, Gueye, Koulibaly et Mendy pourraient définitivement marquer cette histoire semée d’embûches et qui ne demande qu’à s’écrire. En faisant honneur à leurs aînés, d’abord et en glanant un sacre historique, surtout.
Époque dorée et renouvellement
En face, l’Égypte pourra se regarder dans le même miroir. La sélection masriya aura effectivement été l’élément surprise d’une compétition que l’on pensait prévisible. Peu en vue, les Pharaons ont su bénéficier de la rigueur d’un Carlos Queiroz sans fioritures. « Je ne fais pas de surprises dans mon style de jeu, se décrivait-il en conférence de presse. Je suis un entraîneur à l’ancienne, un dinosaure. Ma stratégie est simple. » Ainsi, et à l’instar de leurs homologues sénégalais, les Égyptiens auront quitté les poules avec deux buts inscrits (victoires 1-0 face à la Guinée-Bissau et au Soudan). Mieux, ils auront accroché trois prolongations et deux séances de tirs au but en huitièmes, quarts et demies. Pas de fantaisie, mais un mental à toute épreuve, porté, là également, par un leader absolu : Mohamed Salah. Au service total et dévoué d’un collectif parfois sans inspiration, l’associé de Mané chez les Reds sortira lui aussi grandi de cet événement.
Car si le Sénégal a pour vœu de confirmer les objectifs placés en une génération attendue depuis deux ans maintenant, l’Égypte souhaite, quant à elle, en voir une se former. Un cru 2022, fait, comme souvent, de joueurs locaux, mais dont l’ossature composée d’éléments européens a permis de sérieusement consolider. Un mélange savamment orchestré par Queiroz, arrivé à point nommé pour rectifier une trajectoire beaucoup trop aléatoire depuis une décennie maintenant, pour une sélection habituée au faste des succès. Il faut dire que ces dernières années, l’équipe reine de l’Afrique, auréolée de trois titres continentaux entre 2006 et 2010, n’était plus qu’un lointain souvenir. Un temps perdu que la finale de 2017 puis la qualification en Coupe du monde russe ont commencé à rattraper. Maintenant, l’heure de la révélation définitive est venue. Celle qui permettra à Elneny, Trezeguet, Zizo et Marmoush de montrer à toute une patrie qu’ils existent. S’il fallait qu’ils oublient un tant soit peu leurs rêves de grandeur, les légendes Wael Gomaa et Essam El-Hadary, membres actifs de la période dorée égyptienne et aujourd’hui adjoints, ne manqueront pas de leur rappeler. Des symboles générationnels, encore et toujours.
Par Adel Bentaha