Et puisque Bobby me fait remarquer que je radote à propos de Maschio, quelques mots à propos d’un autre international argentin (une sélection en 1967, défaite 3-1 contre le Chili de Fouilloux) véritable légende du Racing Club, décédé le 30 mars dernier : Juan Carlos Cárdenas.
Le Racing des sixties n’a plus grand-chose à voir avec celui de Don Guillermo Stábile, équipe ultradominante de 1949 à 1951 grâce à des joueurs tels que Mario « El Atómico » Boyé, Tucho Méndez ou Rubén Bravo. Des carasucias 1957 issus du Racing, il ne reste alors que Maschio de retour après quelques années à profiter de la Dolce Vita. Angelillo est toujours en Italie malgré son mal du pays, bloqué par la peur de l’enfermement faute d’avoir honoré ses obligations militaires. Enfin « El Arlequín » Corbatta est parti découvrir l’aguardiente colombienne sans personne pour veiller sur lui.
Juan José Pizzuti, lui, est toujours présent. Tito est une légende du club, champion 1958 et 1961, homme clé de l’Argentine sacrée lors de la Copa America 1959. Entraineur de 1965 à 1969, il en fait « el equipo de José » tant ce Racing lui ressemble : domination physique, intelligence et dureté incarnées par l’exceptionnelle paire de défenseurs « El Mariscal » Perfumo - Coco Basile, créativité offensive avec le vieux Maschio et « El Chango » Cárdenas.
Cárdenas arrive à la Academia en 1962. Il a dix-sept ans. Il vient du Nord du pays. Valeur montante du championnat régional, sa réputation de goleador dépasse les frontières de l’état. Un observateur du Racing se rend chez ses parents au volant d’une Impala destinée à impressionner la famille, apparition rarissime dans les rues poussiéreuses de Santiago del Estero. Comment dire non au rêve ? Cárdenas part à mille kilomètres de chez lui. Corbatta le surnomme immédiatement « El Chango » (terme désignant ceux venant du Nord) et Tita, l’éternelle nounou des joueurs, le couve d’attentions comme tant d’autres avant lui.
« El Chango » s’impose à partir de 1964 et est un des hommes de base d’« el equipo de José » titré en Libertadores 1967 en étant positionné avant-centre ou inter gauche. Les principaux adversaires d’alors sont les voisins d’Independiente et surtout les pénibles d’Estudiantes. Les matches contre El Pincha de Zubeldía sont des parties de bravoure au cours desquels Cárdenas ne se défile pas.
Son heure de gloire survient contre le Celtic en Copa Intercontinental. Après la défaite à Hampden Park, il offre la victoire au Racing dans El Cilindro bourré à ras la gueule, cent-vingt-mille hinchas, bien plus que la capacité du stade. Le match d’appui a lieu au Centenario de Montevideo. Une rencontre âpre, violente qu’il éclaire d’une frappe surpuissante du gauche. Il est pour l’éternité l’homme de la première Intercontinental argentine.
https://www.clarin.com/img/2016/11/04/e … _720x0.jpg
« El Chango » est célèbre pour un autre événement survenu en août 1971 sur la pelouse de Rosario Central. Le Racing mène 2-1 quand l’arbitre accorde un pénalty aux Canallas. Le milieu international Landucci le frappe mais Rubén Guibaudo le stoppe. L’arbitre considère que le portier a trop anticipé et le fait retirer. Landucci se présente et tout se reproduit à l’identique : arrêt de Guibaudo que l’arbitre juge illégal. Mieux encore, l’homme en noir expulse le gardien du Racing. Contre l’avis de tous, c’est le petit « El Chango » qui se positionne dans les buts. Sans gants et dans un maillot beaucoup trop grand, il stoppe la tentative de Gramajo, Landucci ayant renoncé. Malgré les assauts de Central et sa petite taille, Juan Carlos Cárdenas préserve la victoire du Racing.
https://images.ole.com.ar/2022/03/31/Ev … 8772939355
https://pbs.twimg.com/media/Ef_UkJ8XoAA … me=900x900
Cardenas vient donc de partir et des vainqueurs du championnat 1966, de la Libertadores et de l’Intercontinental 1967, il ne reste qu’El Bocha Maschio, 89 ans, Coco Basile, 78 ans et Juan Carlos Rulli, 85 ans.