Lens-Lille : à vous de jauger

S’il y avait un mot qui régnait mardi soir dans les dédales de la tribune Xercès à Bollaert, c’est « débilité » . Une analyse fine partagée par Quentin, l’un des abonnés de la Marek, dont les 4000 abonnés ont pu croquer le derby Lens-Lille, tous entassés dans la même tribune (1000 partenaires avaient été placés dans la tribune opposée). « Quand on est entré dans le stade, je me suis demandé quel était le but de la jauge. On était tous collés les uns sur les autres, parfois on était à deux debout sur un seul siège. Et le reste du stade était totalement vide. » Son pote Hugo ne tergiverse pas, quelques minutes après avoir une dernière fois cassé sa voix sur le tir au but de la gagne de Seko Fofana. « C’est juste débile de descendre à nouveau la jauge, comme ça avait été le cas en début de saison dernière, pour à nouveau tous nous remettre ensemble. Soit on nous laisse tous profiter, soit on prend de vraies décisions. Là, c’est du pipeau. Et encore une fois, on s’est tous fait vacciner ou tester pour profiter du match. »

Difficile de trouver un défenseur de la mesure. « Si le gouvernement souhaite mettre une jauge et limiter la propagation du virus, qu’il l’applique jusqu’au bout en faisant une répartition équitable dans le stade, complète Nico, venu avec son fiston. Tu as 38 000 places, quatre tribunes, il y avait largement de quoi mettre des gens dans chaque tribune pour les espacer. Va comprendre que toi, au bureau, tu as six places dans ton open space, et que là, on peut être tous ensemble. C’est mieux pour l’ambiance, et de toute façon, on a tous le pass sanitaire, mais ça conforte dans l’idée que le gouvernement ne sait pas trop ce qu’il fout avec les stades. »

Un amendement adopté, la proportionnalité en ligne de mire

Ce n’est pas Jocelyn Gourvennec qui dira le contraire. Le coach des Dogues a beau ruminer une défaite qu’il n’avait pas vu venir, il tacle à la gorge ces « décideurs qui restent les décideurs », pendant que lui n’est qu’un « observateur » face à « ce qui paraît manquer de bon sens ». Reconverti piston gauche durant ce derby, Corentin Jean pestait contre « ce plaisir qui a été énormément gâché. Sans notre public, ça n’a rien à voir ». Si Matignon impose une jauge, le gouvernement se contrecarre de sa mise en application qui reste du ressort de l’organisateur et les coûts de sécurité peuvent expliquer le placement dans une même tribune.

Du côté de la préfecture, on glisse à peine « que c’est quand même mieux pour limiter la circulation du virus 5000 personnes que 38 000 », pendant qu’une autre source des autorités estime qu’il n’y a « pas vraiment de règle fixe. On ne peut pas attacher les supporters et puis pour l’ambiance, c’est tout de même mieux. Si on répartissait les supporters dans toutes les tribunes ou en en mettant un tous les dix sièges, c’est comme si on revenait au huis clos. » Il y a de quoi choper le tournis et se claquer la tête contre les murs. Les jauges proportionnées doivent devenir la norme, point barre. « Il y a un amendement par le député Sacha Houlié dans les tiroirs, j’espère qu’il sera voté, prédisait juste avant le derby Franck Haise, le technicien artésien. Cela me semble un peu plus logique. On peut améliorer certaines choses. » Pendant que les Lensois filaient en 8^esde finale de la Coupe de France, l’Assemblée nationale adoptait tout juste un amendement pour aller au-delà des 5000 spectateurs en ouvrant la possibilité d’appliquer la proportionnalité. « Pas de manière systématique, dixit la ministre des Sports Roxana Maracineanu, mais spécifiquement pour les grands équipements sportifs ». Enfin un peu de jugeote…