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On a suivi les supporters français présents à Doha avant le match contre l’Angleterre

Par Mathieu Rollinger, à Doha
6 minutes
On a suivi les supporters français présents à Doha avant le match contre l’Angleterre

Pendant que l'équipe de France faisait le job sur le terrain face aux Anglais, 4000 supporters français tentaient de se faire entendre dans le stade Al-Bayt et, avant ça, dans les rues de Doha. Une tâche peu aisée pour un groupe qui se cherche encore.

Max tire sa valise et un drapeau tricolore accroché autour de son cou. Là, tout de suite, il se trouve au milieu d’un cortège d’une bonne centaine de supporters français tout juste parti du Souq Waqif en direction du stade Al-Bayt. Dans trois heures, après un voyage en métro et en bus, il sera dans les tribunes à donner de la voix pour l’équipe de France. Dans neuf heures, il sera dans un avion pour Dubaï, quelle que soit l’issue du match. « Je suis expatrié aux Émirats arabes unis, donc je peux me permettre le luxe de faire les allers-retours. J’aurais pu faire un peu de télétravail, mais la liaison aérienne est vraiment facile à faire. Je reviendrai certainement pour la demie et la finale s’il y a. » Alors pour le moment, Max chante avec les autres, qui profitent de l’écho des murs en marbre du quartier tout pimpant de Mshreib pour lancer des « Allez, les Bleus, tes supporters sont là » (paroles qui comportent une sacrée faute de français, soit dit en passant, NDLR). Ce soir, il fait presque froid à Doha, le vent faisant douter des 20 degrés affichés par le thermomètre, et réchauffer les rues dohannaises comme peuvent le faire les Argentins, les Brésiliens ou les Marocains n’est pas chose aisée.

La procession est menée par les membres des Baroudeurs du sport, association de supporters qui guide la petite délégation française présente à Doha aux côtés des Irrésistibles Français qui ont choisi de se déplacer, en dépit du boycott de certains de leurs membres. Olivier fait l’état des troupes. « Bon déjà, en plus, on est plusieurs à être malades, j’espère qu’on ne ramènera pas un nouveau variant en France, dit-il entre deux quintes de toux. Tout le monde s’est éparpillé cette semaine après les huitièmes, donc il a fallu mobiliser ceux qui étaient encore dans le coin, et ce n’est pas facile. » Samedi soir, 4000 Français étaient tout de même attendus dans les travées du stade le plus septentrional de la compétition. Maxime Guillemet, responsable supporters de la FFF, assure que ce creux est une constante sur les quarts et demi-finales : « De manière générale, les gens bookent leur séjour pour les matchs de poule et un huitième et peuvent mettre une option sur la finale si les Bleus y sont. La difficulté, c’est qu’on est hors vacances scolaires et que les prix ne sont pas les mêmes que, par exemple, en Russie. Faire le mois complet, c’est un petit budget. » Stéphane, lui, a déboursé 10 000 euros pour partir avec sa femme et ses deux filles pendant un peu plus de deux semaines. « Ce sont nos vacances de l’année, claironne le quinqua originaire de Mâcon, chapeau à clochettes sur la tête. L’organisation est top, et malgré les restrictions, on arrive à profiter à fond. » Les restrictions que certains ne sont pas privés de dribbler, s’envoyant dans l’après-midi une cinquantaine de pintes pour dans un pub irlandais niché sur les hauteurs d’un immeuble, avant de rejoindre le reste du peloton.

J’ai laissé de côté les questions autour du boycott, parce qu’on aurait dû se les poser il y a dix ans. En revanche, j’évite de dire autour de moi que je suis venu au Qatar, parce qu’il y a des gens qui auraient pu me soûler sans rien y connaître.

