Alors, quel est le rapport du grand frère au football ?
Quand j’étais à l’AS Creil, gardien de but. Mais pas trop longtemps. Et franchement, entre nous, quand je vois ce que je suis devenu dans le sport, si j’avais continué le foot, je serais devenu quelqu’un. Vraiment. J’étais autodidacte. On m’a imposé ce poste de gardien, alors que je me voyais plus sur le terrain. Mais les autres avaient tous des postes. Et du coup, ça a été « oh Pascal, tu vas au but ! » Je subissais un peu le truc du coup. Je pense que j’aurais cartonné sinon, vraiment.
A quel poste ?
Peut-être arrière, comme mon fils. Les arrières, c’est super important. Tout le monde veut jouer 10 ou devant, donc je ne prétends pas à ce rôle-là. Je suis toujours dans la défense en fait.
Êtes-vous supporter d’un club en particulier ?
Du Barça, uniquement mais je suis supporter de l’équipe de France aussi ! Dès qu’il y a un match, je regarde. J’aime bien la Coupe du monde aussi, pour regarder toutes les équipes, une belle ambiance. Quand je vois les joueurs chanter la Marseillaise, ça m’enchante ! Faut être fier de notre drapeau.
Pourquoi le Barça ?
Y a des valeurs, mais surtout, vous avez vu les joueurs ?! Les… RSI. Non, la MSN, c’est ça (rires). Ça fait le show ces trois joueurs. Messi, que j’ai déjà vu jouer, ne se plaint jamais. Et pourtant, il prend ! Le foot, c’est physique en fait, je pensais qu’on faisait des passes et pas de contacts. Mais en fait, y avait des coups d’épaule, on s’attrape le maillot. C’est du mini-rugby.
Existe-t-il des choses qui vous énervent dans le football ?
Ce qui m’a déplu, c’est ce langage sur le terrain, les insultes en permanence. Surtout quand on est un joueur connu. On gagne beaucoup d’argent et je me dis qu’on doit avoir une tenue. Quand je vois Zlatan qui se permet d’insulter la France ! Il va où lui ? Faut qu’il arrête !
Et ce serait quoi ta méthode pour le calmer ?
Je serais très nerveux avec lui, comme lui est sur le terrain. Mais il viendra sur le tatami (on lui rappelle que Zlatan se débrouille en taekwondo, ndlr). Très bien ! Il a les jambes, mais pas les poings. Moi, je fais les jambes, les poings, les projections. J’ai deux trucs en plus sur lui. Je suis étonné, s’il vient des arts martiaux, qu’il n’ait pas le respect. Qu’est-ce qu’on lui a inculqué ? Je m’adresse encore plus loin, à son prof… Je ne suis pas là pour faire la guerre à qui que ce soit, mais je trouve que c’est immature. C’est un adulte, accompli, hyper fort, hyper doué, mais il se gâche. Et ça donne la possibilité aux jeunes de faire la même chose sur le terrain.
Anelka est allé trop loin avec Domenech mais en réalité, c’est la faute de la taupe. Les journalistes, ça les a arrangés.
Y a des problèmes d’ego à la Zlatan chez les enfants que vous aidez ?
C’est plus une question de pouvoir. Ils le veulent chez eux. Mais quand ils essaient de le prendre à l’extérieur, c’est pas pareil. Dehors, c’est la jungle. Y a plusieurs Tarzan ! Alors qu’à la maison, ce sont les seuls Tarzan. C’est facile quand vous êtes face à des parents démunis, parfois un peu âgés, ne sachant pas trop quoi faire, et puis avec les lois qui sont permissives… D’enfants rois, on en fait des enfants empereurs, et aujourd’hui, des enfants dictateurs. Je vais loin dans les pensées, mais c’est un constat. Ça fait 20 ans que je fais ce boulot, 10 que je suis à la télé. Ceux de maintenant sont plus violents, verbalement, mais en plus ils sont armés : armes de poing, couteaux, pistolets, barres de fer. Les reportages en rajoutent beaucoup, en plus de stigmatiser, mais la violence existe. Dans le métro, tu te fais bousculer, il n’y a plus de pardon. Je pense qu’il faut le remettre au goût du jour. Et dès la maternelle. Je me souviens qu’on se levait quand le professeur entrait. Là, on frappe les profs, on les insulte. On casse le boulot de ces passionnés.
