- Coupe de la Ligue
- Interview Sébastien Callamand
« J’avais le même salaire en club et chez Renault Trucks »
Jour de match à Bourg-Péronnas. Après des années d'amateurisme, le club a retrouvé cette année la Ligue 2 et se prépare à défier l'OM pour le compte de la Coupe à moustache. L'occasion de revenir sur les dernières années du club avec Sébastien Callamand, gardien du temple.
À quand remonte ton histoire avec Bourg-Péronnas ?
Tu as connu le club bien avant qu’il ne rejoigne les divisions professionnelles. Comment décrirais-tu les changements depuis ?L’année où je monte en seniors, le club était relégué en CFA2, donc c’était vraiment amateur. Ça n’a plus rien à voir maintenant. On s’entraînait beaucoup moins, déjà pas le matin. Et puis surtout, beaucoup de joueurs travaillaient à côté, donc on ne faisait pas que jouer au foot. On s’entraînait tard le soir vers 18h, on enchaînait avec le boulot. C’était beaucoup plus dur physiquement que maintenant. Je travaillais pour Renault Trucks à l’époque, dans les bureaux. Je commençais le matin à 7h30 et je finissais à 16h30. J’avais souvent un coup de mou en mi-saison parce qu’à accumuler les deux, je fatiguais. Et puis au fur et à mesure des montées, on a été obligés pour la plupart d’arrêter nos métiers, donc c’est devenu plus simple pour récupérer.
À quel moment a eu lieu cette bascule ?En fait, j’étais en CDI dans une boîte de prestation basée à Lyon. Et Renault Trucks n’a plus eu besoin de nos services. Ma boîte de presta me proposait d’aller travailler à Lyon, sauf que je ne pouvais pas concilier les déplacements avec le foot. Donc j’ai arrêté, j’ai touché le chômage pendant un an en même temps que je jouais au foot. C’est l’année où on est montés en National, donc ça m’a permis de passer le cap, et après, j’ai pu bénéficier d’un contrat pro. Pour moi, tout s’est super bien passé. Et puis surtout, avoir une année où je ne devais que jouer au foot, voir comment ça se passait…
Et le fait de perdre un salaire a-t-il été compensé par les revenus du football ?Mes salaires étaient équivalents chez Renault Trucks et dans le club, donc pendant 3 ans, je touchais le même salaire au football et au boulot. Pendant 1 an, j’ai eu un petit différentiel du coup. Mais pour ma part, c’était uniquement du plaisir. Parce qu’au départ, faire les deux, c’était une obligation pour gagner ma vie. Mais là, gagner ma vie uniquement avec le foot, j’en profite à fond, je ne me prend plus la tête, c’est que du bonheur. Et puis il y a clairement bien pire dans la vie que ce qu’on fait.
Depuis 2012 à 2015, vous êtes passés de la CFA 2 à la Ligue 2. Comment expliquer la réussite de ce club ?En CFA, on avait une équipe qui, depuis 3 ans, ne bougeait pas beaucoup, où le coach faisait juste quelques retouches d’une saison à l’autre. Et puis la 3e année était la bonne, on était complets un peu partout. Derrière, on était solides, et devant, il y avait Julio Tavarès qui nous plantait pas mal de buts. Et on sait que pour monter, il faut quelqu’un qui marque beaucoup de buts. Ça nous a permis de monter en National et lui de partir à Dijon, où on connaît son histoire… Après, en National, on a du mal la première année, où on ne se maintient pas sportivement, mais grâce aux finances. Des clubs n’avaient pas les sous pour se maintenir (Sedan, ndlr), donc on reste grâce à ça. La deuxième année, on obtient un large maintien, 2 mois avant la fin il me semble. Et puis la 3e année, c’est toujours pareil, on n’a pas trop changé l’équipe, juste quelques retouches. Et on tombe sur Pape Sané qui arrivait en prêt de Niort et qui a marqué but sur but (21 sur la saison, ndlr). Derrière encore, on était costauds. D’autant que le 3-5-2 fonctionnait vraiment pas mal en National. Ça nous permet de monter en Ligue 2 et d’avoir ce parcours incroyable.
Parmi ces hommes qui ne bougent pas, il y a également Hervé Della Maggiore, votre coach …C’est vraiment un bon entraîneur, tactiquement il est vraiment pas mal. Après, il se base énormément sur des joueurs de la région, en ne changeant quasiment jamais d’effectif. Par exemple, de l’an passé à la Ligue 2, il n’y a que 2-3 joueurs qui ont changé. Il a ses hommes de base. La plupart des joueurs sont issus de la région Rhônes-Alpes. Mis à part les recrues qui sont d’ailleurs, la majorité des joueurs est du coin. Par exemple, je connaissais bien Jimmy Nirlo avant, il était en jeunes déjà à Bourg. Et la plupart des joueurs, c’est pareil. Donc il y a une réelle affinité entre nous, et ça nous aide.
Du coup, il doit y avoir quelques habitudes qui se sont forgées au fil du temps ?Dans le vestiaire, on se fait une petite table de ping-pong, où tous les joueurs se font un match avant les entraînements. Ça apporte un peu de convivialité, ça permet de créer des liens. Parfois, il y a des compétitions, ça se chambre pas mal.
