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La grosse empreinte carbone du football

Par Ugo Bocchi
5 minutes
La grosse empreinte carbone du football

Aujourd’hui, c’est l’ouverture de la COP21 au Bourget. L’occasion de faire le point sur la responsabilité de notre sport dans la dégradation de l’environnement.

150 km. Soit deux bonnes heures de route en Angleterre. Ou quatorze minutes d’avion. La différence n’est pas franchement importante en matière de temps perdu. Mais elle l’est en matière d’impact sur l’environnement. C’est une évidence. Et forcément, à quelques jours de l’ouverture d’un sommet sur le changement climatique, ça ne passe pas. Ce week-end, Arsène Wenger a même dû se justifier en conférence de presse d’avant-match : « Nous irons à Norwich en avion samedi soir, après avoir dîné ensemble au centre d’entraînement. Quand nous avons pris cette décision, il y avait des travaux prévus sur la route. Et parfois, l’accès y est difficile, donc nous avons décidé de prendre l’avion, ce que l’on ne fait pas souvent. D’habitude, on prend le train ou le bus. C’est une exception. » Surpris. Agacé. C’est peu dire que l’entraîneur des Gunners n’était pas préparé. Car il faut le dire : dans le milieu, on n’a pas vraiment l’habitude d’aborder la thématique écologique.

No man’s land

Il y a bien des fois où le sujet est posé sur la table. Par exemple pour la construction de nouveaux stades. À Nice, Bordeaux ou encore Lyon, les clubs se veulent rassurants. Gestion des déchets, récupération d’eau de pluie, panneaux solaires, pelouse hybride… Mais la construction d’un nouveau stade est bien trop souvent prise à la légère : « Un stade de foot, c’est des milliers de mètres cubes de béton, des quantités phénoménales d’énergie et de matières premières, analyse Pierre Galio, expert à l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). Et ça demande énormément d’énergie. Quand on construit un stade, il faut d’abord se poser la question de la fabrication : est-ce que j’en ai vraiment besoin ? » L’exemple le plus criant est le stade Léon-Bollée du Mans, aujourd’hui laissé à l’abandon.

En 2005, le Mans pense faire de vieux os en Ligue 1 et souhaite agrandir son stade. Seul problème : Léon-Bollée ne peut plus être agrandi. Le club prend alors la décision de construire un nouveau stade, la MMA Arena, qui est d’ailleurs le premier cas de « naming » en France. Sauf que plusieurs dizaines de millions d’euros et quelques années plus tard, Le Mans est rétrogradé de division en division à cause de problèmes financiers, et ne peut plus assumer le prix de la location. Ils jouent désormais dans un troisième stade, le Clos-Fleuri.

La question de l’Euro 2020

Autre problème : la localisation du stade. Pour Pierre Galio, c’est tout simplement primordial : « Les déplacements de supporters ont le plus gros impact sur l’environnement. Ça représente environ 80% de l’impact global du football sur l’effet de serre. Si vous construisez un stade à vingt bornes de la ville, et que vous n’avez pas prévu de transport autre que la voiture, c’est une catastrophe. » À Lyon, le Stade des Lumières a été construit à Décines-Charpieu, une commune de la métropole. Environ vingt minutes de route. Un projet qui ne pouvait donc s’établir sans un plan viable de transport des supporters. Depuis 2012, une nouvelle bretelle sur la ligne trois du tramway est en construction. C’est essentiel, mais encore faut-il convaincre les supporters de les utiliser.

Car pour les grosses soirées de l’OL, il est par exemple prévu de transporter 33 000 personnes, pour un stade dont la capacité peut monter jusqu’à 60 000 spectateurs. Preuve qu’une majorité de notre public est trop habitué à se déplacer par ses propres moyens et à contribuer à l’élargissement de l’empreinte carbone. Et ça a trop souvent été comme ça. La Coupe du monde en Afrique du Sud était une belle idée sur le papier, mais l’empreinte carbone de l’événement « a atteint 2,8 millions de tonnes-équivalent C02 (hors phases de qualification), soit neuf fois plus que celle organisée en Allemagne quatre ans plus tôt » détaille Didier Lehénaff, président de l’association SVPlanète. Tout de suite, l’Euro 2020, qui devrait se passer dans pas moins de treize villes européennes et autant de pays, ne semble pas être une si bonne idée.

Le prétexte COP21

Finalement, c’est toujours mieux que les surfeurs ou encore les tennismen : « Chacun de ces sportifs de niveau mondial émet 100 à 130 tonnes de C02 par an juste pour ses déplacements compétitifs, compare Didier Lehénaff. Par rapport aux footballeurs, c’est énorme (même en année de Coupe d’Europe ou du monde), car les footballeurs se déplacent moins souvent sur des vols longs courriers, et lorsque c’est le cas pour des grosses compétitions, ils restent plus longtemps sur place, donc ce n’est pas si marquant que ça. » Mais il y a tout de même un travail à faire. Sur la question des transports, donc, mais pas que. Les équipements, les maillots – « un sportif de haut niveau en consomme trop » –, les pelouses naturelles qui consomment trop d’eau, les ballons… Et ne pas forcément attendre la proximité temporelle de la COP21 pour s’interroger quant à l’utilité d’un voyage en avion d’un quart d’heure.

Mondial 2026 : coup de chaud sur le foot !

Par Ugo Bocchi

Didier Lehénaff et Sandrine Legendre : Un sport vert pour ma planète : 100 mesures concrètes pour bonifier l'impact écologique du sport et des sportifs (disponible auprès de SVPlanète)

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