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- Liverpool-Wolverhampton (3-1)
On était à Liverpool pour le dénouement de la Premier League
Malgré un total de 92 points, scellé à l'issue d'une ultime victoire sur Wolverhampton, en remontant le score comme face à Aston Villa et Southampton, Liverpool a vu le titre de champion d'Angleterre lui échapper dimanche. Récit d'une journée de tension, d'excitation et de frisson, la dernière avant le mois d'août à la maison.
Aston Villa restait sur 11 défaites consécutives en Premier League à l’Etihad Stadium. Mais du côté d’Anfield, on voulait y croire. Par passion peut-être plus que par raison, mais aussi par fidélité à la formule de Jürgen Klopp, qui s’affiche aujourd’hui sur des écharpes : les doubters ont laissé place aux believers. Encore plus quand les Villans de Steven Gerrard menaient par deux buts sur la pelouse du leader. Un rayon de lumière dans le ciel bien couvert du Merseyside, néanmoins de courte durée, İlkay Gündoğan et Rodri ramenant rapidement les Reds à l’impitoyable verdict du classement, où les Skyblues les devancent finalement d’un point.
Les fumis, Ian Rush et le marchand de glace
La foule s’était fidèlement massée de part et d’autre d’Anfield Road, en attendant le bus rouge. Le poids-lourd a été précédé par Fabinho et sa Bentley, ou par Divock Origi et sa Rolls Royce, autorisés à pénétrer dans les entrailles du stade après le passage réglementaire du chien renifleur. Les deux véhicules ont évidemment été accueillis par des applaudissements. Le camion du marchand de glace Mr. Whippy y a aussi eu droit, au milieu de quelques éclats de rire, avant de s’échapper par Alroy Road. Une grosse demi-heure durant, les stewards ont dû composer avec l’impatience des supporters en herbe et les « Vous savez quand ils arrivent ? » à répétition. La police montée a offert une petite distraction en fendant la foule, et le souvenir laissé par les chevaux au milieu de la route a fait s’esquisser, là encore, quelques sourires.
Puis les plots se sont abaissés, et les fumigènes ont été libérés. Le fameux bus rouge est arrivé, transperçant l’épaisse fumée sous les vivats, qui ont redoublé d’intensité au moment du signe de la main du boss Jürgen Klopp. Tout ça sous le regard bienveillant de la légende Ian Rush, immortalisée sur un mur au croisement d’Alroy Road. À 200 mètres de là, la cour du Sandon s’est vite remplie de supporters, et le sol de gobelets en plastique. Au moment du You’ll Never Walk Alone, le pub mythique, où John Houlding avait organisé la réunion qui a abouti à la création du LFC en 1892, avait presque des allures de kop entre les drapeaux, les écharpes et les fumigènes – pas vraiment appréciés par la sécurité. Tout était prêt.
FIRE #LIVWOL #LFC pic.twitter.com/kgdB3jEn1c
— Quentin Ballue (@QuentinBallue) May 22, 2022
Oser penser à l’impensable
Solidarité familiale oblige, le petit Grayson, maillot home floqué du numéro 28 et de son prénom, a dû filer un coup de main en remplissant le frigo en Budweiser et en Estrella derrière le comptoir, pris d’assaut. Logique en voyant la quantité de bières qui a joyeusement fini par terre après l’ouverture du score de Villa. Des éclats de rire, il y en a eu aussi lorsque l’écran a notifié l’ouverture du score de Crystal Palace contre United. L’occasion pour les Reds de scander « Manchester is full of shit », dont on vous épargnera la traduction. Plusieurs rumeurs d’une égalisation de Villa à 3-3 à l’Etihad ont fait passer un frisson. Une fausse joie, mais au bout, une grosse fierté, quand même.
« L’ambiance était incroyable, comme une demi-finale de Ligue des champions, glissait Craig en sortant du stade. C’était très intense, il y avait beaucoup d’excitation. Des amis me tenaient au courant du match de City par message et quand Villa a marqué, j’ai célébré comme si on avait inscrit le but de la victoire. J’étais en mode : « Ça pourrait se produire ? Vraiment ? » Après, que l’on gagne le championnat ou pas, c’est une saison mémorable. On a déjà gagné deux trophées, je croise les doigts pour un troisième, et on a poussé Manchester City dans ses limites, jusqu’à la dernière journée. »
Pour Darren, venu avec un badge à l’effigie de Gérard Houllier, dominaient « la mélancolie et la fierté », comme il le racontait près de la Main Stand : « On a raté des opportunités plus tôt, le match de Brentford au mois d’août me reste un peu en travers de la gorge. Le championnat est extrêmement important pour moi parce que les gens de Liverpool sont regardés de haut par le reste du pays, on a une histoire de rébellion. Si j’avais eu le choix, j’aurais préféré gagner aujourd’hui et perdre à Paris. Que Liverpool soit champion d’Angleterre, ça aurait emmerdé tellement de monde à Manchester, à Londres ou ailleurs… » Reste néanmoins la possibilité d’ajouter une Ligue des champions aux deux coupes nationales déjà en poche, pour donner encore plus d’ampleur à la parade prévue dimanche. Comme le résumait Jürgen Klopp en d’adressant aux fans : « Du fond du cœur, je veux remercier tous ceux qui ont été du voyage avec nous cette saison. Vous avez été des compagnons de route fantastiques. Et nous ne sommes pas encore arrivés. »
Par Quentin Ballue, à Liverpool