Cette année, vous rejoignez le monde professionnel. Comment avez-vous appréhendé la Ligue 2 ?On a eu un peu de mal au début, sur les 3-4 premières journées, où on attendait beaucoup et on a un peu oublié de jouer. Je pense qu’on avait un peu peur de ce niveau-là. Mais au fil du temps, on s’est rendu compte qu’on pouvait avoir des résultats si on jouait. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui, on met beaucoup de buts, mais qu’on en encaisse énormément aussi. On ne se prend pas la tête, on arrive à gagner des matchs comme ça. En revanche, le niveau Ligue 2 est moins physique que le National. En National, c’était beaucoup de duels. En Ligue 2, c’est plus technique, les équipes nous attendent un peu plus. En revanche, ça ne ravit pas trop notre coach qui aimerait que l’on encaisse clairement moins de buts. Pour l’instant, c’est une voie qui nous sourit, mais il va falloir corriger ça si on veut se maintenir. On ne peut pas encaisser autant des buts et espérer autre chose.
Aujourd’hui, vous héritez d’une affiche de gala contre l’OM. Comment avez-vous accueilli ce tirage ?Je l’ai pris avec beaucoup de plaisir, car je suis supporter de l’OM depuis tout petit. C’est également une belle revanche, car on les a joués il y a 3 ans au Vélodrome, et j’étais déjà de la partie. Je n’avais pas fait un grand match, donc c’est une petite revanche à prendre ce soir. Au début de la rencontre, il y avait eu un centre aérien sur lequel j’avais hésité à sortir, et du coup, je suis entre deux. Et Brandão marque juste devant moi…
Brandão en plus…Oui (rires). Mais ils étaient en pleine bourre à l’époque, c’est le moment où ils jouaient le quart de finale de la Ligue des champions (contre le Bayern Munich, ndlr). Ils avaient mis la grosse équipe, justement pour se préparer pour cette rencontre européenne. On en avait fait les frais, même si on n’avait pas démérité en mettant un but (3-1). Mais on avait peur je pense, c’était au Vélodrome, donc on était un peu stressés par ce match. Même si ça m’a fait passer un peu à côté de mon match, c’était une joie énorme pour moi de jouer au Vélodrome, je n’aurais jamais pensé que ça arriverait.
Ce soir, le match se joue heureusement chez vous.Oui, et puis j’ai grandi, j’ai pris de l’expérience en National et ce début d’année de Ligue 2. Donc je vais l’appréhender d’une autre façon. Et on n’a plus rien à perdre maintenant, on a déjà fait un superbe parcours.
Que penses-tu de cette équipe qui alterne le bon et le moins bon ? Ils ont eu beaucoup de mal en début de saison, dû à leur changement de coach, ce changement d’effectif. Ce n’est pas évident pour eux, d’autant qu’ils n’arrivent pas derrière à trouver de la stabilité, à se mettre en place. Après, offensivement, ils commencent à se trouver de plus en plus facilement et ils font beaucoup de dégâts dans la défense. Après ce soir, si on veut faire quelque chose, il ne faudra pas les attendre, ne pas espérer faire un 0-0. Faudra faire notre jeu, et pourquoi pas se qualifier.
D’un point de vue personnel, tu as été relégué au rang de numéro 2 tôt dans la saison, mais tu profites actuellement de la blessure de Julien Fabri. Comment vivre cette situation de concurrence alors que tu as été habitué à la place de titulaire ?J’ai eu un peu de mal au début. Lors de mes premiers matchs en Ligue 2, mes prestations sont en dents de scie, je suis moins bon. Et puis Julien poussait vraiment derrière, avec de gros matchs en Coupe de la Ligue. Donc il a fait douter le coach, qui a décidé de le mettre en championnat. J’ai un peu accusé le coup par rapport à ça. Ça se passe un peu mieux pour moi maintenant, je retrouve peu à peu le niveau que j’avais l’année dernière en National. Je pense que c’était la crainte de ne pas avoir le niveau, de ne pas savoir où on met les pieds. Alors qu’en réalité, on voit qu’on a le niveau.
Justement, Julien Fabri est prêté par l’OM. T’a-t-il donné quelques conseils ?C’est vrai, mais on en n’a pas trop parlé en plus. Comme il est blessé, il s’entraîne en décalé. Et puis entre nous, il y a de la concurrence, donc on ne discute pas énormément non plus. On est amis, mais sans plus.
Vous accueillez l’OM dans votre stade Marcel-Verchère. J’imagine que c’est un événement local.Oui, ce sera à guichets fermés. En Coupe, le public est présent, mais en Ligue 2, il n’y a que 1500 personnes environ. Je ne sais pas pourquoi, ils ne viennent pas beaucoup pour le championnat, uniquement pour les grosses affiches. On pensait amener plus de monde à Verchère avec les montées, mais ce n’est pas trop ça pour l’instant…
Propos recueillis par Raphael Gaftarnik