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« Remporter les barrages, c’est mieux qu’une Coupe de France »

Propos recueillis par Maeva Alliche et Florian Lefèvre
9 minutes
«<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Remporter les barrages, c’est mieux qu’une Coupe de France<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Ils ont vécu les barrages de montée/descente dans les années 80 et 90. Ils ont pleuré ou exulté. Ces anciens joueurs racontent la saveur si particulière de ces matchs couperet qui s’apprête à revenir parfumer la Ligue 1.

Pierrick Hiard

Le gardien du Stade rennais a vécu l’incroyable scénario des barrages contre le FC Rouen (0-1 ; 0-1 ; 6-7 aux t.a.b.) en 1984-1985

« À l’époque, les barrages, c’était un vrai marathon ! Le troisième de D2 jouait chez le deuxième sur un match sec, on croisait ensuite les groupes A et B en aller/retour et enfin il y avait ces deux matchs contre le barragiste de D1 : cinq matchs au total. Nous, on avait terminé troisièmes. On va à Saint-Étienne, tout le monde nous donnait perdants. On fait un petit exploit. Geoffroy-Guichard était plein, on les tue en contre… ça a la saveur d’une Coupe de France – un vainqueur, un vaincu, c’est un match couperet avec la même ambiance. On se dit : « Maintenant, on essaye d’aller au bout contre Mulhouse. » Après, on est euphoriques. Dans nos têtes, on est mieux préparé à aborder ce match que le FC Rouen, qui a plus de pression. Le scénario est terrible, on perd 1-0 à domicile, sur un coup franc pleine lucarne. On va là-bas, ça se termine aux tirs au but, on ne l’oubliera jamais. Un film ne ferait pas mieux. Ils tirent les premiers. J’ai la chance d’en arrêter deux. Je pense que le plus dur est fait, mais derrière, Bensoussan arrête ses penaltys aussi. Après, j’en arrête deux, ils tirent les premiers : « Ça y est, on y est. » Putain, il l’arrête aussi ! J’arrête, il arrête, on arrive au dernier joueur de champ. C’est un très très grand souvenir. Après le match, Alain Doaré me dit : « Après, c’était à toi de tirer. » Ouf (rires) ! On est tellement dans notre match qu’on n’y pense même pas. J’ai eu la chance de gagner une Coupe de France, une montée en D1, ça peut s’en rapprocher. »


Serge Le Dizet

Battu avec le Stade rennais contre le Racing Strasbourg (0-0 ; 4-1) en 1991-1992

« On jouait une grosse équipe : (Yvon) Pouliquen, (Marc) Keller, (Frank) Lebœuf, ils avaient des statures de joueurs de D1. À Rennes, on avait été repêchés l’année d’avant (Rennes avait terminé dernier du championnat, mais Bordeaux, l’OGC Nice et Brest ont été rétrogradés administrativement par la DNCG, ndlr). Je me souviens que c’est moi qui ai marqué le but, parce qu’en tant que défenseur, ça ne m’arrivait pas souvent. Le ballon revient à 35 mètres du but, je le reprends du pied droit, il vient se loger dans la lucarne opposée : une mine sous la barre ! Le stade était plein, le public poussait énormément. Il faut dire que c’était la grande époque de Strasbourg. Nous, on était une bonne équipe de copains, mais il y avait des manques sur le plan technique. Il y avait une blague qu’on entendait souvent à l’époque : « Qui est-ce qui est rouge et noir et qui descend ? C’est le stade rennais. » Ça caractérisait le club, qui n’arrivait pas à se stabiliser. Moi, il me restait trois années de contrat, mais j’ai décidé de quitter le Stade rennais parce que c’était un frein à mes ambitions. Si on n’était pas descendu, peut-être que je serais encore à Rennes aujourd’hui. »


Roby Langers

Héros du barrage Strasbourg-Nice (3-1 ; 6-0) en 1989-1990

« À l’aller, à Strasbourg, le stade était plein à craquer, avec un super public qui les a poussés. On était menés 3-0, s’ils marquaient le quatrième, on était morts, mais j’ai inscrit un but très important à l’extérieur. Les Strasbourgeois étaient très euphoriques, une petite bagarre a éclaté quand on est descendus dans le vestiaire, car certains d’entre nous n’ont pas apprécié leur tour d’honneur. On s’est fait chambrer. On savait qu’on devait gagner par deux buts d’écart au retour et on s’est juré de le faire pour rester en D1. Le stade ne contenait que 25 000 places, mais il y avait au moins 30 000 personnes. Dans les gradins, ma femme a trébuché sur Arsène Wenger, alors entraîneur de Monaco, parce qu’il était assis sur les escaliers. D’ailleurs, ma femme n’a pas vu les deux premiers buts, elle était bloquée dans les bouchons sur l’autoroute. En moyenne, il y avait 12 000 supporters derrière nous et 20 000 pour une grosse équipe, là on aurait pu en mettre 50 000 ! J’ai marqué quatre buts en une mi-temps. C’est le match de ma vie. On a fait des tours d’honneur, les gens étaient fous, ils voulaient tous mon maillot, les flics étaient autour de moi. C’est comme si Nice avait gagné la Coupe d’Europe. Mais je pense que mon but le plus beau et le plus important, c’est celui à l’extérieur qui compte double : une volée du gauche sur une tête de Jules Bocandé – qui n’est malheureusement plus parmi nous. Il dévie aussi de la tête sur le premier but au retour, on avait travaillé ça à l’entraînement À chaque fois que je retourne à Nice, tout le monde me reparle du match retour. La dernière fois que j’y suis retourné, c’était il y a un mois, pour Nice-PSG (3-1). Avant le match, on m’a donné l’Aiglon d’honneur au milieu du terrain, et sur les écrans géants, ils ont montré les quatre buts. Quand il y a eu Luxembourg-France, j’ai croisé Marc Keller, il m’a dit : « Roby, on en reparle encore à Strasbourg. » Trente ans après, ça montre bien que ce match a marqué les esprits. »


