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«Les portes de la finale étaient ouvertes»
Eric Mura. Son nom ne vous dit peut-être rien. Au vrai, ce n'est pas le plus connu des joueurs qui ont fait l'Histoire de l'Olympique de Marseille. Pourtant, à l'instar des Di Meco, Amoros, Waddle ou Deschamps, le défenseur était à Lisbonne le soir de la fameuse main de Vata, en avril 1990... Et il a tout vu.
Éric, comment avez-vous vécu cette confrontation contre Benfica avec l’OM en 1990 ?
Au match aller, je devais charger Valdo. Manque de pot, peu de temps avant, je me suis blessé lors d’un choc avec Stoitchkov. Il m’avait pété le genou. J’ai donc vu le match aller des tribunes. On gagne 2-1, mais on doit en mettre bien plus que ça. Au retour, je ne suis pas tout à fait remis. A la fin du match, je pars m’échauffer, je vais enfin pouvoir commencer mon duel avec Valdo. Je suis derrière le but de Jean Castaneda au moment des faits…
Et alors, Vata, il l’a vraiment faite cette main ou c’est de l’épaule ?
C’est la main. On est peut-être quatre à l’avoir vue sur le moment. Eric Di Meco, qui était au marquage, Bruno Germain qui était à l’entrée de la surface, Jean Castaneda bien sûr, et moi. Tous les autres essayaient d’avoir le ballon, alors ils ne se sont pas retournés. Lui, il saute, il voit qu’il est trop court, il tend le bras. Ça va très vite. Sur le moment, on alerte tout le monde. Pendant un temps, on pense tous que le but n’est pas accordé. Et puis on voit l’arbitre qui nous attend dans le rond central… C’était dommage parce que les portes de la finale nous étaient ouvertes.
La confrontation, vous la perdez quand même à l’aller, avec toutes ces occasions manquées, non ?
C’est sûr, on aurait dû faire la différence. C’est à Marseille que l’on a perdu, on aurait dû mieux se canaliser. Il y avait peut-être trop de pression. Je ne sais pas si c’est celle des supporters ou celle de Tapie. Une grande équipe est capable de se mettre à l’abri d’une erreur individuelle ou d’une erreur d’arbitrage.
A chaud, Tapie n’avait pourtant pas ce raisonnement…
On peut quand même le comprendre. C’était bouillant, il y avait une ambiance particulière. Et puis déjà à l’époque, on parlait de corruption. Milan ne voulait pas nous rencontrer. Comme par hasard, le latéral droit de Benfica, sûrement l’un des meilleurs joueurs de leur équipe, savait qu’il serait suspendu pour la finale s’il prenait un carton contre nous. Il l’a pris, très vite. Il faut se souvenir de ce que ça représentait Berlusconi à l’époque.
On en arrive donc à la phrase : « Je sais ce qu’il faut faire pour gagner une Coupe d’Europe » .
Oui, c’est vrai, je n’étais pas d’accord, ne serait-ce que pour l’équité sportive. Mais après le match, on était tous en colère, cela peut se comprendre.
C’est une déception, surtout pour vous, car vous commenciez à être titulaire à cette époque.
Je me faufilais entre cette pléiade de stars. Au début, personne ne s’attendait à ce que je joue. Mais j’ai gagné la confiance de mes coéquipiers et j’ai enchaîné les matchs. Avant cette maudite blessure. Au retour, Tapie hésitait à me faire jouer, il n’a pas osé. Pourtant, Chris (Waddle) et Papin avaient plaidé ma cause.
On entend souvent que l’OM de 91 était meilleur que l’OM de 93. Qu’en est-il de celui de 90 ?
La plus grosse équipe, c’est celle avec Giresse, Förster. On avait beau avoir perdu contre l’Ajax, c’était ce qu’il se faisait de mieux niveau international. A l’époque, il faut savoir qu’il n’y avait que des porteurs d’eau dans l’équipe. On était tous au service d’Abedi, Chris et Papin.
Vous avez gardé le contact avec l’OM ?
Pas tellement, mais c’est par ma faute. Quand je les appelle, il n’y a aucun problème. Xuereb me relance même de temps en temps pour aller jouer avec l’OM Star Club mais je n’habite plus dans le coin, ce n’est pas facile.
Un favori pour le match de ce soir ?
Si l’OM continue sur sa lancée, je les vois gagner. Mentalement, ils sont au-dessus. Et puis de toute façon, le retour se passera au Vélodrome. Cette fois-ci, ils ne pourront pas nous avoir !
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