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Documentaire Netflix : Nicolas Anelka, réconciliation forcée

Par Valentin Lutz
6 minutes
Documentaire Netflix : Nicolas Anelka, réconciliation forcée

Annoncé en grande pompe par Netflix ces dernières semaines, le documentaire Anelka, l'incompris est disponible depuis mercredi sur la plateforme américaine. Réalisé par un proche du néo-retraité, Franck Nataf, il tente de dévoiler de nouvelles facettes de l'ancien international français et de dissiper quelques zones d'ombre... de manière forcément partisane. Pari pas franchement réussi.

« Tout ce que j’ai fait, ne le fais pas, parce que tu vas te mettre tout le monde à dos. […] Et si tu veux me ressembler, sois prêt. » Les premières secondes, tapageuses, donnent le ton : Nicolas Anelka n’est pas là pour rigoler. L’ancien international français (69 sélections, 14 buts) a en effet promis de se livrer dans un nouveau documentaire, annoncé en grande pompe par Netflix et disponible depuis mercredi sur la plateforme américaine. Porté par un casting à en faire pâlir Hollywood, dans lequel figurent notamment Omar Sy, Thierry Henry ou Patrice Évra, le film réalisé par un proche d’Anelka, Franck Nataf – aidé éditorialement par un autre proche, le journaliste Arnaud Ramsay, qui a accès au joueur, dont il a écrit une biographie par le passé, depuis ses débuts -, ne cache pas ses intentions. Quasi-film de communication plus que documentaire journalistique donc, Anelka, l’incompris ne cherche rien de moins qu’à enfin résoudre le problème qui revient comme un leitmotiv, quitte à verser dans le partial et le monologue : « Ce que les gens pensent d’Anelka ne correspond pas à Nicolas » . Mais alors, que vaut vraiment Anelka, l’incompris ?

« Tu n’as pas à être jugé par les gens »

Il y a dans le film un postulat simple qui se résume en une énumération : l’incompris, le mal-aimé, le méconnu. Pour dissiper cette zone d’ombre, deux questions sont posées : mais pourquoi donc Anelka est-il incompris ? Et s’il l’est, qui est-il vraiment ? La production Netflix donne des réponses plutôt convaincantes à la première, en montrant qu’Anelka s’est progressivement coupé du monde, déçu par ses excès. De fait, Anelka est présenté avec beaucoup de lieux communs comme un homme pudique et discret, qui ne se sent pas à l’aise dans un milieu où la vérité n’est pas bonne à dire mais les expressions bonnes à montrer. De même, le « milieu » ne se serait jamais fait à Anelka. Ni à sa famille, qui a été « la première à défier le football français » , quitte à subir des préjugés. « Quand c’est des mecs de banlieue [qui s’occupent d’un joueur], c’est un clan, une secte » , regrette Anelka. Rien de surprenant, donc, à ce que les relations se soient pourries dès le début avec les médias, présentés comme un bloc anti-Anelka. À Madrid, par exemple, Marca avait frappé sous la ceinture. « Alors que je n’avais pas encore marqué un but en championnat, ils m’avaient demandé de jouer à FIFA et j’avais marqué, raconte le Che. Le lendemain, ils ont titré « Anelka marque son premier but ». Très bien, vous n’aurez plus rien. »

Le film peine en revanche à répondre à la deuxième question, puisqu’il échoue précisément à percer la carapace. Pourtant, on suit le jeune retraité partout : dans la chambre de ses enfants au moment de les réveiller au matin, sur les plages choyées de la Martinique et même dans les rues populaires de Shanghaï, où il s’affiche dans un side-car lunaire. Mais tout se limite à un exercice de style, à une note d’intention restée sans suite. Car à part ça, rien, car Anelka ne parle jamais de lui, peut-être car il mise sur un jugement venu d’ailleurs. « J’essaye de passer inaperçu, confie-t-il. Je me dis qu’il y a un dieu sur terre et que si tu fais des choses bien, tu seras récompensé. Tu n’as pas à être jugé par les gens. » C’est donc peut-être une assertion anodine qui résume le mieux le spécimen : « C’est à la fin de ta carrière que tu réalises ce que tu as fait, tance Anelka. Soit tu es fier, soit tu te dis que tu as fait la victime pendant vingt ans » . Pour lui, la fierté ne se formule pas en termes de trophées, et il suffit pour s’en convaincre de regarder avec quelle désinvolture le natif de Trappes entrepose sa Ligue des champions, cernée par des cartons sur une étagère poussiéreuse. Réussir, c’est être indomptable et indompté, et ce n’est donc qu’en filigrane que le documentaire donne à voir l’ex-joueur, à travers les frasques que le « Che » a enfilé comme les couleurs sur un collier de perle.

« Tiens, prends-là où je pense »

La conséquence d’une telle méthode est directe : Anelka n’a pas voulu tout dire et Nataf n’a pas voulu pousser, de sorte qu’on n’apprend pas grand-chose sur le fondateur de l’éphémère marque 39Pro. Les deux grandes polémiques qui ont créé le cas Anelka, ne sont par exemple pas traités autrement que sous le prisme du principe intéressé, qui plus est avare de précisions. A propos de la quenelle, Anelka garantie qu’il ne s’agissait que d’une réponse à son ancien entraîneur à West Brom, Steve Clark. « Lors du premier match de championnat, Clark m’avait sorti à dix minutes de la fin : c’était un manque de respect, donc j’avais arrêté de lui parler, raisonne Anelka. Le match qui a suivi son départ, je reviens dans l’équipe, je marque et je fais la quenelle : tiens, prends-la où je pense. » Quant au fameux épisode de Knysna, Anelka reste peu prolixe en explications, ne donne pas les paroles lancées à King Raymond (mais des photos de sa chambre, plutôt bordélique) et se contente de dévoiler qu’il avait envisagé de quitter le groupe dès la préparation. « Je ne sentais pas le truc, affirme-t-il. On jouait mal, je ne touchais aucun ballon et la frustration était énorme. Quand le coach a sorti mon nom à la mi-temps du match face au Mexique, je ne l’ai pas admis car cela sous-entendait que j’étais le seul fautif, presque l’ennemi public numéro un. J’ai senti une agression. C’est une très grosse erreur. »

Bref, puisqu’il se satisfait de peu, le film laisse parfois entrevoir une vérité contraire à celle qu’il voudrait montrer et qui consisterait à présenter Anelka comme la victime d’un malentendu, voire d’un complot. Au contraire, c’est une carrière enterrée par des conflits partis de rien qui se dévoile. A l’origine de la brouille avec Santini, par exemple, une parole mal placée. « Il est venu m’observer et il m’a dit qu’il ne me connaissait pas, rumine Anelka. Tu n’as pas le droit de dire ça. Lorsqu’il a essayé de me rappeler, je lui ai dit « ouais, laisse-moi tranquille ». » A l’origine de son clash avec le Real, une réponse mal passée. « Le coach m’avait mis sur le banc, donc j’ai demandé une discussion avant l’entraînement, et on m’a dit que ce serait après, raconte-t-il. Je me dis : vous avez mal réagi, donc je vais mal réagir aussi : clash ! » C’est ça aussi Anelka, un type au talent fou, béni par les dieux, capable de gâcher sa carrière pour rester insoumis, maître de lui-même et de son destin. Anelka l’incompris ne l’est pas beaucoup moins qu’auparavant, et qu’en penser est un exercice toujours aussi difficile. C’est Robert Pirès qui paradoxalement, résume le mieux le cas car son soupir laisse tout entendre, l’admiration, l’amitié ou le regret : « Ah Nico putain… » , souffle-t-il. Tout est dit.

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