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Les 10 coups tactiques de l’année 2021

Par Émile Gillet et Paul Citron
7 minutes
Les 10 coups tactiques de l’année 2021

L'année 2021 s'achève tranquillement, et emporte avec elle son lot d'innovations et de confirmations tactiques. Sur le terrain, le RC Lens de Franck Haise et l'Inter Milan de Simone Inzaghi crèvent chaque jour un peu plus l'écran et apparaissent logiquement dans ce top ; mais d'autres, comme Iago Aspas ou Emiliano Martinez, s'y font une place après leurs accomplissements plus ou moins légaux. En attendant 2022, voilà de quoi se régaler.

Les sorties de balle de Franck Haise

Le phénomène avait commencé ses tours de passe-passe en toute fin 2020, mais c’est véritablement en 2021 qu’on a pu s’en délecter. Et n’en déplaise aux fans de kick & rush, c’est dans la surface du gardien que ça se passe. Accompagné de Kevin Danso, Facundo Medina et Jonathan Gradit, Jean-Louis Leca se régale à la relance du ballon. Chaque week-end ou presque, on découvre un nouveau ballet chorégraphié par les Lensois. Les joueurs coulissent tous vers une zone précise, jouent au chat et à la souris avec les adversaires et s’échangent le ballon comme s’il était aimanté à leurs pieds. Résultat, les ressorties de balle sont hyper propres, créent le danger en seulement quelques touches, et plus important encore, sont imprévisibles. Bien sûr, il y aura toujours une passe ratée qui conduira à une chaude occasion à gérer en défense. Mais n’écoutez pas les aigris, c’est en prenant des risques que le football devient beau. Tout cela, c’est l’œuvre de Franck Haise, alors on applaudit.


Iago Aspas, malice en Galice

Ce n’est pas la tête pensante du Celta de Vigo pour rien. Lorsqu’il ouvre le score face à Valence et qu’il sent une pointe à l’adducteur au moment de s’en aller célébrer, le Galicien a la présence d’esprit de retirer son maillot pour recevoir un jaune. Le cinquième de la saison, synonyme de match de suspension, qu’il purgera pendant sa convalescence, avant de revenir guéri et sans aucune biscotte à son actif au match suivant. Une ruse même pas sanctionnée par la Fédération espagnole, déjà intervenue dans ce genre d’affaires, qui a préféré laisser le bénéfice du doute au joueur. Aspas plantera un but et une passe à son retour de blessure face à l’Espanyol. Carton plein.


La nomination de Simone Inzaghi à l’Inter

Perdre Romelu Lukaku, Achraf Hakimi et Antonio Conte aurait bien pu finir d’étouffer l’Inter, déjà pris à la gorge financièrement. Mais il n’en a rien été. En débarquant de la Lazio, Simone Inzaghi a conservé le 3-5-2 qui a fait triompher les Nerazzurri, y a incorporé avec parcimonie les quelques recrues avant d’y ajouter sa patte personnelle. Et le succès est retentissant. Une seule défaite en championnat – contre la Lazio, le destin est parfois taquin – et un titre de champion d’automne. Parmi les belles idées sorties de sa boîte à outils : reculer Hakan Çalhanoğlu sur le terrain pour qu’il ait plus d’impact sur le jeu, donner un gros pouvoir créatif à Alessandro Bastoni, défenseur central et créer des duos d’attaquants complémentaires à chaque match. Le premier est meilleur passeur de Serie A, le second est désormais titulaire avec la Nazionale, et enfin l’Inter est la meilleure attaque du pays. What else ?


Le recyclage de Valentin Rongier

Depuis l’arrivée de Jorge Sampaoli à l’OM, on a vu des choses farfelues sur le terrain. Dans un système qu’on a longtemps qualifié d’opaque par souci de simplification, certaines ont même été peu concluantes. Mais il y a bien quelques trouvailles à mettre au crédit du braillard au crâne rond, et l’utilisation de Valentin Rongier fait partie de celles-là. Repositionné à un poste hybride, l’ancien Nantais est l’un des gages de la solidité marseillaise depuis le mois de septembre, et en même temps l’une de ses courroies de transmission favorites (95 ballons touchés toutes les 90 minutes en moyenne en Ligue 1). Tantôt positionné à droite en phase défensive, tantôt replacé dans l’entrejeu lorsque l’OM contrôle le ballon, le natif de Mâcon navigue avec autant d’assurance sur le terrain que son club dans les hauteurs du classement. Menacé par l’arrivée de Mattéo Guendouzi sur la Canebière, sa capacité d’adaptation au système de Sampaoli lui a donné une nouvelle dimension. Le Joshua Kimmich des Bouches-du-Rhône, le bouc en plus.


