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Nouvelle époque, nouveau Rabiot
De retour en équipe de France depuis septembre, Adrien Rabiot postule une place de titulaire dans le onze de Didier Deschamps pour l'Euro. Pas toujours brillant avec une triste Juventus cette saison, l'ancien Parisien dispose surtout d'une polyvalence intéressante pour le sélectionneur, qui a pu constater une transformation mentale importante chez le milieu de terrain. Mais est-ce que cela sera suffisant ?
Une température estivale, un grand ciel bleu, et un coucher de soleil programmé à 21h52 : les conditions de jeu seront idéales, mardi soir, à Saint-Denis, où la France doit retrouver la Bulgarie devant 5000 spectateurs pour sa dernière répétition avant l’Euro. « Un temps pour jouer au foot », comme on dit, et surtout une bonne nouvelle pour Adrien Rabiot. Loin des 23 degrés annoncés au coup d’envoi de cet ultime match de préparation, il y a le souvenir d’une purge glaciale le 7 octobre 2017, à Sofia, où les Bleus s’étaient imposés sans briller (0-1) grâce à un but signé Blaise Matuidi sur la route de la Coupe du monde 2018. Ce soir-là, le Duc Rabiot avait remplacé N’Golo Kanté, blessé, à la 34e minute, avant de livrer une prestation insipide, errant sur la pelouse et dans le froid de Sofia. Une rencontre vouée à tomber dans l’oubli pour lui jusqu’à ce que le milieu de terrain ne se décide (maladroitement ou volontairement ?) à se tirer une nouvelle balle dans le pied en zone mixte, prétextant le « froid » et la « peur de se blesser » pour justifier sa triste partie. « Pour moi, c’est du passé tout ça, a balayé Rabiot face à la presse ce samedi. En quatre ans, il s’est passé beaucoup de choses, dont certaines plus importantes que ce match en Bulgarie. J’ai changé en tant que joueur, mais aussi en tant qu’homme. Aujourd’hui, c’est un autre Rabiot. »
Intermittence et pied gauche
Sur le terrain, l’évolution n’est pourtant pas frappante. À la Juventus comme au PSG à l’époque, Rabiot fait du Rabiot : le milieu de terrain dispose d’une certaine aisance technique, mais reste peut-être la parfaite illustration du joueur neutre, et donc frustrant. Chez une Vieille Dame à la dérive cette saison, l’ancien Parisien n’a ni surnagé ni plongé, il a joué au rythme de son équipe, brillant de temps en temps, puis disparaissant à certains moments. Reste que c’est au bout de la pire saison de la Juve depuis dix ans (une 4e place en championnat, une piteuse élimination en huitièmes de finale de Ligue des champions contre le FC Porto, et une victoire en Coupe d’Italie en guise de consolation) que Rabiot a gagné le droit de connaître la joie d’être appelé pour sa première compétition internationale.
Une récompense qu’il « attendait depuis un moment » et dont il espère « profiter un maximum » après une saison bien remplie en Italie (47 matchs, 5 buts, 3 passes décisives). « Le fait de partir de chez soi, là où on a grandi, ça a un impact plutôt positif. On s’ouvre à d’autres choses, on voit d’autres personnes, on apprend une autre langue, a analysé le principal intéressé ce week-end. Puis il y a la discipline, la rigueur italienne qu’on connaît, des entraînements assez durs, beaucoup de travail tactique. Ça m’a énormément apporté sur ces deux années. » Mais le plus bel atout du milieu aux cheveux bouclés ne serait-il pas d’être gaucher ? Didier Deschamps n’a jamais caché sa volonté d’établir un équilibre entre les gauchers et les droitiers dans ses listes. Alors que les seconds sont majoritaires dans l’entrejeu pour l’Euro à venir (Tolisso, Sissoko, Kanté et l’ambidextre Pogba), la présence de Rabiot comme pur gaucher aux côtés de Lemar, plutôt destiné à être utilisé sur un côté, devient une évidence pour l’équipe de France.
Le Rabiot nouveau est arrivé
Le sélectionneur avait préparé le terrain en rappelant le bonhomme en septembre dernier, plus de deux ans après l’épisode de la lettre et du refus d’être réserviste avant l’aventure russe. Rien ne relève du hasard dans le monde de Deschamps, qui ne cesse de répéter que « tout le monde a le droit à l’erreur » depuis le retour d’un autre banni, Karim Benzema, autrement plus incontestable sportivement que le milieu de 26 ans. Au-delà de ses qualités et de son état de forme, Rabiot a surtout retrouvé ses lettres de noblesse parce qu’il accepte désormais de se mettre au service d’un collectif. Plus de maturité, moins de caprices, et la conscience que sa polyvalence est plus un avantage qu’un boulet pour s’installer dans le groupe France. « Aujourd’hui, il ne se pose plus les questions : « Ne serais-je pas mieux un peu plus bas ? Suis-je trop écarté ? » Il a une vraie confiance en lui, il a la capacité technique, le volume et, en plus, il a un impact physique qu’il n’avait pas avant, énumérait DD cet automne. C’est un jeune joueur encore, mais il a gagné en maturité. Dans les discussions, c’est plus fluide. Il se met moins de restrictions. Il n’y a pas de « oui, mais ». La grande différence, c’est qu’il fait tout avec plus de détermination. »
Dans un rôle à la Matuidi, Rabiot avait été excellé contre le Portugal en novembre dernier.
Une transformation mentale capitale pour son retour en grâce auprès du sélectionneur. Trois ans après une rupture très médiatisée, la présence de Rabiot au château de Clairefontaine n’est plus une surprise. Le milieu fait partie des meubles, et postule même une place de titulaire dans le onze de Deschamps pour l’Euro. En concurrence avec Coco Tolisso pour s’installer dans un schéma en losange aux côtés des indéboulonnables Kanté et Pogba, Rabiot pourrait aussi s’imposer comme le successeur de son concurrent préféré Matuidi, un autre gaucher pas loin de figurer dans la liste le mois dernier, sur le côté gauche du système de jeu (4-2-3-1 hybride) qui avait emmené la France sur le toit du monde en 2018. « Je peux m’adapter au poste de milieu gauche, je l’ai fait plusieurs fois et ça a bien fonctionné, a confirmé Rabiot. J’ai déjà dit au coach que maintenant, je pourrais jouer n’importe où pour le bien de l’équipe de France. Du moment que je peux apporter quelque chose à cette équipe, mon positionnement n’est pas un sujet. Jouer en sentinelle est aussi une option, bien sûr. Il faut être prêt à tout, et dans ce milieu on est amené à beaucoup bouger, à intervertir nos positions. On est tous capables d’occuper cette position de sentinelle, donc ce sera au coach de déterminer le mieux armé pour jouer à ce poste. Et bien sûr que si je dois le faire, je le ferai. » Rangez les thermomètres, Rabiot n’a plus l’intention de se cacher.
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Par Clément Gavard