Didier Monczuk

Après deux échecs avec Strasbourg, la troisième fut la bonne contre le Stade rennais (0-0 ; 4-1) en 1991-1992

« Mon plus grand souvenir des barrages, c’est certainement la troisième fois, quand on est montés. Contre Angers, deux fois match nul. Ils avaient eu les meilleures occasions, on s’en est sortis par miracle. On sentait l’engouement dans toute la ville, les spectateurs venaient nombreux en fin de saison parce qu’on était à la lutte avec Bordeaux pour passer premier. Remporter les barrages, c’est mieux qu’une Coupe de France, parce qu’il y a la montée au bout. Regarde la joie que cela a procuré à Amiens. Ça se joue sur quinze jours de moins, mais tous les joueurs sont prêts à sacrifier quinze jours pour jouer en D1. En 1990, contre Nice, on a pris une raclée au retour parce qu’on avait des blessés en défense. Perdre 6-0, c’est un coup de massue. Après, chacun part de son côté. Les premiers jours de vacances, on repense sans arrêt à ce match… »


Jean-Pierre Orts

L’homme qui a perdu cinq fois les barrages (d’abord avec Valenciennes, 1981-1982, puis deux fois avec Lyon, 1986-1987, 1987-1988, et encore une paire de fois avec le FC Rouen, 1989-1990, 1992-1993)

« Les barrages, pour moi, ce ne sont que des mauvais souvenirs. Le plus douloureux, ce sont les barrages perdus avec Valenciennes, contre Mulhouse. Avec Lyon et Rouen, on n’a pas réussi à monter en D1, alors qu’on savait que la survie du club passait par un maintien. Mais les plus grands regrets, c’est avec Lyon, parce qu’on avait la meilleure équipe du championnat de D2. On est battu deux fois par les équipes qui accèdent finalement à la D1. À chaque fois, c’est sur des concours de circonstances. Contre Cannes, on avait perdu nos deux gardiens en Coupe de France. Au retour, on bombardait, mais Albert Emon égalise sur leur seule attaque (1-0 ; 1-1). On sent l’euphorie en ville, Gerland était à guichets fermés. Contre Caen, à la 90e, le défenseur Mario Corian anticipe, au lieu de la laisser au gardien François Lemasson, il veut faire une talonnade, Philippe Prieur se retrouve tout seul, et on est battu sur ce but hasardeux. Ce que je retiens, c’est que ce n’est pas forcément la meilleure équipe qui franchit l’obstacle. Mais franchement, c’était un plaisir de jouer ces barrages. Même s’il avait fallu jouer tout l’été… »


Maurice Bouquet

Victorieux du Racing Strasbourg avec le Brest Armorique FC en 1988-1989

« Nous, on était en 2e division, on n’avait pas de tension contrairement à Strasbourg qui jouait son maintien en Ligue 1. On a surtout essayé de ne pas se mettre de pression, de ne pas donner d’importance majeure à ce barrage. On a joué l’esprit libre, on est allés faire un premier résultat à Strasbourg, ce qui nous a donné de la confiance pour le second match. Au niveau du mental, le club de Ligue 2 a un avantage psychologique sur celui de Ligue 1 qui a lutté toute la saison pour son maintien. Il a eu la pression toute l’année, et cette pression ne le quitte pas pour le barrage, parce qu’il est favori alors que l’autre n’a rien à perdre. Ça se gagne au mental, c’est comme ça qu’on avait battu Strasbourg à l’époque, on était très costauds dans la tête. On avait réussi à les faire douter d’entrée. On n’était pas restés derrière, on leur avait montré qu’on n’avait peur de rien, rien à perdre et qu’on était là pour gagner. On était sur une dynamique positive ce qui nous avait donné de l’envie et de la motivation. Les barrages sont une guerre mentale, pour l’équipe qui n’est pas prête à passer en mode guerrier, ça devient compliqué. »


Francis Gillot

Un homme rompu au barrage avec Valenciennes (1981-1982), Strasbourg (1988-1989) et Lens (1990-1991)

« Valenciennes, je démarrais, j’étais très jeune. Strasbourg, je m’étais cassé le pied en fin de saison et je crois que je n’avais pas joué. Et Lens, on avait joué contre Toulouse, on avait perdu, mais on était quand même montés sur tapis vert à la suite du dépôt de bilan de Bordeaux. Comme quoi, l’histoire, parfois… C’est tellement vieux, je n’ai plus vraiment de souvenir du déroulement des rencontres. Mais je me souviens que ces matchs-là sont assez compliqué à gérer, qu’on soit joueur ou entraîneur. On joue tout sur un match, un peu comme quand avec Lens on avait joué Niort pour le dernier match de championnat (lors de la saison 1987-1988, ndlr), si on gagnait on restait, si on perdait on redescendait. Ça, c’était encore pendant le championnat, mais c’est un peu le même style de rencontre. On joue tout sur deux matchs, tous les sentiments sont mélangés. Mais quand on est joueur, on ne réfléchit pas de la même façon qu’en tant qu’entraîneur, on est toujours un peu insouciant, on pense que ça va toujours aller. Alors qu’entraîneur, on a un peu plus de crainte, de recul par rapport à ça. Pour être passé par là trois fois, je trouve que c’est bien d’avoir remis en place les barrages, ça donne du piquant à la fin de saison. »

Dans cet article :
Benjamin Nivet : « On est prêt pour créer l’exploit »
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