Message posté par Gérard Soler OfficielJe balance ici aussi ce que j'ai écrit sur le post de "Marchisio à Monaco", si ça vous dérange pas.
"Bon bon bon.
Juste pour exprimer un sentiment et un souhait.
Le sentiment, c'est de l'écoeurement. Le mercato m'écoeure, la primauté de l'argent (de masses phénoménales d'argent) sur le sport est tellement acté et entré dans les moeurs que je ressens le besoin de réaffirmer que ce n'est pas le football que j'aime.
Le marché des transferts - comme les autres marchés économiques et financiers - est devenu un monstre qui se nourrit lui-même. Je ne pourrais pas faire la liste de toutes les déviances qui s'y accumulent, mais quand on voit qu'une équipe comme Monaco "achète et vend" plusieurs dizaines de joueurs chaque année, pour n'en faire jouer qu'une infime partie, il me semble évident que ce marché s'est - comme les autres - déconnecté de sa réalité initiale : le jeu de football. Pour piqûre de rappel, je mets des guillemets à "achète et vend", mais je vous laisserai vérifier par vous-même que beaucoup de journalistes et d'acteurs du marché ne prennent même plus cette précaution, claironnant "on a vendu untel", alors qu'il ne s'agit que d'un contrat de travail lié à une personne qui a elle-même signé le contrat.
Comme je le disais, je ne vais pas lister toutes les pratiques répugnantes qui ont cours à cette occasion. Mais rien que de continuer à transférer après la période de transfert montre bien que les pseudo-règles ne sont que de la poudre aux yeux : l'important c'est que la thune circule.
Mais j'ai aussi un souhait, peut-être vain. Le souhait qu'enfin, comme dans d'autres domaines et comme dans le passé récent (avant Bretton Woods symboliquement), le marché soit encadré par des règles précises et contraignantes. Il faut pour cela que le regard des citoyens change, comme les clubs et leur grand souk aux joueurs ont changé : que les sociétés qui gèrent les clubs de football ne soient ni vues comme des sociétés vertueuses ou pas dangereuses (ben c'est que du foot non ?) ni comme des entités dont on ne peut pas réguler les activités abusives. Ces entreprises, si rien ne leur est imposé légalement, pousseront toujours plus loin la logique purement financière et l'abandon de l'aspect sportif, et aggraveront encore plus la manière dégradante avec laquelle sont traités les joueurs et les fans de foot.
C'est sur la brève de Monaco, parce qu'à tous ces motifs d'écoeurement, ce club ajoute des liens avec la mafia et du blanchiment. C'est pourtant un club que j'ai adoré, c'est celui de mon premier maillot de poussin en 79, mais là, la coupe est pleine.
Je ne commente jamais les transferts sur l'aspect financier, pour ceux qui ont lu mes autres comms. Là c'est l'occasion d'écrire pourquoi et à quel point la situation me rend malheureux pour ce sport qui n'en est plus un au niveau professionnel - si on ne fait rien ça peut même être pire."
Il n'y a rien de nouveau, juste ma prose fulgurante qui pourrait par son exceptionnelle pertinence lancer un mouvement mondial qui renverserait la FIFA et l'OMC et ferait de notre monde un paradis.
Le paradigme est tellement ancré j'ai l'impression que nous ne faisons que des petites poussettes, ridicules tentatives pour l'arracher aux sables mouvants.
Le foot n'a fait que suivre l'évolution borgne de nos sociétés capitalistes, certains trouvent que c'est une justification (quand ce n'est pas une excuse). Pour moi justement le football le devrait pas être un reflet de la société mais un modèle vers lequel tendre, comme la démocratie corinthiane en son temps.
Car d'une manière ou d'une autre les bonhommes en short ont toujours été nos modèles, et cela même si certains cyniques s'amusent à nier l'importance des figures de l'enfance que sont les footballeurs quand il s'agit de singer les adultes.
Certains croient venue l'heure de la "décroissance", du partage raisonné de notre planète, du changement. J'admire vraiment leur optimisme. Je suis pour ma part circonspect, quand je vois le nombre de maillots qu'arrive à écouler le Qatar, monarchie moyenageuse qui construit des stades climatisés dans les déserts.
Les gens ont des oeillères monumentales ; ils continuent à faire des gosses pour soulager leur narcissisme blessé, ou alors ils sont fous pour croire que l'empoisonnement de la planète est réversible. Ils n'ont que leur petit monde tranquille et se fichent bien de détruire la Terre qui est leur vraie maison. Tant qu'ils ont à bouffer, leur petite technologie plus récente que celle de leur voisin et de pauvres gamins sur qui projeter leurs frustrations enfouies.
Pour autant je n'arrive pas à décrocher du football, comme je salive devant un Big Mac. C'est difficile d'être raisonnable et c'est même un peu triste.