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Hugo Lloris, un patron à 123 sélections en équipe de France
En Bosnie, Hugo Lloris a fêté sa 123e apparition sous le maillot frappé du coq, devenant ainsi le deuxième joueur le plus capé de l'histoire de l'équipe de France aux côtés de Thierry Henry. Surtout, le capitaine des Bleus a profité de cette soirée symbolique pour rappeler qu'il était un gardien au talent immense, en plus d'un leader incontestable depuis le Mondial en Russie.
Dans un monde où les lignes de statistiques sont parfois devenues plus importantes que tout, Hugo Lloris est venu rappeler, une fois de plus, que les gardiens ont aussi le droit de briller. À Sarajevo, les buts n’ont pas plu comme dans un Mongolie-Japon, mais le portier des Bleus s’est chargé d’assurer le spectacle en signant un geste de très grande classe qui pourrait (presque) faire oublier le but victorieux d’Antoine Griezmann à l’heure de jeu. 26e minute : le corner de Miralem Pjanić est repris aux six mètres par Anel Ahmedhodžić, dont la tête piquée est destinée à faire trembler les filets et la France. Mais pas Hugo Lloris. Le champion du monde a répondu avec un arrêt réflexe exceptionnel de la main gauche, renvoyant peut-être les plus anciens à la parade historique de Gordon Banks devant Pelé au Mondial 1970. Trêve de comparaisons délicates : Lloris a fait du Lloris, permettant aux Bleus de ne pas courir après le score et rappelant qu’il était indiscutablement l’un des tauliers de cette équipe de France. Il fallait bien une petite merveille et un 56e clean sheet – record absolu, évidemment – pour fêter sa 123e cape sous le maillot tricolore.
À la poursuite de Thuram
Il n’y a pas besoin d’être dans la tête de Didier Deschamps pour savoir que le premier nom posé sur une feuille de match est celui d’Hugo Lloris (à égalité avec Antoine Griezmann, allez). Dans ce tunnel d’une semaine, les deux cadres de DD auront été les seuls à avoir été à chaque fois titulaires. Ce mercredi soir, en Bosnie, ils ont aussi chacun pu écrire leur grande histoire en équipe de France à leur manière : Griezmann a dépassé David Trezeguet au classement des meilleurs artilleurs tricolores (35 pions), Lloris a égalé les 123 apparitions de Thierry Henry, devenant le deuxième joueur le plus capé en Bleu aux côtés de l’ancien attaquant et derrière Lilian Thuram (142). « C’est une grande fierté, posait-il avant le déplacement du soir. Mais quand j’ai démarré le rassemblement, je ne pensais pas du tout à ces chiffres. J’étais davantage focalisé sur l’équipe et les résultats à faire. Quand on commence une carrière, il est difficile d’imaginer autant de matchs avec les Bleus. Je n’ai jamais couru après les records. Ils sont plutôt venus naturellement. » Reste qu’à 34 ans, Lloris enquille les records plus vite qu’il n’encaisse de buts, et compte déjà plus de 100 sélections en tant que capitaine, soit quasiment le double de… Didier Deschamps, deuxième dans cette catégorie.
La tournée du patron
Car la vraie révélation de ces dernières années, ce n’est pas le niveau de la muraille bleue, mais bien l’existence d’une âme de leader chez ce type discret. Lloris n’a pas la tronche d’un gueulard ni d’un ambianceur de vestiaire, et ça ne l’empêche pas de s’être imposé, tardivement, comme légitime pour enfiler le brassard en sélection. Le débat se posait avant le coup d’envoi de la Coupe du monde en Russie, l’ancien Niçois s’est occupé de convaincre les sceptiques tout au long de la compétition, au point que son énorme boulette en finale sera presque passée inaperçue. Qu’on le veuille ou non, ce gars-là est capitaine des Bleus depuis une décennie, et ce n’est pas pour rien. Surtout, c’est une valeur sûre pour Didier Deschamps, qui peut compter sur son capitaine pour aider à fédérer un groupe comme pour gérer sa communication devant les médias.
Comme son sélectionneur, Lloris est un homme de peu de mots et un grand amateur de poncifs en conférence de presse, même si un sourire et quelques phrases peuvent parfois suffire à faire passer un message. Exemple ce soir après le succès en Bosnie au micro de M6 : « C’était un peu laborieux, surtout en première période. On a eu du mal dans l’utilisation du ballon surtout, et ils nous mettaient en danger sur les contre-attaques, sur les coups de pied arrêtés également avec la qualité de Pjanić. Mais l’état d’esprit est remarquable. On a mal joué, mais on a gagné avec l’état d’esprit, c’est quelque chose sur lequel on peut s’appuyer. Ce n’est pas la première fois, mais il faut continuer à avancer, à essayer de s’améliorer parce qu’il y a des échéances importantes aux mois de juin et juillet. » Lloris parle le langage Deschamps à la perfection, porte peu d’attention aux chiffres, mais sait aussi une chose : en juin prochain, il participera à sa sixième compétition internationale (oui, il était là à Knysna) avec la même dalle qu’avant. Puis, il y aura la tentation d’une cerise sur le gâteau avec le Mondial 2022, au Qatar, avant que ne se pose la question de sa succession. La fin de route d’un homme qui a déjà sa place au panthéon du football français.
Par Clément Gavard