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Pourquoi le FC André Macairois va être champion grâce au vieillissement de la population
Au début de la saison 2016-2017, la Fraternelle Saint Macaire (FSM) et l’Étoile des Mauges Football décident de fusionner en dépit de leur rivalité historique pour fonder le FC André Macairois, club inscrit au Vrai Foot Day. Une union forcée qui fonctionne malgré tout, et qui va même emmener le petit club du Pays de la Loire au titre de Ligue 1 dans dix ans. Voici comment.
La population française vieillit…
C’est l’INSEE qui le dit : si la population de la France augmente, c’est d’abord grâce (ou à cause) de l’allongement de la durée de vie et du vieillissement des habitants. La preuve : l’indice de fécondité ne cesse de diminuer (1,88 enfant par femme en 2017, contre 1,93 en 2016 et 2 en 2014) et le pourcentage des plus de 65 ans ne fait qu’augmenter (19,5 % de la population totale, contre 19,2% en 2016 et 15,5% en 1996). C’est peut-être un détail pour vous, mais cela a des conséquences sur le football.
Donc les jeunes se font rares dans les Mauges…
Avec le départ des jeunes dans les grandes villes pour y suivre des études, les petites communes ne disposent pas toujours de suffisamment de gamins pour leur club de foot. C’est visiblement le cas à Saint-Macaire-en-Mauges, ville de 7000 âmes, et Saint-André de la Marche, commune située à touche-touche de la précédente. Résultat : la Fraternelle Saint Macaire (FSM) et l’Étoile des Mauges Football (EDM), deux modestes entités amateurs qui disposent de trois équipes seniors chacune et qui se détestent en raison de leur proximité géographique, galèrent pour composer leurs catégories de jeunes.
Donc les jeunes de FSM et de l’EDM sont regroupés…
Oui, les deux clubs sont rivaux. Oui, chaque confrontation entre ennemis est cochée au calendrier lors des débuts de saison. Oui, les combats sont tendus et excessivement engagés malgré la présence d’amis – qui ne le sont en vérité qu’à l’extérieur de la pelouse – des deux côtés du terrain. Oui, les chants anti-andréatains sont beuglés jusqu’au bout de la nuit lors des soirées organisées à Saint-Macaire. Mais cela n’empêche pas les troisièmes mi-temps communes et tardives, ni la réflexion pour sauver les équipes de jeunes dont les effectifs sont de plus en plus pauvres en quantité. La solution est donc la suivante : le groupement des jeunes, qui est mis en place en 2003 pour les U15, U17 et U19. Ce qui permet de conserver au moins une équipe dans chaque catégorie, puis d’augmenter leur nombre (souvent deux ou trois équipes en U15 et U17). Le sport est affaire de concession.
Donc l’idée d’une fusion totale entre les deux équipes apparaît…
Finalement, pourquoi ne pas fusionner carrément les deux clubs afin de pouvoir mutualiser les moyens et les équipements tout en pouvant compter sur des éducateurs et des coachs diplômés ? Tout simplement parce qu’il existe une haine réciproque. Difficile d’imaginer, par exemple, un rapprochement complet entre l’Espanyol Barcelone et le FC Barcelone. Qu’importe : à partir de 2012, le sujet revient sur la table durant toutes les assemblées. D’abord timidement, avec des consultations et des sondages. Puis plus concrètement, avec des débats et des groupes de travail. Deux camps se retrouvent alors face à face : les conservateurs (souvent les plus âgés) totalement opposés au projet, dont les plus extrêmes suivent la formule « Si on fusionne, j’arrête d’aider » , et les jeunes loups fantasmant un résultat à la Gotrunks ou à la Gogeta et favorables à cette union. Dur, dur de faire disparaître une rivalité de clocher.
Donc le FC Andréa Macairois naît…
Finalement, la logique l’emporte et la fusion est actée au début de la saison 2016-2017. Exit la Fraternelle Saint Macaire et l’Étoile des Mauges Football, place au Football Club Andréa Macairois (ou Saint André Saint Macaire. FC, pour les puristes). Pas de cérémonie d’officialisation pour ne pas mettre en colère les plus réacs, mais l’arrivée d’éducateurs diplômés pour l’école de foot et des tarifs très bas en boutique pour que tout le monde porte les mêmes couleurs et affiche le nouveau logo. Niveau sportif, le FCAM prend la place de la Fraternelle Saint Macaire en District 1. C’est parti pour la nouvelle aventure.
Donc le club est meilleur et enchaîne les bons résultats…
C’est bien connu : ensemble, on est plus fort. « Se réunir est un début, rester ensemble est un progrès, travailler ensemble est la réussite » , complétait même l’industriel Henry Ford. Alors, le FCAM se tient à cette devise. Les jeunes prennent le pouvoir avec ambition, certains anciens restent pour encadrer et faire partager leur expérience et le mélange – cinq équipes seniors – donne satisfaction. Et même plus que ça, puisque l’objectif du maintien visé par l’équipe première se transforme très vite en montée. Cerise sur le gâteau, la Coupe de l’Anjou est ramenée à la maison. « Après la demi-finale, les buvettes ont fini en rupture de stock avec 36 fûts vidés !, rappelle l’un des joueurs. La victoire en finale, on l’a fêtée jusqu’au petit matin au stade de Saint-André avec un feu d’artifices tiré au retour des joueurs. Gagner la Coupe de l’Anjou, c’est un peu le Graal. C’est un exploit majeur : en cinquante ans, seulement trois équipes de District l’ont gagnée ! Cette date restera gravée à jamais dans la nouvelle histoire du club. »
Donc le FCAM recrute un entraîneur de renom ancien champion de France…
« Aujourd’hui, le club s’est stabilisé en Régionale 3. On se chambre toujours un peu de chaque côté, mais on finit tous ensemble pour boire un coup. L’inconvénient, c’est que le groupe senior est très fourni, parfois une cinquantaine de joueurs, et doit être divisé en deux. Du coup, ça décale voire même délocalise les entraînements : un groupe à Saint Macaire, l’autre à Saint-André. On espère maintenant de nouvelles infrastructures, comme un terrain synthétique avec des éclairages. » Les propos remontés de l’intérieur montrent une chose : le FCAM grandit, et fait face à quelques problèmes dus à sa croissance. Une bonne nouvelle, quand on vise l’excellence. Pour continuer à évoluer sportivement, le club recrute Medhi Leroy. Mehdi Leroy, oui. L’ancien milieu de Troyes, Amiens ou encore Nantes, avec qui il a remporté le championnat de France en 2001 (sans oublier deux Coupes de France, en 1999 et 2000).
Donc Mehdi Leroy amène le FCAM tout en haut de la Ligue 1.
Directeur sportif, entraîneur de la première, de l’école de foot, des féminines… Un spécialiste du club l’assure : Mehdi Leroy a été attiré pour « être la personne centrale du projet du club, suivre des ambitions grandissantes et apporter un projet de jeu basé sur ce qu’il a pu apprendre au sein du centre de formation du FC Nantes » . En réalité, l’ex-Canari connaît parfaitement le secret pour gravir les marches menant au sommet du foot français. Ce qu’il fait avec le FCAM en 2028, lancé par d’innombrables montées successives. Avec des rites jamais oubliés, qui font la force de ce club amateur désormais devenu professionnel : le système de Petoune (à tour de rôle, un joueur lave les maillots et prépare cinq litres d’apéro accompagnés de saucisson chaque week-end), et les amendes sanctionnant les caleçons moches pour payer la bouffe de fin de saison. Elle est là, la clé du succès.
Par Florian Cadu