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Mathys Tel, 16 ans, nouveau talent du Stade rennais

Par Clément Gavard
8 minutes
Mathys Tel, 16 ans, nouveau talent du Stade rennais

Mathys Tel n'est pas prêt d'oublier le début de cette deuxième quinzaine d'août. Ce mercredi, le jeune talent du Stade rennais a signé un premier contrat professionnel de trois ans avec le club breton. Trois jours plus tôt, il battait le record de précocité d'Eduardo Camavinga en foulant la pelouse du stade Francis-Le Blé contre Brest. Celui qui a fêté ses 16 piges en avril dernier a gravi les échelons à une vitesse folle ces deux dernières années, de Montrouge à Rennes, où il s'est définitivement posé l'été dernier, en passant par la sélection U17 de l'équipe de France. Bonus : le gamin peut évoluer à peu près partout sur un terrain de football.

À Rennes, dépenser des millions sur le marché des transferts n’empêche pas de mettre en valeur le centre de formation. Ce dimanche, à Brest, cinq jeunes issus de l’académie du club breton ont vécu les dernières minutes de la partie ensemble sur la pelouse du stade Francis Le-Blé. Leurs noms ? Warmed Omari (21 ans), Eduardo Camavinga (19 ans), Matthis Abline (18 ans), Lesley Ugochukwu (17 ans) et surtout Mathys Tel (16 ans). Comme le premier cité, ce dernier a fait ses débuts avec les professionnels ce week-end, effaçant au passage le record de précocité détenu par son aîné Camavinga. En disputant ses premières minutes en Ligue 1 à l’âge de 16 ans, 3 mois et 18 jours (contre 16 ans, 4 mois et 27 jours pour l’international français), Tel est devenu le plus jeune joueur de l’histoire du Stade rennais à jouer un match en compétition officielle, et figure également à la 11e place du classement des grands précoces du championnat derrière Bilal Boutobba. Côté terrain, en moins de dix minutes, le gamin a eu le temps de toucher six ballons, d’assister à l’égalisation du Brestois Jérémy Le Douaron, et de passer le bonjour à Hianga’a Mbock avec un tampon. Trois jours après son baptême du feu, Tel a connu un nouveau moment fort : il a signé un premier contrat professionnel de trois ans avec le SRFC (la durée maximum autorisée pour un joueur mineur en France) avant de résumer cette dernière semaine de la meilleure des manières : « Il s’est passé beaucoup de choses depuis quelques jours. » Bienvenue dans la cour des grands.

Il se reposait beaucoup sur ses qualités athlétiques, il a fallu développer sa lecture du jeu. C’est pour cela qu’on a voulu l’installer à l’intérieur du jeu.

Défenseur, milieu, attaquant : Tel le polyvalent

Au retour des vacances, Mathys Tel avait pourtant débuté la préparation avec l’équipe réserve, ce qui n’avait rien d’infamant pour un garçon né en 2005. Oui, mais voilà, le natif de Sarcelles a pris l’habitude d’aller plus vite que les autres. Au cours de l’été, il a ainsi rejoint la classe biberon du groupe professionnel de Bruno Genesio, qui l’a emmené dans ses bagages lors du stage en Espagne en juillet, où il a pu gratter du temps de jeu contre Getafe et Levante avant de découvrir le Roazhon Park le temps de quelques minutes lors du dernier amical face au Torino. Avec cette interrogation pour ceux qui découvraient le phénomène : à quel poste joue Mathys Tel ? « Il était défenseur à la base quand il jouait au Paris FC et même à l’ASJ Aubervilliers. Quand je le récupère, je l’ai fait jouer excentré côté gauche, éclaire Thomas Berlette, son coach à Montrouge lors de la saison 2019-2020. En défense centrale, il est très fort, mais on peut en trouver du monde à ce poste. Lui, il a des qualités offensives rares au haut niveau, il aura le temps de reculer plus tard si besoin, mais c’était trop dommage de se priver de sa palette en l’alignant en défenseur. Devant le but, il est bon du pied droit, du gauche, de la tête, il est tellement efficace… »

