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Le jour où Solskjær a affronté le PSG en C2
L’entraîneur de Manchester United retrouve ce mercredi le Parc des Princes, un stade dans lequel il n’a joué qu’une seule fois en tant que joueur. C’était en septembre 1995, aux prémices de sa carrière, quand son club de Molde affrontait le PSG en seizièmes de finale de C2. Les Norvégiens avaient alors subi la loi des futurs vainqueurs de la compétition, mais le jeune attaquant avait tout de même eu le temps de marquer les esprits et d’échanger son maillot avec Bruno N’Gotty.
« Aujourd’hui, certains disent qu’elle ne compte pas, cette coupe, puisqu’elle n’existe même plus, mais pour moi, c’était quand même un niveau bien bien relevé » , soufflait Daniel Bravo pour So Foot. L’ancien milieu parisien avait alors raison de défendre cette Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe, disparue en 1999, le PSG étant le premier — et le seul — club français à l’avoir remportée en presque 40 ans d’existence.
Car le prestige d’une compétition ne tient pas qu’à une histoire de longévité. Elle tire aussi son lustre des trajectoires, des épopées et des histoires qu’elle a engendrées. L’édition 1995-1996 n’échappe pas à la règle. « Le Parme de Hristo Stoitchkov, il fallait les sortir, quand même. Et puis, la Corogne de Bebeto, c’était solide aussi. Ils avaient de très bons joueurs » , assurait Bravo. Dans son énumération, un oubli : le Molde FK d’Ole Gunnar Solskjær.
Quand le Super Sub n’était que super
Certes, ce n’était pas à un ogre qu’avaient affaire les hommes de Luis Fernandez. Vainqueur de la Coupe de France, de la Coupe de la Ligue et demi-finaliste de la C1 la saison précédente, le PSG faisait son entrée dans la compétition avec ce premier déplacement à Oslo face au vainqueur de la Coupe de Norvège et promu en D1. Ole Gunnar Solskjær n’avait lui que 22 piges au compteur et neuf mois dans les pattes avec les Blåhvit. Ses états de service ? Il avait crevé l’écran avec Clausenengen — auteur de 31 buts en D2 pour sa dernière saison avec son club formateur. Mais au moment de croiser la route du PSG, le garçon de Kristiansund avait déjà participé à l’histoire de Molde. En août contre le Dinamo Minsk, il avait ouvert le score à l’aller, puis égalisé au retour pour permettre aux hommes d’Åge Hareide de passer pour la première fois un tour qualificatif en quatre participations européennes.
Pour ces seizièmes de finale, ses premiers matchs de « haut niveau » , Solskjær ne mettra pas plus longtemps pour s’illustrer. Accompagnant une percée d’Ole Bjørn Sundgot, c’est lui qui surprendra Richard Dutruel d’une frappe spontanée de l’extérieur de la surface. Dominateurs jusque-là, les Parisiens mettront une vingtaine de minutes pour réagir : une frappe lumineuse de Paul Le Guen, puis un penalty de Youri Djorkaeff, le but de Dely Valdés annihilant finalement l’égalisation sur corner d’Arild Stavrum. Mais la prestation de celui qui était alors plus « Baby Face » que « Killer » forcera Luis Fernandez à redoubler d’attention à l’égard de ce fils de lutteur avant le match retour au Parc.
Patrice Loko, lui, n’était pas du déplacement en Norvège, mais il n’a pu louper le phénomène. « J’avais regardé le match aller à la télé, et on en avait pas mal parlé lors de la séance vidéo entre les deux matchs, se remémore l’ancien attaquant tressé. Dans cette équipe de Molde, on ne connaissait pas beaucoup de joueurs, mais ça jouait collectif. En revanche, Solskjær sortait clairement du lot. Sur le terrain, on sentait l’aura qu’il avait auprès de son équipe. Tous les ballons passaient par lui. Ce n’est pas négligeable dans une équipe. »
Dans la peau du manager
Et c’est avec tout le sérieux nécessaire que les Parisiens ont abordé le match retour. Sauf qu’au Parc, Molde ne fera pas longtemps illusion. Pascal Nouma plante un doublé, Djorkaeff marque à nouveau. Quant au quatuor défensif Llacer-N’Gotty-Dieng-Colleter, il muselle les Norvégiens et ne lâche pas d’une semelle Solskjær. Paris peut ainsi continuer un chemin qui le mènera jusqu’à la victoire finale, face au Rapid Vienne, sur un but de Bruno N’Gotty. Un héros qui fut donc le temps de deux matchs le garde du corps d’Ole Gunnar Solskjær, les deux échangeant leurs maillots en fin de rencontre. Pourtant, à l’issue de la rencontre, ce qui avait marqué Patrice Loko était un visage juvénile illuminé par le sentiment du devoir. « J’ai cette image de lui avec un sourire, assure-t-il. Même si son équipe était éliminée, il savait qu’il pouvait perdre contre une meilleure équipe. C’était un joueur avec une belle mentalité et du charisme. »
Ainsi, le voir 23 ans plus tard dans la peau du manager de Manchester United, après une telle carrière, n’est en rien une surprise pour les témoins de la première heure. « Il a montré par son talent et son palmarès qu’il le méritait, il est écouté et entendu dans le vestiaire, ajoute Loko. Parfois, c’est bien de prendre des gens qui ont l’amour du maillot. Quand on prend quelqu’un qui aime son club, en général, on fait du bon travail. » Et ce mercredi, un peu comme en 1995, Solskjær devra une nouvelle fois s’en remettre à un exploit des siens pour continuer sa route européenne. Mais comme à l’époque, une élimination ne pourrait compromettre la carrière à laquelle il pourra prétendre, cette fois sur un banc de touche. Reste un avertissement à prendre en compte, formulé par Patrice Loko : « En tout cas, il sait ce qu’il faut ne pas faire pour prendre 3-0. »
Par Mathieu Rollinger
Propos de Patrice Loko recueillis par MR.