Seuls avec du monde autour

Le train bleu s’étire et s’engouffre dans la station de métro. Devant avec ses lunettes de soleil, il y a Toto et ses faux airs de Francis Lalanne qui répond aux questions d’un média qatari. Derrière, il y a Meinuki, une Japonaise vivant aux États-Unis qui s’est emmourachée de Kylian Mbappé et donc par extension de ces Bleus qu’elle a dessinés sur un drap façon manga. Au milieu, il y a Zacharie, Ruben et Yohan, trois amis qui ont laissé leurs révisions de partiels ou leurs premières semaines de stages à Paris pour vivre cinq jours de kif et deux quarts de finale, facturés au total 2000 euros par tête.« Pour nous, c’est une première et on s’est tout de suite mis dans l’ambiance, s’enthousiasme le dernier. On dort sur un des bateaux de croisière dans la baie de Doha et on est au milieu de supporters venus de partout. On est loin du discours ambiant qu’on a entendu chez nous sur le boycott. Moi, j’ai préféré laisser de côté ces questions, parce qu’on aurait dû se les poser il y a dix ans, et venir. En revanche, j’évite de le dire autour de moi, parce qu’il y a des gens dans ma promo notamment, qui auraient pu me soûler sans rien y connaître. » Rares sont ceux qui trouvent quelque chose à redire sur le Qatar, si ce n’est la clim qu’on fait tourner en continu. Non, ici, « les stades sont magnifiques », « les musées sont incroyables », « il n’y a pas de clochards dans les rues », et puis « tiens, t’as vu cette petite pépé, là ? Elle n’est pas qatarie, celle-ci »

Encore deux arrêts de métro. Moment choisi pour élargir le répertoire. Un Petit Papa Noël version Mbappé, du Dassin, du Piaf, tout y passe. On se tâte à lancer le fameux « On a une étoile, on a deux étoiles, on veut la troisième étoile », qui a ramassé son lot de moqueries et jugé « pas assez entraînant ». « Faut l’entendre au stade, ça rend vachement mieux. On a essayé quelque chose, ça n’a pas pris, tant pis », analyse Clément, un brin amer. Il faut alors que Joris, 13 ans, se hisse au-dessus de la mêlée à l’aide des barres du métro et qu’il lance un « Aux Armes » pour que le chœur bleu retrouve de la consistance.

Le petit blondinet est devenu la mascotte du kop français et ne se fait pas prier pour lancer les chants. En avril, c’est lui qui avait accompagné Didier Deschamps au moment du tirage au sort, les organisateurs ayant remarqué sa bouille dans les tribunes de Moscou au moment du sacre des Bleus. Depuis ses 18 mois, son père l’embarque avec lui suivre les coupes du monde. « Ce sont des expériences uniques, l’occasion de découvrir un pays, une culture, des gens venus du monde entier. Celle-ci est un peu particulière parce qu’elle est en hiver et est concentrée sur une ville, mais elle est belle, explique Pascal, le père, qui travaille dans l’informatique à Paris. Au boulot, ils savent que tous les quatre ans, ils ne me voient pas pendant un mois. Ici, j’ai déjà pu voir près de 20 matchs. Tant qu’on me donne des gâteaux, moi, je les mange. » Al-Bayt se dresse maintenant face à eux. Ils essayeront de se faire entendre dans un stade magnifique, mais avec une ambiance de cathédrale à l’intérieur. Le match crispant et les Anglais douchés n’ont pas aidé à faire décoller l’ambiance, mais l’essentiel est ailleurs : la France est en demi-finales, et Joris n’a toujours pas vécu de défaite de l’équipe de France depuis les tribunes. Pendant que certains hésitent entre retourner au Souq Wakif ou au bar Alwadi pour célébrer la victoire, que d’autres se mettent déjà en quête de billets pour mercredi qui se négocient à plus de 1000 euros, le collégien et son père mettent le cap vers l’aéroport. « Il y a école lundi, souffle-t-il. J’ai déjà raté une semaine, mais si tout va bien, je reviendrai pour la finale. » Et peut-être avec un chant bien rodé.

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Par Mathieu Rollinger, à Doha

Tous propos recueillis par MR.

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