À écouter ceux qui ont croisé sa route, Tel pouvait jouer à peu près partout sur un terrain de foot dans les catégories jeunes. Reste qu’à son arrivée au centre de formation de Rennes à l’été 2020, les formateurs bretons ont décidé de l’installer au milieu de terrain, dans le cœur du jeu, pour des raisons d’évolution bien précises. « Dans l’idée, on a voulu le placer ici parce qu’il avait un axe d’amélioration dans la prise d’informations autour de lui, explique Romain Ferrier, entraîneur de la réserve rennaise la saison dernière. Il se reposait beaucoup sur ses qualités athlétiques, il a fallu développer sa lecture du jeu. C’est pour cela que l’on a voulu le mettre à l’intérieur, pour qu’il y ait une notion d’espace, un jeu de position plus pertinent en fonction du ballon et de ses partenaires. Au haut niveau, on est en crise de temps et d’espaces, c’était important qu’il devienne expert dans ces situations. On avait une exigence très, très forte avec lui parce qu’on savait qu’il était talentueux. Au départ, il s’est retrouvé un peu en difficulté dans cet aspect du jeu, mais ça l’a aidé à se développer. »

L’effet positif du Covid-19

Là encore, Tel n’avait pourtant pas perdu de temps pour convaincre à son arrivée au centre de formation du SRFC, où il fait aujourd’hui l’unanimité pour ses qualités footballistiques et humaines. Surclassé en U19 dès le mois d’août 2020, inscrivant au passage trois pions en deux rencontres amicales, il s’était aussi distingué par une entrée fracassante en huitième de finale de Youth League contre l’Inter (défaite 1-0), dans une compétition réservée à des jeunes de la génération 2001-2002, soit plus âgés que lui de trois ou quatre années. Un départ en fanfare suivi de l’arrêt des compétitions chez les jeunes à cause de la crise sanitaire, qui aurait pu freiner la progression du néo-Breton. « Il y a eu un effet positif : sans championnat, on a vraiment pu développer le joueur, détaille Romain Ferrier, aujourd’hui chez les Girondins de Bordeaux. On a travaillé avec tous les supports nécessaires, avec beaucoup de terrain et de vidéo. Il a également bénéficié d’avoir été appelé en sélection jeunes avec laquelle il a pu jouer des matchs contre des centres de formation. » L’hiver dernier, Mathys Tel a en effet participé à plusieurs rassemblements avec l’équipe de France U17, où il était souvent le seul 2005 (avec le Parisien El Chadaille Bitshiabu) appelé aux côtés de Mohamed-Ali Cho, Lesley Ugochukwu et compagnie.

 J’ai vu des émissaires de l’Atalanta, de l’Inter, de Manchester, d’Allemagne aussi. Il y a eu une euphorie autour de Mathys. Il passait de remplaçant à Aubervilliers à titulaire à Montrouge. Pour imager, c’est comme si un remplaçant à Clermont arrivait titulaire à Monaco. 

