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Pourquoi Landivy-Pontmain est un digne représentant du football vrai
Si les centres au troisième poteau et la gueule de bois évacuée sur le terrain le dimanche sont des principes qui réunissent à peu près tous les clubs amateurs, le sympathique FC Landivy-Pontmain (Mayenne) possède également des caractéristiques bien à lui, entre rituels barrés et cadre géographique parfait. De quoi avoir une place de choix dans la grande famille du foot « d’en bas », célébré le 13 octobre prochain lors du Vrai Foot Day.
Le district à la vie, à la mort
Alors qu’il y a dix ans, après la fusion de l’Étoile sportive de Pontmain et de l’US Landivy, le club comptait trois équipes dont une en promotion d’honneur, on n’en compte aujourd’hui plus que deux chez les seniors du FCLP, toutes bien installées dans les divisons de district (D2 et D4). Et à cause d’une cruelle question de règlement, l’équipe fanion boit la tasse alors que la réserve fracasse tout à son niveau. C’est Romain Buffet, arrière droit de la réserve, homme multi-casquette (trésorier officieux, community manager, etc.) et pilier du club, qui l’explique. « Le niveau s’est un peu élevé et il y a eu énormément de descentes, c’est un peu le bordel, ça change tout le temps. C’est aussi parce que la Ligue empêche les recrutements quand tu n’as pas d’arbitre : du coup on galère à choper un arbitre officiel qui nous permettrait de recruter, donc c’est difficile de monter. On a du mal à redorer notre blason. Dans notre équipe B, on a des gars qui ont joué en PH, DH voire DSR, mais ils sont obligés de jouer une saison avec l’équipe B pour pouvoir jouer avec la A ensuite. On a mis 7-0 au leader de D4, Ernée, chez eux. On a une équipe de niveau D2, D3. On a dépassé les 100 buts début mai, un de nos joueurs doit être à plus de 40 passes décisives, et il visait les 60 buts. » C’est aussi ça, le football plaisir.
Porte ou civière, pourquoi choisir ?
C’est un instant de football vrai qui a fait date au sein du club. Il y a un peu plus de quatre ans, en mars 2015 face à Martigné-sur-Mayenne, alors qu’un joueur des visiteurs est mal en point, la solidarité se met en place et la technique de la porte, stratagème répandu sur les terrains amateurs, sauve la mise du malheureux. « Il y a un joueur adverse qui se blesse, et du coup depuis la buvette on dit « dégondez la porte du vestiaire et ça fera une civière » » , témoigne Romain qui en a profité pour filmer quelques secondes du moment. « Ça a fonctionné, ils l’ont porté jusqu’au bord du terrain et c’était assez marrant. »
Günther, l’hymne de vestiaire ultime
Dans l’équipe réserve de Landivy-Pontmain, ce n’est pas avec du Naza ou du Vegedream que l’on fait vibrer l’enceinte Bluetooth. Lors des après-midi à trois points, dans le vestiaire, on s’offre l’unique Ding Dong Song (Günther & The Sunshine Girls), gros délire eurodance qui ramène à une certaine idée des années 2000 et n’a pas pris une ride (ou alors une toute petite). Effectivement, cet OVNI de 2004 a tout pour ambiancer les murs du stade municipal de Pontmain, et le fait bien. Vous avez dit beauf ?
Passion gel douche
Si un bon classement en championnat en fin d’année fait toujours plaisir, le vrai frisson de la saison est tout autre à Landivy-Pontmain. Là, il est plutôt question de traitement des cheveux, si possible mauvais. « Un jour, une recrue a ramené un shampooing aux œufs, on ne savait pas où est-ce qu’il avait chopé ça, mais ça puait et ça grattait, balance Romain dans un mélange de nostalgie et de dégoût. On a décidé de lancer un truc : celui qui ramène le shampooing le moins cher, on lui paie tous un coup. Finalement on a gardé le truc et tous les ans lors de l’assemblée générale, quelqu’un est récompensé pour sa trouvaille. Il faut aller dans les supermarchés discount et regarder tout en bas du rayon. C’est le fil rouge de la saison sous les douches. En revanche, ce n’est vraiment pas agréable de se doucher avec ça, mais on s’en fout. » Et les règles sont très claires : « En cas d’égalité, c’est celui qui gratte le plus qui l’emporte. »
Des derbys contre les copains en veux-tu en voilà
Si deux communes sont regroupées au FCLP, les rencontres entre voisins sont quand même légion : en D4 (la dernière dans le district de Mayenne), c’est quatre clubs en moins de 10 kilomètres, tous plantés dans le canton de Landivy, qui se croisent tout au long de la saison. Et les voisins ont des noms tous plus fleuris les uns que les autres : Larchamp, La Dorée, Fougerolles-du-Plessis et Desertines. Avant d’être des rivaux, tout le monde est avant tout copain, comme le confie Romain : « On se connaît tous, on va aux soirées du foot des uns et des autres. L’été, on se fait des festivals entre nous, on fait un campement où on se réunit entre clubs. Ce n’est plus la guerre de clochers : nos parents jouaient aussi les uns contre les autres, mais eux se battaient ! » Et cette année, les gars de Landivy-Pontmain n’ont laissé aucune chance à leurs potes : « En ce moment c’est drôle, Fougerolles vient de monter en R3 et prend un peu la suprématie du canton, mais nous on met des branlées à tout le monde avec notre équipe B. On en a mis plus de cinq à chaque match, dont un 9-0 et un 11-0 contre Desertines ! » Facile quand on s’amuse à inverser ses équipes, aussi.
Une histoire communale légendaire
Landivy et Pontmain, deux patelins frontaliers coincés entre la Manche et l’Ille-et-Vilaine, sont tous les deux des symboles historiques dans le coin. Landivy par son statut de première commune mayennaise libérée par les troupes américaines le 3 août 1944, comme l’indique fièrement la mairie : « C’est la commune entre la Bretagne et la Normandie, donc c’est la première commune sur laquelle les Américains sont tombés quand ils sont arrivés en Mayenne » , explique Romain. Et Pontmain parce que la Vierge Marie y serait apparue le 17 janvier 1871 sur le toit d’une grange, selon les témoignages de plusieurs enfants. « Il y a tout le temps des pèlerinages à Pontmain, c’est blindé le dimanche, il y a même eu des JMJ en 2008. Même si c’est tout petit, c’est indiqué dès Laval, c’est le centre croyant du coin. » Le week-end, il y a donc foule, mais plus pour se masser à la basilique Notre-Dame-de-l’Espérance de Pontmain que pour assister aux exploits des Rouge et Blanc. « Il y a 800-900 habitants à Pontmain, mais la population double le dimanche quand il y a la messe, et tu as un magasin avec tous les produits dérivés. » Bizarrement, la Sainte Vierge ne figure pas sur le blason du FCLP, et aucune référence à la Libération ne s’inscrit sur le maillot local. Le club écrit sa propre légende, mais sur des bases déjà très solides.
Par Jérémie Baron
Propos de RB recueillis par JB