- Décès de Maradona
Quand Diego Maradona signait aux Newell’s Old Boys
Retour sur la brève, mais intense aventure de Diego aux Newell’s Old Boys, le club qui l’a accueilli après son départ de Séville, en 1993.
Un brassard balancé sur la pelouse et un retour immédiat aux vestiaires, agrémenté de mots doux à destination de Bilardo (et de sa mère). C’est ainsi que s’est terminée l’aventure sévillane de Diego Maradona, furieux d’avoir été sorti par El Narigón lors de la rencontre face à Burgos, alors que l’ancien sélectionneur argentin lui avait demandé de faire une infiltration à la pause afin qu’il puisse jouer la seconde mi-temps. Bilardo tentera par la suite de justifier sa décision en invoquant le genou douloureux du joueur, de se rabibocher avec El Diez en se déplaçant chez lui – ils en seraient venus aux mains – mais il était trop tard. Maradona avait pris sa décision : « Séville plus jamais. Trop c’est trop, j’ai plus envie d’arrêter le foot que de continuer. On s’en va ! », aurait-il dit à Claudia, sa femme. Fini l’Europe, direction l’Argentine, où, en dépit de ses kilos en trop et d’un génie devenu intermittent, Diego dispose d’une aura toujours intacte.
40 000 spectateurs pour le premier entraînement
Désireux de disputer le Mondial 1994 avec l’Albiceleste, Maradona se laisse le temps d’écouter plusieurs clubs. À commencer par son tout premier, Argentinos Juniors, avec lequel les négociations auraient capoté à cause de barras bravas faisant pression afin qu’il leur verse 50 000 dollars. Dans l’œil du Ciclón, l’Argentin est aussi annoncé du côté de San Lorenzo, mais c’est finalement Newell’s Old Boys qui remporte la mise. En particulier grâce à l’entraîneur de l’époque, Jorge Solari, proche de l’agent du joueur, et qui convaincra El Diez à coups d’allers-retours incessants entre Rosario et Buenos Aires. « El Indio est venu et m’a dit : « De l’argent, nous n’en avons pas, mais je te garantis que tu vas te plaire chez nous » » , se souvient Maradona, dans une interview réalisée – avec le maillot rojinegro – en 2013.
Inconnues des dirigeants pendant un long moment, ces tractations engendrent notamment l’avancement des entraînements à 6h du matin – pour permettre à Solari de rejoindre la capitale – et par la même occasion une certaine incompréhension des joueurs, mais qu’importe : début septembre 1993, Diego Maradona débarque à Rosario dans un aéroport plein à craquer, signe son contrat quelques jours plus tard et débute alors une brève, mais intense folie. Directement assimilée par le joueur : « La première chose qui m’a frappée, c’est la chaleur de Rosario, c’est une ville qui respire le foot. Le premier entraînement était dans la même veine que celui que j’ai fait à Naples. C’était unique. » Plus de 40 000 personnes – dont certaines habillées aux couleurs de Central – se massent dans le Coloso del Parque pour assister aux premiers pas du joueur. Et c’est le même public, incandescent, qui l’accueillera pour ses débuts sous le maillot des Leprosos : un match amical face à Emelec.
Un Gamin en or devenu vieux
Sous le regard du jeune Leo Messi, six ans, Maradona permet à son équipe de l’emporter 1-0 en inscrivant un but célébré sur le terrain par toute son équipe et même les photographes, dans un stade en liesse.
Outre celles des fans, Maradona déchaîne également les passions de ses adversaires. Plusieurs joueurs d’Emelec se battent au moment d’échanger les maillots, mais El Diez ne donnera le sien à aucun d’entre eux, l’ayant réservé à Fidel Castro. Ravivé par la ferveur, mais fragile physiquement et psychologiquement, Diego Maradona joue ensuite cinq petits matchs en première division, sans en gagner aucun, puis se blesse face à Huracán, début décembre 1993. Éloigné des terrains pendant plusieurs semaines, il revient dans le groupe alors que Solari a été remplacé par Jorge Castelli.
Entre les deux, le courant ne passe pas et Diego Maradona porte une dernière fois la tunique de Newell’s le 26 janvier 1994, lors d’un amical face au Vasco de Gama. Frustré et fatigué, le joueur ne se présentera ensuite pas aux entraînements du club, reclus dans sa propriété de Moreno – depuis laquelle il tire avec une carabine à air comprimé sur des journalistes jugés trop intrusifs – et refusera de jouer les matchs amicaux programmés par le club. Le président Cattaneo décide alors de résilier le contrat du joueur et entérine le départ de Diego. « Je demande pardon aux supporters de Newell’s de ne pas avoir donné tout ce qu’ils pouvaient attendre de moi. Je n’oublierai jamais leur accueil et tout ce qu’ils m’ont apporté », déclarera Maradona à la suite de l’annonce. Tristement conscient d’être maintenant dépassé par une passion qui lui avait été vitale pour arriver au sommet de son art.
Par Victor Launay