- C1
- Demies
- Ajax-Tottenham (2-3)
Merci l’Ajax, c’était super
La tornade Lucas Moura qui a balayé en quelques minutes l'Ajax ne doit pas effacer le formidable parcours que les Ajacides ont signé pour se hisser jusqu'en demi-finale. Car malgré le goût d'inachevé, cette aventure gardera tout de même quelque chose d'insensé.
Personne n’aime quand une nation vient vampiriser la finale d’une Coupe d’Europe. Cette année, celle de la C1 sera 100% anglaise et il reste encore une chance pour que celle de la C3 suive la même direction en cas de qualification d’Arsenal et Chelsea ce jeudi soir. Quoi qu’il en soit, le triplé extraterrestre de Lucas Moura est venu transformer un duel qui respire le foot à l’ancienne entre l’Ajax et Liverpool en un replay de Premier League. Tant mieux pour les Spurs qui méritent leur victoire à 100%, tant pis pour ceux qui rêvaient d’une affiche sortant un peu des sentiers battus. Finalement, l’amertume de l’élimination de l’Ajax n’a d’égal que l’hommage qui doit lui être rendu. Depuis le 1er août dernier et une victoire face au Sturm Graz, les hommes d’Erik ten Hag n’ont cessé de régaler les amoureux d’une certaine idée du romantisme.
Parce qu’on vient de loin
Que de chemin parcouru en effet depuis ces trois tours de qualification enquillés contre Graz, le Standard et le Dynamo Kiev ! On en oublierait presque que l’Ajax était la seule équipe de cette phase finale à être passée par cette redoutable campagne estivale. Tout comme on a du mal à imaginer que la dernière équipe à avoir sorti l’Ajax en C1 s’appelait… OGC Nice. C’était en août 2017, une autre époque, très lointaine. Depuis, l’Europe entière s’est pris en pleine poire un vent de fraîcheur venu droit d’une ville culte du football continental. Et a découvert pléthore de talents que les plus grands cadors s’arrachent désormais à prix d’or : Hakim Ziyech, Frenkie de Jong, Matthijs de Ligt, Donny van de Beek… autant de blases qui fleurent bon la mimolette et la tulipe et qui ont, le temps d’une saison, donné l’impression que le miracle de la Coupe de France pouvait être transposé à l’échelle européenne.
Frissons lointains
Et quand bien même certaines mauvaises langues diraient qu’après la remontada de Tottenham, De Jong est bel et bien prêt pour être transféré au FC Barcelone, force est de constater que les Ajacieden ont proposé bien plus que l’émotion de voir David gagner contre Goliath. De par l’élégant jeu offensif proposé par Erik ten Hag, l’Ajax a renoué avec le légendaire totaal voetbal érigé en dogme par Johan Cruijff il y a quarante ans. Preuve qu’il est encore possible en 2019 de proposer une idée de jeu originale, même avec un budget de nain (75 millions d’euros) en comparaison avec les tauliers de la C1.
Si chacun s’accorde à penser que cette Ligue des champions était si particulière, c’est peut-être parce qu’au fond, il sommeille en chacun de nous un amoureux des épopées réalisées par les « petits » et qui jubile quand les grosses pointures se font éliminer prématurément. Parce qu’avec le paquet de scénarios fous qui ont caractérisé cet exercice de C1, on est en droit de croire, particulièrement avec le débat menaçant de la création d’une ligue fermée, que les émotions ont encore leur place au sommet du football européen, là où l’argent-roi dicte sa loi depuis des années. L’Ajax a montré l’exemple et il est grandement probable que la bande amstellodamoise qui a procuré tant de frissons cette année ne soit plus la saison prochaine. Puisse un autre géant dormant se réveiller alors pour leur emboîter le pas.
Par Julien Duez