INF Clairefontaine, séances vidéo et concurrence verrouillée

Si Mathys Tel n’était pas considéré comme le plus grand talent de sa génération à son époque Paris FC (2016-2017), il est rapidement devenu un jeune incontournable en Île-de-France, intégrant même l’INF Clairefontaine avant d’en être renvoyé pour des raisons toujours obscures — la FFF et Christian Bassila, nommé directeur de l’institut en juillet 2019, n’ont pas donné suite à nos sollicitations — quelques semaines avant de débarquer au Montrouge FC92 pour évoluer en U17 nationaux. Aujourd’hui encore, les dirigeants du club francilien, qui avaient rencontré le bonhomme et la famille avant d’acter son arrivée, se demandent encore comment ce garçon poli et bosseur a pu être exclu de l’INF. Un mystère puis la vérité du terrain, où le jeune Tel, alors âgé de 14 ans, se retrouve à jouer quatre fois par semaine avec des 2003 pendant six mois, s’imposant comme titulaire dans l’équipe de Thomas Berlette et séduisant tout le monde au sein du club francilien. Une poignée de semaines après son arrivée, il prendra même ses responsabilités en se chargeant de transformer un penalty pour égaliser sur la pelouse d’Angers. « Quand j’annonce l’arrivée d’un gars de Clairefontaine au groupe, on est classé deuxième, c’était légitime de se demander si on avait besoin de lui, rembobine son ancien coach. Je leur ai dit : « Vous verrez, c’est vous qui me demanderez de le faire jouer. » Ils ont compris en le voyant. Il avait beau avoir deux ans de moins, il était exemplaire dans sa façon de s’entraîner. » De son passage à Montrouge, il reste donc ces souvenirs de l’assiduité d’un gamin qui faisait la route entre Villiers-le-Bel et Montrouge (une soixantaine de kilomètres aller-retour en voiture, 2h30 de trajet en transports en commun) avec ses parents pour ne louper aucun entraînement, mais aussi ceux d’une détermination sans faille d’un jeune « programmé » pour aller plus haut, et qui n’hésitait d’ailleurs pas à revoir ses matchs en vidéo pour corriger ses défauts.

La suite de l’histoire aurait pu s’écrire à l’étranger, comme pour de nombreux jeunes talents de l’Hexagone, alors que Mathys Tel avait signé un accord de non-sollicitation* dès janvier 2018 avec le Stade rennais, dont il portera le maillot de manière ponctuelle lors de plusieurs tournois, remportant notamment ceux de Baisieux (élu meilleur joueur et meilleur buteur) et de Quevilly à l’été 2019. Un an plus tard, le SRFC aura réussi à résister aux offensives du RB Leipzig, de Monaco ou du Barça (Goal) en l’accueillant au centre de formation avec un contrat aspirant qui lui promettait de passer automatiquement professionnel l’été suivant. « J’ai vu des émissaires de l’Atalanta, de l’Inter, de Manchester, d’Allemagne aussi, se souvient Thomas Berlette, qui explique aussi cette effervescence par les résultats de Montrouge l’année précédente. Il y a eu une euphorie autour de Mathys. Il passait de remplaçant à Aubervilliers à titulaire à Montrouge. Pour imager, c’est comme si un remplaçant à Clermont arrivait titulaire à Monaco. » Depuis, Mathys Tel a cultivé son image de gamin travailleur, poli, autonome et mature pour son âge en Bretagne, où personne ne trouve rien à dire de mal sur lui. Cette semaine, il retrouvera peut-être le banc des remplaçants du Roazhon Park contre Rosenborg et/ou Nantes, à quelques mètres seulement de sa chambre au centre de formation où il est en internat depuis un an. Trop vite trop haut ? « Je ne suis pas surpris qu’il atteigne ce niveau-là, mais je ne pensais pas le voir apparaître aussi tôt sur un terrain de Ligue 1, admet Romain Ferrier. On sait que le travail chez les pros est différent, on vise la performance et les résultats, et il ne faut pas oublier que Mathys est dans sa deuxième année de formation. Mais il y a des gens compétents au club, ils savent ce qu’ils font. » Roulez jeunesse.

Dans cet article :
Lacazette, Manchester City, Griezmann : Les notes du week-end
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Par Clément Gavard

Tous propos recueillis par CG

* Un ANS est un moyen légal pour les clubs de de se lier avec un joueur d'au moins 13 ans pour écarter la concurrence, qui est contrainte à verser une indemnité au club en question en cas de volonté de recruter le jeune joueur une fois l'ANS acté entre les deux parties. Dans le cas de Mathys Tel, plusieurs clubs étaient prêts à débourser une somme conséquente pour s'offrir le jeune joueur.

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