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Fabinho, le prisonnier souriant
Alors qu’il bénéficiait d’un bon de sortie oral de la part de ses dirigeants, Fabinho est resté en Principauté malgré son envie de rejoindre le PSG. Le Brésilien va donc entamer sa cinquième saison sur le Rocher et regarde, de loin, la sélection nationale se construire sans lui. On l’a décrit comme boudeur, dégoûté, triste, mais finalement cela montre surtout que les clubs ont encore le dernier mot. Et c’est tant mieux.
31 août, dernière ligne droite du mercato. Pendant que les directions parisiennes et monégasques échangent par visioconférence sur l’avenir de Fabinho, ce dernier est au Louis-II, où il dispute un amical contre Nîmes avec les joueurs de l’ASM qui ne sont pas en sélection. Là, au milieu de Raggi, Mboula, Carrillo et Meïté, il fait le boulot pendant plus d’une heure. Depuis quelques minutes, son avenir est scellé sans que lui ne soit consulté. Il ne bougera pas du Rocher pour rejoindre le PSG, son souhait le plus profond depuis que ses représentants avaient trouvé un accord salarial avec le club de la capitale. C’était fin juin, peu avant la reprise à La Turbie. À cette époque, Fabinho s’était même penché sur un logement parisien, persuadé que le bon de sortie oral donné par sa direction après quatre ans de bons et loyaux services suffisait. C’était compter sans l’absence d’envie de l’ASM de renforcer un concurrent direct. Sans parler de la personnalité du Brésilien, professionnel jusqu’au bout, mais qui a donné très jeune les clés de son avenir à Jorge Mendes. Il y a un peu de flou entre le joueur et ses agents. D’ailleurs, personne ne sait vraiment la somme déboursée par l’ASM pour racheter son contrat à Rio Ave en 2015. Bref.
Paris avait sans doute surestimé le pouvoir de l’agent portugais auprès de la direction russe. Dans le même temps, Kylian Mbappé, lui, a filé au PSG. Et Fabinho s’est posé des questions. Pourquoi pas lui ? Après tout, l’ASM possède des milieux capables de le suppléer, que ce soit João Moutinho, Tielemans, Meïté ou les cibles William Carvalho et Dedoncker. À un moment, l’histoire aurait pu basculer. Peut-être quand il a quitté, furieux, un entraînement après un accrochage trop appuyé avec un coéquipier. Là, sous le soleil de la Côte d’Azur, le joueur semblait déprimer. Il avait la tête ailleurs, mais jouait le jeu malgré tout, la preuve, il n’a jamais été sorti du groupe par Jardim. Au club, on partait du principe que tout rentrerait dans l’ordre une fois le mercato terminé. Depuis ce matin, la fenêtre est close.
4 ans de contrat, mine de rien
D’abord réticente à vendre au PSG, la direction monégasque a ensuite ouvert la porte aux négociations. Soit pour réellement vendre, soit pour gagner du temps. Un peu des deux, sans doute. Dans la dernière ligne droite, et sous la menace du fair-play financier, le PSG n’a pas voulu rejoindre la volonté monégasque qui souhaitait au moins 60 millions pour son milieu. Pressé par le temps, le PSG a jeté l’éponge. Et voilà Fabinho de retour à la case départ, lui le plus ancien pensionnaire du Rocher derrière Subašić et Raggi. Pourquoi est-il resté, au fond ? Parce que Fabinho n’a pas le même entourage ni le même caractère que ceux qui sont partis. En gros, il a traversé ce mercato sans donner l’impression d’être réellement affecté. Pour un entraîneur, c’est du pain béni. Alors oui, il a connu un petit coup de spleen au début du mois d’août, mais il n’est jamais sorti de sa réserve. Un peu à Dijon, en zone mixte, où il a simplement dit que « les dirigeants connaissaient son envie » . Rien de plus. Pas de vague ensuite. Comme l’an dernier où l’ASM lui avait demandé de renoncer aux JO de Rio pour aider le club à franchir les barrages de la Ligue des champions. Dans la foulée, son repositionnement tactique au milieu de terrain lui a ouvert les bras d’une saison fantastique tout en lui refermant les portes de la sélection nationale, où il n’a plus mis les pieds depuis plus d’un an.
Doit-on plaindre Fabinho ? Loin de là. Après tout, il est titulaire indiscutable dans un club ambitieux, nanti d’un bon contrat qui court encore jusqu’en 2021. Un contrat qu’il a prolongé à l’automne dernier sans que personne ne lui force la main d’ailleurs. C’est un peu le message de Leonardo Jardim, courant août, quand il évoquait la manière dont le duo Mabppé-Fabinho appréhendait cette période de transferts. « Fabinho, c’est une autre mentalité par rapport à Mbappé. Ce n’est pas le premier mercato où on parle de lui, il gère bien cette musique, ça parle beaucoup et après c’est fini. Je comprends toutes les choses, mais il faut faire attention : quand un joueur arrive, il peut accepter ou refuser un contrat. Après, quand il a signé, ce n’est pas pour dire ensuite que le contrat n’est plus valable, car il est arrivé à un autre niveau. » Dans cette histoire, il ressort finalement l’idée que, de temps en temps, il est bon de rappeler aux joueurs qu’un club n’est pas seulement une machine à verser des salaires. C’est aussi des droits, des obligations, un respect et surtout un décideur au-dessus des envies des uns et des autres. En début de mercato, Vadim Vasilyev avait annoncé que Thomas Lemar et Fabinho ne quitteraient pas le Rocher cet été. Malgré des offres XXL et des envies de départ, les deux joueurs sont toujours monégasques. Et c’est une bonne chose de voir qu’il existe encore des clubs où la direction a le dernier mot.
Par Mathieu Faure