- Coupe d'Italie
- 1/4
- Spezia-Alessandria
Migliore : « Spezia vise la Serie A à court terme »
Les deux sensations de la Coupe d’Italie s’affrontent en quarts de finale ce soir. D’un côté, l’Alessandria Club de D3, de l’autre Spezia, pensionnaire de Serie B et tombeur de la Roma au tour précédent avec un arrière gauche franco-italien dans ses rangs.
On la fait en français ou en italien ? (rires) Comme tu veux, c’est toi qui choisis !
Va pour le français, parle-nous de ton rapport avec les deux pays. Je suis né en Italie de parents italiens, précisément à Arezzo, mais à l’âge de trois ans, on a déménagé à Nice à cause du boulot de mon père qui est représentant dans le prêt-à-porter. Lui est Napolitain et ma mère est de Toscane. J’ai eu une éducation italienne, mais j’ai grandi dans un contexte français.
En revanche, ton éducation footballistique est 100% française. Je l’ai faite dans le deuxième club niçois, le Cavigal, qui évolue à un très haut niveau chez les jeunes. À l’âge de 14 ans, lors d’un match contre l’OL, j’ai été repéré par un de leurs recruteurs qui m’a proposé de venir faire un test. Il a été concluant, mais je ne me sentais pas prêt à quitter le cocon familial. C’était un petit risque d’attendre, mais bon, ils ont continué à m’observer, tout comme l’OGCN d’ailleurs, et à 16 ans, j’intègre le centre de formation rhodanien.
Tu as grandi avec quelle génération ? J’ai beaucoup joué avec les 87, car ils manquaient d’arrières gauches, donc du coup, c’était Benzema, Ben Arfa, Mounier. Ma génération, les 88, n’était pas aussi douée. Bon, on s’est tous perdu de vue, puis un mec comme Karim était sur une autre planète, il était déjà avec l’équipe une et redescendait disputer quelques matchs de Gambardella. Avec l’OL, je fais quatre ans, deux en U18 et deux en CFA et un stage de préparation à Dubaï avec les pros. C’était encore le Lyon qui tapait le Real 3-0 et achetait des grands joueurs. Par exemple, à mon poste, ils avaient pris Grosso. Désormais, les gars du centre ont plus d’opportunité en équipe une.
Pourquoi tu as quitté la France pour la Belgique ? Quand tu sors de la CFA, ce n’est pas simple de trouver une place chez les pros. Ce n’était « que » de la D1 belge, mais tu rencontres Anderlecht, le Standard Liège, c’est mieux que de finir en National en fait. Et puis il y a une grosse communauté italienne à Mons, notamment le président du club. C’était une superbe expérience, mais je ne me sentais pas de rester vivre en Belgique. On imagine que jouer en Italie était ton plus grand rêve. Ah ça oui, et puis je me sentais prêt à affronter le challenge. J’ai eu cette opportunité à Giulianova, car mon père connaissait un ami du président et il savait qu’ils avaient besoin d’un arrière gauche. C’était un club modeste évoluant en troisième division, mais j’ai de suite fait mes preuves, Crotone m’a vite repéré.
Tu y passes trois ans, c’est une équipe qui fait actuellement sensation en Serie B. Et ça ne me surprend pas, chaque année, ils prennent les meilleurs joueurs sortant des centres de formation des gros clubs, j’ai par exemple joué avec Florenzi et Sansone. C’est le club parfait pour un jeune, c’est au fin fond de la Calabre, mais tu n’as qu’à penser au foot avec en plus un gros public derrière toi. Quand on les a affrontés, ils nous ont vraiment donné du fil à retordre. Ils vont finir en Serie A selon moi (Crotone est deuxième à mi-saison, ndlr). En 2013, te voilà à Spezia, un club qui voit grand. Notre président, Gabriele Volpi, est un important homme d’affaires, un grand monsieur avec des valeurs. On ne le voit pas souvent, mais quand il vient, il démontre son attachement à l’équipe. Malheureusement, en championnat, on a du mal, on a fait deux fois les play-off pour la montée, mais le club est beaucoup plus ambitieux que ça. L’objectif est clairement la Serie A à court terme. Il possède aussi une équipe de water-polo, c’est ça ? Oui, la Pro Recco, la meilleure équipe d’Europe depuis des années et qui reste sur dix Scudetti en Italie. J’ai eu l’occasion de rencontrer les joueurs durant une cérémonie, ce sont des athlètes à part entière, ils m’ont vraiment époustouflé. C’est très fort ce qu’ils font, je leur tire mon chapeau, car gagner n’est jamais facile, peu importe le sport ou l’équipe.
