- Espagne
- Départ d'Andrés Iniesta
Iniesta, de l’or dans son vin
Majestueux à l’image de son but en finale de Coupe du Roi contre le FC Séville ce week-end (5-0), Andrés Iniesta va laisser une trace indélébile dans les mémoires du Barça, et c’est tant mieux. Et la saison prochaine ? Don Andrés devrait partir pour la Chine afin d’y développer son vin familial. Une décision prise sans modération.
C’est un match qu’il faut qualifier de modèle du genre. Une partition proche de la perfection, faite de placements intelligents, de contrôles suaves, de courses légères et de passes dosées à souhait. Ajoutez à cela une sucrerie supplémentaire pour dribbler ce malheureux David Soria, et vous obtenez le but d’Andrés Iniesta, synthèse d’une carrière fabuleuse. Illustré par le « Thank you, and good night ! » aussi juste que révélateur du commentateur pour la télévision anglaise, Iniesta se branche en connexion divine à Madrid.
Au moment de voir son numéro affiché sur le panneau électrique du quatrième arbitre pour lui signifier son remplacement, Don Andrés dégrafe son brassard, serre la main de l’arbitre central, puis celles d’Ousmane Dembélé et de Gerard Piqué, enlace Lionel Messi pour lui donner le tissu du capitanat, puis tape dans la main de l’entrant Denis Suárez. Pendant ce temps-là, tout le Wanda Metropolitano acclame le génie. Peu après son arrivée sur le banc de touche, Iniesta contient ses larmes aux côtés de Marc-André ter Stegen. Ça y est, le moment de tirer sa révérence, aussi officieuse soit-elle, touche son cœur et celui de ses admirateurs.
« Mon fils va devoir prendre une décision difficile »
À vrai dire, l’enfant-lune n’est pas du genre à pleurer, mais plutôt à faire pleurer : son ancien coéquipier Xavi Hernández en incarne la preuve vivante. Interrogé sur les ondes de Radio Marca juste après la rencontre, José Antonio Iniesta, père de, concède à demi-mots le départ du fiston : « J’ai des larmes qui me viennent aux yeux quand j’écoute à nouveau cette ovation pour Andrés… Mon fils va devoir prendre une décision difficile. S’il choisit de quitter le club, il va falloir respecter cela. » Tout ce remue-ménage est clair comme de l’eau de roche : quel que soit l’endroit où Iniesta va terminer sa carrière de footballeur, son glorieux passé restera pour toujours ineffaçable. Sauf que l’eau de roche, Don Andrés souhaite en l’occurrence la transformer en vin. Un miracle ? Non, une simple affaire de famille issue de sa province, Albacete, et plus particulièrement de son village natal, Fuentealbilla. Une commune réputée pour ses salines datant de l’époque romaine, mais aussi pour sa production viticole.
Si le senior prend le pari que l’héritier va bientôt troquer son écusson du FC Barcelone contre un autre, c’est qu’il est bien placé pour s’exprimer. Propriétaire d’une bodega créée en 2010 – année décidément prospère pour la famille -, José Antonio possède aussi un solide slogan afin de voir son commerce s’étendre à vitesse éclair. En version française, cela donne « Bodega Iniesta : la passion se passe à l’intérieur » . Membre de l’entreprise et buteur décisif en finale du mondial sud-africain, Don Andrés devient ainsi un formidable outil de publicité à travers le globe. Et quand le monde s’ouvre, qu’il faut parler de politique de développement de son pinard, c’est surtout en Chine que les choses se passent. D’après une étude du Figaro, l’Empire du Milieu est devenu le premier consommateur de vin rouge devant la France en 2013, avec 1,395 milliard de bouteilles consommées dans l’année civile.
Gloire au vino manchego
Aujourd’hui, ce commerce chinois promet monts et merveilles : une étude Vinexpo de 2018 indique que d’ici cinq ans, la Chine deviendra le deuxième marché du vin en valeur derrière les États-Unis, leaders en la matière. En 2023, Andrés Iniesta Luján atteindra les 39 printemps. Comme tout bon commerçant qui se respecte, la bonne vente de ses cépages aura plus d’importance que les résultats économiques et sportifs du FC Barcelone. Parce que dans le fond, Iniesta est un homme comme les autres, souhaitant préserver la pérennité familiale avant tout. Alors voilà, le départ de la légende vivante blaugrana est acté.
Un accord serait même déjà trouvé entre le joueur et la direction culé pour plier ses affaires et quitter définitivement le complexe sportif du Barça le 30 juin prochain. Dans quel club chinois signera Don Andrés ? Personne n’est au courant excepté son proche entourage, lequel évoque aux médias des « clauses de confidentialité » . Comme des adolescents qui refusent de grandir, les fanatiques du numéro 8 barcelonais devront pourtant s’y faire : Andrés Iniesta et ses vins de La Mancha, principalement issus de cépages Bobal et Macabeu, vont bientôt s’exporter comme des petits pains aux quatre coins de la Chine, voire plus si affinités. Après tout, devenir vendeur de rouge quand on a déjà sublimé la Roja, ça se tient, non ?
Par Antoine Donnarieix