En 2010, un groupe Facebook militait pour l’intervention de Pascal le Grand Frère auprès de l’équipe de France. Et vous aviez répondu favorablement…
(Rires) Je suis préparateur physique, donc j’ai dit chiche. Ça m’aurait fait plaisir qu’on m’appelle pour m’occuper des mecs. Malheureusement, ce n’est plus d’actualité, car M. Domenech n’est plus en poste (rires). Mais s’ils ont besoin de moi, ce serait avec plaisir. J’aurais pris ce rôle-là vraiment à cœur, très sérieusement. Mais j’aurais été chiant ! Car là, ce sont des adultes, des mecs qui brassent des millions et qui peuvent très bien me dire : « C’est bon, d’où tu viens, toi ? » Mais même sans être issu du foot, on peut éduquer sportivement les footballeurs. Et si on les éduque sportivement, on les éduque tout court. Dans le sport, y a des règles. Il faut respecter les autres, l’arbitre. Sinon, prends le sifflet, et quand tu vois que 22 joueurs t’insultent, tu vas changer la façon de lui parler.
Vous auriez instauré quoi, Pascal, avec ces Bleus ?
Qu’ils chantent la Marseillaise, déjà ! Avant de faire de la prépa physique, je leur donne un texte à chacun et je leur dit : « Vous l’apprenez par cœur, c’est la base. N’oublie pas d’où tu viens. Parce que ce n’est pas grâce à ta mentalité que tu montres sur le terrain… » Ce sont des écorchés vifs, ok, mais qu’ils chantent la Marseillaise. Que tu sois black, blanc, beur, chinois, tu joues pour la France, donc chante. Bon, je sais qu’à l’époque de Platini, ils ne chantaient pas mais il l’explique lui-même aujourd’hui : « À l’époque, on chantait pas, ça choquait personne. » J’ai eu la chance de monter sur des podiums, de gagner des médailles d’or. J’étais fier de représenter la France, avec le drapeau.
Et pour la grève du bus, y aurait-il une méthode ?
Franchement, j’aurais appelé les remplaçants. Ou même les gars restés en France : « Vous voulez pas jouer les gars ? OK, je vous remplace. Tu veux jouer ton malin, dégage. T’as plus rien à faire dans l’équipe. » Alors je vais me faire des ennemis, mais il faut taper du poing sur la table, c’est pas à eux de décider. T’es payé pour jouer au ballon, pas pour faire grève comme la SNCF ou la Poste (rires) ? Et en plus, à la Coupe du monde, ils nous ont fait honte. Pour Anelka, déjà, ça ne se serait pas passé en public. On se serait mis dans une pièce, à s’écouter, avec un médiateur au centre. Si Anelka avait sorti ce genre de choses, c’est qu’il avait une dent contre son coach. Moi, je me suis fâché avec mon entraîneur aussi à une époque, et je trouvais ça ingrat. Anelka est allé trop loin mais en réalité, c’est la faute de la taupe. Les journalistes, ça les a arrangés.
Pourquoi ne jamais avoir résolu des conflits par le football dans l’émission ?
J’ai fait intervenir Olmeta dans une de mes émissions ! On était à Marseille, j’étais face à un gamin qui aurait pu devenir un grand footballeur. Sauf qu’il s’est gâché parce qu’il a commencé à fumer, avoir de mauvaises fréquentations. Il avait énormément de qualités et était fan de l’OM. Quand Pascal est venu, ça lui a fait un choc. De toute façon, vous allez voir, on a rajouté des choses nouvelles dans l’émission, vous allez être très surpris… Mais je vais être honnête, ce qui manque, c’est le matériel. C’est compliqué de transporter le matériel donc on se débrouille avec les moyens du bord. C’est plus simple d’emmener des gants et des pao. Moi, je voulais amener plein de choses. Mais ça va arriver, j’ai un nouveau fournisseur pour le matos.
Le football est-il aussi efficace que les sports de combat ?
Bien sûr. Sur un penalty, ce qu’on veut, c’est que la balle rentre. Donc je mettrais le gamin dans le but, des vrais joueurs en face, et je lui dirais : « Essaie d’arrêter la balle, et si t’arrêtes pas la balle, tu vas te la prendre. » Tu ne mets pas le coup, mais le ballon oui. J’y ai pensé déjà ! Sinon, il fait le mur tout seul : « Écarte les bras, écarte les jambes, ne te protège pas, t’inquiète ça va bien se passer (rires). »
C’est facile de critiquer quand on est en bord de touche et qu’on a un bide énorme.
Un footballeur mériterait que vous le corrigiez ?
Mmmm… Ribéry ! Je trouve ça dommage, quand je vois d’où il vient. Je vois qu’il n’y a pas de remerciement par rapport à son pays. Donc une petite semaine avec Ribéry, oui.
Et le programme ?
Déjà, des cours de français (rires) ! C’est dommage qu’on ne retienne que ça de lui. J’aimerais bien le connaître, car au fond, je suis sûr que c’est quelqu’un d’écorché, qu’il a un bon fond. Mais on ne veut pas montrer ça de lui. J’aimerais bien le voir sur des skis ! Si ça se trouve, il skie bien, hein ! Mais je n’irai pas dans son domaine, car il va m’éclater, il n’ira pas dans le mien, car il va se faire éclater. Soit le ski, soit un truc extrême genre saut à l’élastique, parachute.
