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Rúben Amorim, l’homme qui a remis le Sporting à la mode

Par Quentin Ballue
5 minutes
Rúben Amorim, l’homme qui a remis le Sporting à la mode

Julian Nagelsmann a beaucoup de choses pour lui, assurément. Mais le futur coach du Bayern perdra peut-être bientôt son surnom de « Baby Mourinho », que lui avait trouvé Tim Wiese. Un prétendant naturel a en effet émergé au Portugal, et il se nomme Rúben Amorim. Âgé de 36 ans seulement, l'ancien milieu du Benfica vient de mener le Sporting à son premier titre de champion depuis 2002. Et ce n'est que le début.

Dix-neuf ans que le Sporting attendait ça. Qu’une équipe succède enfin à celle de Mário Jardel, Ricardo Quaresma, João Pinto et Paulo Bento. À l’époque, Rúben Amorim était encore au centre de formation du grand rival, le SL Benfica. Il en portera le maillot 154 fois, raflant au passage trois titres de champion du Portugal, six coupes nationales ainsi qu’une Supercoupe. Un Benfiquiste pur jus, socio du club depuis toujours, qui, ironie de l’histoire, a remis le Sporting au premier plan. Nommé il y a à peine plus d’un an, Amorim tutoie le sans-faute. Vainqueur de la Coupe de la Ligue en janvier après avoir effacé Porto et Braga, il est sur le point d’offrir aux Leões un championnat sans la moindre défaite. En cas de carton plein lors des deux dernières journées, il pourrait même permettre au Sporting d’égaler le record de points co-détenu par Benfica et Porto (88 points). What else ? Ou plutôt : Que mais ?

Phénomène Rúben

Une ascension sensationnelle pour un homme qui a commencé sa carrière de coach à l’été 2018. Alors âgé de 33 ans, il arrive à Casa Pia, modeste pensionnaire de troisième division, en tant qu’entraîneur stagiaire. L’expérience tourne court puisqu’il fait ses valises en janvier, à la suite d’une suspension ordonnée par la fédération (ensuite annulée par le TAS) pour avoir donné des instructions aux joueurs, ce que ses diplômes ne l’autorisaient pas encore à faire. Quelques mois seulement, qui mettront toutefois le club sur la voie de la montée.

Les dirigeants de Braga, où il avait joué entre 2012 et 2013, lui remettent le pied à l’étrier en septembre 2019 pour diriger la réserve. Une dizaine de matchs plus tard, fort de résultats plutôt probants, il est promu sur le banc de l’équipe première à la place de Ricardo Sá Pinto. Expérience éphémère, là encore, puisqu’il ne la coachera que treize matchs, pour un bilan de dix victoires, un nul et deux défaites (toutes face aux Rangers en Ligue Europa). Deux petits mois, le temps de battre Porto, le Sporting et le Benfica en championnat, et de soulever la Coupe de la Ligue, avant que le SCP ne le débauche.

« Rúben Amorim sera trop grand pour le football portugais »

Malgré un CV très léger, le Sporting n’a pas hésité à mettre 10 millions d’euros sur la table pour l’arracher à Braga. Un troisième changement d’entraîneur au cours de la saison, et un pari assez fou ? Finalement, pas tant que ça. « C’est un entraîneur qui va créer de la valeur », martelait le président Frederico Varandas lors de sa présentation. Les faits lui ont donné raison, puisque Amorim a fait de Nuno Mendes (19 ans), Pedro Goncalves (23 ans), Matheus Luiz (23 ans) ou encore Tiago Tomas (19 ans) des cadres dont la cote a grimpé. « Parfois, ce qui semble bon marché s’avère cher et ce qui semble cher s’avère bon marché. Je n’ai aucun problème à investir dans le bon coach. Dans quelques années, Rúben Amorim sera trop grand pour le football portugais. »

C’est un homme de défis. Entraîner le Sporting en est un grand, il n’aurait pas pu apporter une meilleure réponse.

Coéquipier à Belenenses, José Pedro se rappelle « l’énorme volonté de s’affirmer » de Rúben Amorim : « Durant le temps que l’on a joué ensemble, il a toujours été égal à lui-même, toujours très compétitif. Il transmettait ça tous les jours. Connaissant son exigence et sa personnalité, c’est un entraîneur qui a tous les joueurs de son côté. Il est très bien préparé et il a toujours gardé sa ligne, même quand, dans le sprint final, ils n’ont pas gagné deux ou trois matchs. C’est un homme de défis. Son parcours a également été jalonné de défis. Entraîner le Sporting en est un grand, il n’aurait pas pu apporter une meilleure réponse. »

Le coach qui valait 30 millions

Le Sporting s’est justement empressé de mettre les barbelés en le prolongeant en mars, histoire d’allonger son contrat jusqu’en 2024, assorti d’une clause libératoire de 30 millions d’euros. Rien que ça. Une confiance et un soutien sans faille qui ne sont pas de trop au moment de faire face à la commission disciplinaire. Déjà quatre cartons rouges reçus depuis son arrivée en raison de mots ou de gestes envers le corps arbitral, et quelques suspensions, dont une de quinze jours en avril. De quoi rassurer, aussi, ceux qui doutaient de son engagement. « Je suis un fanatique de la victoire, avait-il déclaré face à la presse, qui l’avait interrogé sur son attachement au club rival. Mon engagement est le même dans tous les clubs. Je connais la grandeur du Sporting. Personne ne veut gagner plus que moi. »

Il était comme ça en tant que joueur, toujours « vivant », toujours compétitif.

« Il était comme ça en tant que joueur, toujours « vivant », toujours compétitif, toujours en train de garder tout le monde concentré, sourit José Pedro. Dès qu’il entrait sur le terrain, il ne donnait jamais rien à l’adversaire. Et quand le résultat n’était pas là, on l’entendait. Aujourd’hui, on peut voir qu’il a fait ce transfert en passant de joueur à entraîneur. » Peut-être une autre trace de l’influence de Jorge Jesus, l’entraîneur qu’il a le plus côtoyé dans sa carrière, également passé sur le banc des deux géants lisboètes. Même si l’intéressé se sent plus proche de José Mourinho, comme il le révélait à Tribuna Expresso : « Il y a des entraîneurs qui ont une façon de voir le jeu que j’aime, comme Guardiola, mais pour moi, la référence est Mourinho, car je vois le ballon plus comme lui. Il analyse très bien les adversaires et met son équipe, non seulement avec un modèle de jeu particulier, mais aussi en pensant à comment s’adapter pour gagner. Et je suis un peu comme ça. » Pour la plus grande joie du Sporting.

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Par Quentin Ballue

Propos de José Pedro recueillis par QB.

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