Didier Deschamps et sa défense à trois

À cause de blessures et autres coups du sort, la Dèche a dû sortir de sa manche son dispositif à trois défenseurs un peu trop tôt. Mais avec Clément Lenglet dans l’axe, un Benjamin Pavard en protocole commotion à droite, et Adrien Rabiot à gauche, toutes les conditions n’étaient pas réunies pour triompher. Avec du temps et les bons joueurs, DD a enfin trouvé comment remettre la France sur le toit de l’Europe : un 3-4-1-2. Un dispositif tactique qui met les trois attaquants bleus (Kylian Mbappé, Karim Benzema, Antoine Griezmann) dans les meilleures dispositions, tout en garantissant une assise défensive importante avec des gaillards derrière. Depuis, l’équipe de France n’a plus paumé un match et a même remporté la Ligue des nations. Des petits jeunes qui en veulent, un collectif de nouveau huilé et des individualités capables d’enfiler leur cape de super-héros quand le navire tangue : Didier Deschamps a montré qui était le patron.


Robert Lewandowski au théâtre du Châtelet

Si, cette année, le secret du Ballon d’or a été excellemment bien tenu par France Football, il y a bien quelques personnes qui étaient au courant du lauréat. À commencer par Lionel Messi et Robert Lewandowski. Mais comment s’assurer la présence du second s’il sait qu’il va regarder l’Argentin soulever une récompense qu’il aurait été en droit de remporter ? En créant un nouveau trophée pardi ! Le Polonais repart sourire aux lèvres couronné du titre honorifique de « meilleur buteur de l’année » , mais certainement avec un bon vieux seum des familles en travers de la gorge.


Le cinquième but de Salah à Old Trafford

Qui dit humiliation de l’année dit démonstration tactique. Le 24 octobre, Liverpool trucide United 5 à 0 à Old Trafford, et inscrit encore un peu plus les préceptes du gegenpressing cher à Jürgen Klopp, Ralf Rangnick and co. dans les livres d’histoire. Il n’y a qu’à revoir le cinquième but pour s’en convaincre : pressing haut des Reds, ballon repoussé de la tête par Virgil van Dijk puis intercepté par Scott MacTominay, contre-pressing express sur un Paul Pogba qui n’a pas le temps de comprendre ce qui se passe qu’il a déjà paumé le cuir, transition ultra-rapide enclenchée par Jordan Henderson et finition clinique de Mohamed Salah. Récupération du ballon 6 secondes après la perte, et l’Égyptien célèbre déjà sa réalisation 10 secondes plus tard : un modèle du genre. Mersey, au revoir.


À Manchester, la vie sans neuf

Des années que Pep Guardiola travaillait tel un laborantin pour trouver une formule inédite : arriver à marcher sur l’Europe sans numéro neuf. Après plusieurs semaines, mois et années d’expérimentation, l’année 2021 affiche un bilan clair et net : il a réussi. En 66 matchs, Manchester City a planté 162 pions, soit deux et demi par rencontre. Avec Kevin De Bruyne en faux neuf, Bernardo Silva très haut sur le terrain et un trio d’attaquants polyvalents et constamment en mouvement (Sterling, Mahrez, Foden, Grealish, Jesus), il s’est dispensé d’un buteur pur et peut jouer comme ça peu importe les onze Citizens sur le terrain. Le mode opératoire est simple : un long ballon en direction d’un half space pour lober et faire coulisser la défense. Ensuite, rejouer dans l’axe, soit au cordeau devant le but, soit à l’entrée de la surface, en fonction de la situation. Voilà comment obtenir l’avantage numérique dans la zone clé et prendre à rebours n’importe quel adversaire. Une si belle innovation, ça valait le coup de se faire humilier par l’OL en Ligue des champions.

Emiliano Martinez, renard des surfaces

Il en a pris deux par Jorginho il y a deux jours, mais le roi des penaltys cette année reste pourtant Emiliano Martinez. Non content d’avoir mis en boîte Yerry Mina en demi-finales de Copa América lors de la séance de tirs au but, l’Argentin remet le couvert en Premier League. Face à Manchester United, alors que son équipe de Villa mène 1 à 0 et que Bruno Fernandes s’apprête à tirer, il s’approche et exhorte Cristiano Ronaldo à s’y coller. Visiblement chamboulé par la provocation, Fernandes garde le ballon et l’envoie dans les nuages mancuniens : de quoi arracher une petite danse de la victoire au portier des Villans. Vous avez dit loterie ?

La campagne d’Arnaud Montebourg

Un retour en grande pompe dans la vie politique en vue de l’élection présidentielle, flanqué d’un slogan ringardissime, « La remontada de la France » . Une première annonce, qui vise à bloquer les envois privés d’argent en direction des pays étrangers jugés peu coopératifs en matière d’immigration – mesure pas franchement appréciée par ses soutiens, qui ne sont d’ailleurs pas légion. Des vidéos où on le voit tomber en direct sur le répondeur de ses opposants également en campagne, pour leur dire qu’il voudrait discuter avec eux – « ce serait vraiment utile ». Tout dans la stratégie électorale d’Arnaud Montebourg porte à croire qu’il est en train de se sacrifier sur l’autel de la gauche plurielle en jouant à l’imbécile, pour mieux exaspérer ses concurrents et les pousser à s’unir avant 2022 au lieu de faire 2,7% chacun dans leur coin. On n’a plus vu tel sens du collectif depuis Federico Valverde face à l’Atlético.

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