Votre président est aussi propriétaire de l’équipe croate de Rijeka, il y a une synergie avec Spezia, non ? Jusqu’à peu, Nenad Bjelica et Igor Budan étaient respectivement entraîneur et directeur sportif ici. Il y a une collaboration qui permet de recruter quelques talents croates (ils sont actuellement 8 dans l’effectif, ndlr) et c’est plutôt efficace. Parlons de votre parcours en coupe. Déjà cet été, vous sortez un autre club de Serie A, Frosinone. Une rencontre très disputée, on a eu beaucoup d’occasions, mais on passe aussi aux penaltys. En fait, on a très bien démarré la saison, que ce soit en coupe et en championnat, mais ensuite, on a eu un mois d’octobre catastrophique. C’est là qu’on change de coach avec l’arrivée de Di Carlo, quelqu’un d’expérimenté dont l’objectif est de nous remonter vers la zone des play-offs. Contre la Roma en 8es, vous y allez pour faire quoi ? L’entraîneur y croyait et nous aussi. Il a aligné la meilleure équipe possible, pas de turn-over, et ça déjà, c’est un message. L’idée était de jouer sans se dénaturer pour ne pas avoir de regrets. Minute après minute, on s’est rendu compte que c’était faisable. Une fois qu’on les a privés d’espaces, ils se sont retrouvés impuissants. Bon, ce n’était pas une grande Roma, mais on a été solidaires et on a même su placer quelques contre-attaques, c’était le match parfait.
Sur ton côté, tu avais Salah et Maicon, deux sacrés clients. C’était intéressant de se retrouver contre de grands joueurs afin de voir si je tenais le choc. Au final, j’ai vu qu’il n’y avait pas tant de différences que ça, c’est le genre de déclics qui te permettent d’avoir encore plus confiance en tes moyens.
Vous recevez l’Alessandria, le risque n’est-il pas de déjà penser à la demie contre le Milan ? Carrément, et ce serait vraiment idiot de passer au travers, mais on sait que l’Alessandria va venir jouer sa chance à fond. Ils y croient, ils ont déjà sorti deux équipes de Serie A (Palerme et le Genoa, ndlr). Moi, je les considère comme une équipe de Serie B, ils ont d’ailleurs fini champions d’hiver dans leur groupe de Lega Pro. Il va falloir faire très attention.
Vous pourrez compter sur votre 12e homme.
Notre stade, c’est un petit chaudron, limite les supporters s’en foutent du beau jeu ici, ce qu’ils veulent, ce sont des mecs qui donnent tout sur le terrain. C’est un club avec une histoire, la Serie A, ils la veulent aussi. Carpi et Frosinone sont montés parmi l’élite, Crotone est bien parti, tandis que nous, on piétine malgré les gros investissements.
Vu ton nom de famille, tu es meilleur en quoi ? L’abnégation ! J’ai atteint ce niveau grâce au travail, la volonté de ne jamais rien lâcher. Si j’avais un conseil à donner à un jeune, c’est de s’accrocher, il ne suffit pas d’un match ou d’une bonne année, l’important, c’est la durée.
Tu es un des meilleurs arrières gauches de B, as-tu eu quelques touches avec des clubs de l’élite ? Oui et non, je n’ai jamais joué en Serie A, donc les recruteurs ont quelques réticences me concernant. Néanmoins, des matchs contre la Roma, et peut-être le Milan, sont une excellente occasion de se mettre en valeur. Il ne me manque vraiment pas grand-chose pour atteindre le dernier échelon, ce serait un réel aboutissement. J’y crois, je pense avoir le niveau !
Et si tu devais choisir entre la Nazionale et les Bleus ?
Je n’ai pas le choix, je n’ai que la nationalité italienne, cela m’a même empêché de répondre favorablement à une convocation d’une sélection régionale quand j’étais jeune. Mais à la fin de ma carrière, je rentrerai habiter en France, et pourquoi pas avant si j’en ai l’opportunité.
Propos recueillis par Valentin Pauluzzi