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Le tournoi masculin de Roland-Garros est-il barbant ?
Par Fabien Gelinat
4 minutes
Les demi-finales de cette édition 2021 de Roland-Garros qui se disputeront ce vendredi s’annoncent explosives : Djokovic-Nadal pour le duel de légendes, suivi de Zverev-Tsitsipas pour le combat entre les futurs patrons du circuit ATP. Mais si le dernier carré propose un menu cinq étoiles à déguster sans modération, il laisse également un goût amer de déception de par ce quatuor sans surprise qui s’affrontera pour soulever la Coupe des Mousquetaires.
Des demies prévisibles depuis l’espaceLa première demi-finale proposera l’affrontement le plus fréquent de l’ère Open entre Djokovic et Nadal, qui vont croiser le fer (ou plutôt la raquette) pour la 58e fois de leur carrière, avec un bilan très serré (29 victoires pour Nole, contre 28 pour Rafa), dont 26 fois sur terre battue (où Nadal mène très largement 19-7). Autant dire que le schéma tactique est connu d’avance et que la seule surprise pourrait venir d’une défaite de Nadal, en quête d’un quatorzième trophée porte d’Auteuil. De l’autre côté, Alexander Zverev et Stéfanos Tsitsipás sont actuellement les deux hommes forts de la nouvelle génération destinée à faire chuter les deux derniers membres de l’incontournable big four des années 2010 (avec Federer et Murray). Et que ce soit l’Allemand ou le Grec, chacun y est allé de sa grosse performance cette saison sur terre battue : victoire contre Nadal au Masters 1000 de Madrid (qu’il a remporté) pour Zverev (n°6 mondial) ; victoire au Masters 1000 de Monte-Carlo et finale (perdue face à Rafa) à Barcelone pour Tsitsipás (n°5 mondial). Le constat est donc sans appel et fataliste : ces demi-finales, même Thomas Pesquet aurait pu les voir venir.
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Terre (battue) de spécialistesLa terre battue est une surface très particulière et exigeante physiquement, où la balle est plus lente et les effets bien plus importants que sur tout autre surface. Des spécificités qui désavantagent les joueurs adeptes du jeu offensif, des montées au filet et des prises de risques, mais également les joueurs qui jouent « à plat » , comme un certain Daniil Medvedev. « Je n’aime pas grand-chose sur la terre battue, rappelait d’ailleurs le Russe avant le début de la quinzaine. Cette surface ne correspond pas bien à mon physique et à mon style de jeu. Ma gestuelle ne me permet pas d’y jouer bien. » La surface ocre est d’ailleurs souvent considérée comme étant une terre promise à ses spécialistes, les monstres physiques qui aiment les longs rallyes et les grosses frappes comme Nadal, Schwartzman, Tsitsipás ou David Ferrer à une autre époque. Difficile, en conséquence, de retrouver des noms originaux encore présents au fur et à mesure que le tournoi avance. Le tableau féminin, contre-exemple par excellenceSi vous cherchez des coups d’éclat et des surprises, mieux vaut vous tourner vers le tournoi simple dames. Hormis Simona Halep en 2018, aucune des quatre premières têtes de série n’a remporté le Grand Chelem parisien depuis 2016 et le triomphe de Garbiñe Muguruza face à Serena Williams. Mieux encore, Jeļena Ostapenko et Iga Świątek, lauréates en 2017 et 2020, n’étaient même pas têtes de série ! Des parcours qui s’expliquent par une certaine irrégularité des tops joueuses du circuit WTA, mais également par la capacité des joueuses « inconnues » à développer un jeu prodigieux et se révéler durant la quinzaine, comme ont pu le faire la Lettone et la Polonaise. Des exploits extrêmement rares dans le tableau des hommes où seuls des cataclysmes semblent pouvoir faire tomber les favoris annoncés, alors que les derniers joueurs non-têtes de série à avoir atteint la finale du deuxième Grand Chelem annuel sont les Argentins Mariano Puerta (en 2005, déjà battu par Nadal) et Gastón Gaudio, qui avait créé la surprise l’année précédente. Cette année encore, si la vraie seule surprise se matérialise par l’élimination au premier tour d’Andrey Rublev, finaliste à Monte-Carlo, et dans une moindre mesure Dominic Thiem, complètement à l’envers depuis plusieurs mois et sorti également dès son entrée en lice sur la terre battue parisienne, aucune non-tête de série n’a réussi à rejoindre le dernier carré, le meilleur d’entre eux étant Alejandro Davidovich Fokina, balayé en quarts de finale par Zverev.
L’absence de Français, vecteur d’intérêtSi les puristes français de la balle jaune savent se satisfaire de chaque opposition proposée durant la quinzaine de Roland-Garros, les néophytes, ou encore les amateurs de tennis de fin mai à mi-juin vibrent forcément moins depuis plusieurs années. La raison : la disparition précoce de leurs héros nationaux dans le tournoi. Pire encore, ce cru 2021 restera dans les mémoires avec aucun Français présents au troisième tour ! Une catastrophe inédite dans l’ère Open qui détache forcément le public plus large du Grand Chelem parisien. Si certains se rallient derrière leurs idoles Nadal et Djokovic, figures emblématiques de leurs sports, d’autres considèrent que le tournoi perd de son intérêt et devient une simple répétition des années précédentes. Et même si le tableau masculin chez les juniors laisse entrevoir quelques espoirs avec des demi-finales 100% françaises (une première également dans l’ère Open), il faudra encore attendre quelques années pour espérer voir ces jeunes pousses franchir un cap chez les grands et soulever les foules des courts Philippe-Chatrier, Suzanne-Lenglen ou Simonne-Mathieu comme ont pu le faire Monfils ou Tsonga il y a quelques années. Mais ça, c’était une autre époque.
Par Fabien Gelinat