Vous êtes spécialisé dans les résolutions de conflit. Comment on règle le cas Valbuena et les sifflets qui l’accompagnent ?
Chaque joueur a le droit de changer. Il a beaucoup donné à Marseille, quand même fait des beaux matchs. Je trouve qu’il n’y a pas de reconnaissance. Peut-être que les Marseillais regrettent d’avoir perdu un bon joueur et de le voir jouer maintenant pour une autre équipe. Mais ce n’est pas une raison pour le lyncher. Ça reste du sport. Après, ce qui est dommage, c’est qu’il ne s’agit que d’un groupe de supporters, qui fait parler du foot, mais du mauvais côté. Y a quand même des familles, des gamins qui viennent, c’est dommage… Là, ça s’arrange un peu, y a des caméras, les ultras sont moins dans les stades, et c’est bien pour le foot. Pour régler le conflit, j’aurais dit à Valbuena : « Viens et fais une conférence » . Via les réseaux sociaux, il se met dans une pièce, avec une caméra, les gens se branchent dessus et il peut être regardé par des milliers de personnes. Qu’il essaye de faire comprendre qu’il veut évoluer vers d’autres horizons.
Il vous est déjà arrivé d’intervenir dans un stade ?
Je vais voir très régulièrement mon fils au stade. Un jour, je l’accompagne alors qu’il faisait le ramasseur. Sur le terrain, j’entends le nom de l’équipe puis « on t’encule » . Là, je regarde mon fils, et je lui dis « c’est pas terrible quand même » . Quand je vais voir mon fils, les gens crient, s’énervent… Pour la petite histoire, je suis intervenu auprès de parents qui commençaient à insulter les joueurs de l’équipe de mon fils. Et là, 6 mecs dans les tribunes commencent à s’acharner sur un joueur qui, en plus, est black. Donc vannes racistes etc… Vous avez compris le truc. Je vais le voir, je lui dis que ça suffit. Et le mec me fait : « Attendez, vous allez pas faire le Grand Frère ici. » Et je lui réponds : « Écoutez, on va se tutoyer maintenant, ça va être plus simple ! Je viens voir mon fils, t’es adulte, montres l’exemple. Tu gâches l’image du foot. » Et là je poursuis : « Monsieur, mettez un short, parce qu’avec votre gros bide là, on va aller sur le terrain. » C’est facile de critiquer quand on est en bord de touche et qu’on a un bide énorme. « C’est la bière qui vous intéresse ? Mettez un short, des crampons, et essayez de tenir 90 minutes. Je vous défie, je joue avec vous. » Parfois, on voit même les jeunes se battre à la fin d’un match, alors qu’ils viennent de courir 90 minutes. Si t’as encore la force, c’est que t’as pas bien fait ton job, mon pote ! (rires)
Autre exemple de conflit, celui opposant Anelka et Gérard Houllier actuellement. Comment gérer la situation ?
C’est de la pure provoc. Si Anelka avait besoin de négocier ses contrats, négocie frérot, t’as raison. S’il peut gagner plus. De toute façon, on est tous là pour gagner plus. L’employé lambda qui gagne 2000, il serait ravi de gagner 2200. Après, les propos tenus me gênent. Pourquoi parler des origines ? Pourquoi ne pas parler de l’homme en disant : « De toute façon t’es un négociateur, t’es un chien, tu veux toujours plus de fric. » Là ok ! Y a une vraie discussion qui peut s’engager. Mais le fait de dire « ouais, vous les blacks… » .
Comment y mettre un terme ?
Avec une bonne poignée de main. Vous vous êtes chiffonnés, y a eu la guerre, mais y a toujours la paix au bout. Ou alors, c’était par intérêt, pour faire parler de soi.
Pour terminer, la mission ultime : réconcilier supporters de l’OM et du PSG.
Oulah, c’est trop lourd ça ! (rires) En plus, Paris est bien classé maintenant par rapport à l’OM. Marseille, réveillez-vous les gars, oh ! Moi, je ferais bien des trucs. J’ai une idée directe. On échange les maillots les gars (rires). C’est important, le maillot ! On arrive sur le terrain, un match important, et on échange. Si les joueurs sont capables de faire ça, ça peut apaiser. Ça ne se fera pas, mais ce serait un truc de fou. On ferait du buzz ! Et en plus, ce serait bien que sur chaque but marqué, la prime soit reversée à des associations, qu’on échange le maillot pour une cause. Voilà, ça commence à mûrir là (rires). Voilà les mecs, vous êtes là, vous pouvez jouer, courir, les supporters sont là, vous avez de l’argent. Pensez un peu aux autres. Ou sinon, que tout le monde joue en maillot blanc. Qui joue avec qui ? Là, on peut se mélanger. C’est même mieux le maillot neutre ! Et on fait ça aux supporters aussi. Que les deux tribunes qui se font face soient en blanc.
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