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Le jour où Del Piero a fait se lever Bernabéu
Cette rencontre face au Real il y a sept ans a une place de choix dans la longue et riche carrière du joueur le plus emblématique de l'histoire de la Juventus. Le public madrilène lui ayant offert un vibrant hommage après qu'il a inscrit un doublé décisif.
C’est un fait : les occupants du stade Santiago-Bernabéu sont très exigeants. Ils sont même prêts à prendre en grippe leur équipe au moindre faux pas, malgré la collection de trophées amassés depuis des décennies. Pour avoir vu évoluer la grande majorité des joueurs les plus classes de l’histoire du foot, le Merengue sait aussi reconnaître la valeur d’un adversaire. Alessandro Del Piero a pu goûter à ce plaisir un soir de novembre 2008, lorsque 80 000 supporters du Real Madrid se sont levés au moment de son remplacement. Un hommage rare qui coïncidait également à la fin du calvaire de la Juventus.
Un bijou à l’aller
Deux ans seulement après l’affaire Calciopoli qui l’avait envoyé croupir en Serie B, la Vieille Dame faisait sa réapparition en Champions League. Si les oppositions face au Zénith et surtout le Bate Borisov avaient plutôt un arrière-goût de Ligue Europa, voire d’Intertoto, celles face au Real ratifiaient le retour de la Juventus dans la cour des grands. On oublie d’ailleurs souvent que Del Piero s’était illustré dès le match aller. Une frappe splendide qui concluait un une-deux avec Amauri, Casillas ne pouvant qu’observer la trajectoire parfaite du ballon. Au final, les Bianconeri s’imposent 2-1 et mettent fin à une série de cinq matchs sans victoires toutes compétitions confondues, débutant par là même une autre de sept succès consécutifs. Encore une fois, c’est Del Piero qui sort le grand jeu pour extraire son club d’une mauvaise passe.
Deux au retour
Les équipes se retrouvent deux semaines plus tard à Madrid. Le Real de Schuster contre la Juve de Ranieri. Une autre époque. Le futur entraîneur de Monaco ne déroge pas à son 4-4-2 composé avant tout d’hommes de devoir. Molinaro-Marchionni à droite, Chiellini-Nedvěd à gauche. Les duos de centraux sont Legrottaglie-Mellberg, puis Sissoko-Tiago un cran plus haut. Pour compléter le tout, capitaine Del Piero est associé à Amauri devant, et Manninger dans les bois en l’absence de Gigi Buffon. C’est pragmatique, c’est du Ranieri, et ça a souvent fonctionné. Bon, ce Real n’était pas un grand cru, mais cela n’enlève rien à la performance de la Vieille Dame qui tient tête à toute une tripotée de champions. En vrac : Raúl, Van Nistelrooy, Sneijder, Higuaín, Saviola, Van der Vaart, etc.
Sans oublier Fabio Cannavaro, véritable sparring-partner ce soir-là. Lui, la Juve, il s’était empressé de la quitter en juillet 2006, quand elle a été reléguée. Et il a payé la note ce soir-là, avec les intérêts. À la 17e, Marchionni remporte un duel face à Guti et sert Del Piero, qui s’avance et se joue facilement de l’opposition faiblarde de son ancien coéquipier. La frappe est millimétrée et dans le soupirail. Ça fait 1-0. À la 67e, Cannavaro, encore, commet une faute sur Sissoko. Casillas y met du sien en plaçant très mal son mur, un détail qui n’a pas échappé à Del Piero, lequel transforme tranquillement côté gardien. Et de deux. Un du gauche, un du droit, pas de jaloux. La messe est dite, et pas en latin.
Et une ovation
Le numéro 10 passe même tout proche d’un triplé avec une tentative qui vient lécher le poteau gauche du portier madrilène à la 87e. C’est le moment que Ranieri choisit pour le remplacer. Un grand classique pour offrir au protagoniste de la soirée les applaudissements de ses supporters. Seulement voilà, personne ne s’attend à ce que les 80 000 spectateurs se lèvent d’un seul homme. Del Piero répond par une révérence et se remémore ce moment, quelques années plus tard, lors d’une interview à Sky Sport : « C’était très spontané, j’ai fait comme le chef d’orchestre qui remercie son public. C’était un geste de respect suite à cet hommage qu’ils m’offraient. Cela m’a rempli de fierté. Je pense qu’avoir croisé souvent la route du Real a fait naître une certaine sympathie entre eux et moi. C’est un public qui a le palais fin et qui a vu passer les meilleurs joueurs dans son club. » Comme celui d’Old Trafford qui, quelques mois plus tôt en amical, lui avait rendu un hommage identique. Les vrais reconnaissent les vrais.
Par Valentin Pauluzzi