- France
- Valenciennes
Debuchy : « Ce qui arrive à Saint-Étienne, je l’avais senti venir »
Huit années se sont écoulées depuis son départ. Mais ça y est : Mathieu Debuchy est de retour dans le Nord, sa terre natale et celle de ses débuts professionnels, sous le maillot lillois. À la sortie de l’entraînement, le néo-Valenciennois ébruite les secrets de sa longévité, son rôle d'« ancien » du vestiaire, mais pose aussi son regard sur le poste de piston droit et les galères de Saint-Étienne. Avec la même efficacité que celle dont l'ex-international français fait preuve quand il s'agit de tenir son couloir.
Tu as quitté Saint-Étienne à l’issue de ton contrat, le 30 juin dernier. Est-ce toi qui as souhaité ne pas prolonger ?Non. Peu avant la fin de mon contrat, j’ai eu un rendez-vous avec le coach, le président et le directeur général de Sainté. Ils m’ont annoncé que mon contrat ne serait pas prolongé. Moi, ça m’aurait pourtant plu de pouvoir pousser encore un an, même si on avait vécu quelques moments pénibles. En plus, on avait dû passer une saison entière avec un Chaudron vide. J’aurais vraiment aimé retrouver le public stéphanois.
Aucun club de L1 ne t’a sollicité ?Si, j’ai échangé avec un représentant de Troyes. On a pas mal discuté, il y a eu une proposition de contrat, mais, quelques semaines plus tard, leur offre a été retirée. C’est mon agent qui me l’a dit, je n’ai jamais eu le moindre retour de la part de l’ESTAC. J’ai trouvé ça un peu… spécial. Mais je ne suis plus surpris par le milieu du football.
Et comment t’es-tu retrouvé à Valenciennes ?Après avoir quitté Saint-Étienne, je suis parti en vacances. Ça a duré plus de temps que je ne le pensais. Puis Valenciennes est venu vers moi. J’ai eu l’entraîneur au téléphone, et ensuite le président. On s’est vus. J’ai visité les installations du club, qui sont de niveau Ligue 1. Il y a un stade magnifique, un public fidèle. Et c’est dans le Nord, là où vivent ma femme et mes enfants.
[MERCATO] Mathieu Debuchy au VAFC !L’expérimenté latéral droit s’est engagé pour deux années (+1 en option) avec VA !Bienvenue Mathieu ! pic.twitter.com/H3CDUR1PNB
— Valenciennes FC (@VAFC) August 13, 2021
Tu veux dire que ta famille était restée dans le Nord pendant que tu étais à Saint-Étienne ?C’est ça. Ce n’était pas évident à gérer. Ma femme s’est occupée des enfants, elle a été très forte. Moi, j’étais seul à Sainté. C’est sûr que j’ai pu me consacrer au foot, penser ballon du matin au soir. Mais la vie de famille me manquait, c’était dur de ne pas les voir au quotidien. Aujourd’hui, je suis avec eux, ça va mieux !
Pour le moment, on a un peu de mal à se faire un avis sur le potentiel réel de ce VAFC, qui souffle le chaud et le froid depuis le début de la saison… Cette irrégularité, c’est vraiment notre gros problème. On a 2-3 matchs difficiles, puis on réussit 2-3 matchs plus convaincants et, au moment où il faut gagner à domicile pour basculer dans la bonne partie du classement, on retombe, comme face à Dunkerque (1-3). On n’arrive pas à enchaîner les matchs costauds. Et encore moins à la maison, alors que c’est justement là qu’on doit briller si on veut prétendre à une vraie place dans ce championnat. Il va falloir réagir rapidement.
Elle se trouve où, d’ailleurs, la « vraie place » de Valenciennes ?Dans le haut du classement. Ici, tout est réuni pour jouer la montée. Malheureusement, les résultats ne suivent pas et on ne peut pas prétendre à ce genre d’objectifs en enchaînant des matchs aussi mauvais.
Du haut de tes 36 ans, tu es le doyen de l’effectif. Quel est ton rôle dans le vestiaire, notamment vis-à-vis des jeunes ? Déjà, c’est d’être performant, de donner l’exemple en travaillant dur. C’est aussi d’accompagner ces jeunes, d’être à leur écoute, leur donner des conseils. Mais attention, même si j’ai 36 ans, je ne suis pas venu en préretraite. J’ai signé deux ans, plus une année en cas de montée. Et j’espère bien qu’on y arrivera.
C’est assez rare d’avoir une telle longévité pour un latéral… C’est vrai qu’on n’est pas beaucoup de trentenaires à évoluer à ce poste-là. Jouer latéral, ça implique de répéter de longues courses, qui sont éprouvantes pour les muscles. En général, les latéraux finissent par repiquer dans l’axe, pour se retrouver en défense centrale.
Toi, comment fais-tu pour tenir ?Franchement, je n’ai pas de secret. J’ai une hygiène de vie qui tient la route, je fais attention à tous les détails, même les plus petits. Et en dehors du terrain, je mets tout en œuvre pour récupérer du mieux possible. Je prends soin de mon corps, tout simplement.
Est-ce que tu as dû modifier certaines choses par rapport à ce que tu faisais il y a cinq ans, dix ans ?Oui, à l’entraînement surtout. J’aborde les séances différemment, j’essaie de gérer au mieux pour être prêt le week-end. Quand j’étais plus jeune, je n’avais pas besoin de calculer les efforts. Là, si je sens que je suis moins bien, je fais gaffe.
À VA, on te voit jouer piston droit. C’est un poste que tu avais rarement occupé auparavant durant dans ta carrière…De mémoire, j’ai dû jouer deux fois à ce poste-là avec Arsenal, et pas plus avec Sainté, où je me retrouvais parfois défenseur axial droit. Jouer piston, c’est tout sauf évident. On doit à la fois attaquer et défendre beaucoup. Mais mon expérience doit me permettre de m’adapter rapidement. Au fond, c’est un poste que j’apprécie.
Concrètement, qu’est-ce que ça change pour toi ?Il y a quelques similitudes avec le poste d’arrière droit classique, mais ça nécessite quand même pas mal d’ajustements. Il faut veiller à ne pas être dos au jeu, réussir à se mettre dans les bons espaces, combiner différemment avec tes coéquipiers. La relation avec l’arrière central droit est particulièrement importante, parce que c’est lui qui est censé te guider.
À quel moment de ta carrière, tu t’es dit : « Ça y est, je suis devenu un vieux » ? (Rires.) À Saint-Étienne ! En arrivant, Claude Puel a ramené beaucoup de jeunes joueurs. À la fin des séances, en entendant leur musique, en écoutant leurs conversations, j’ai compris que j’avais basculé de l’autre côté. Dans la manière de parler, dans les façons de faire, j’avais même parfois l’impression de voir mes enfants dans le vestiaire ! Ça fait tout drôle.
L’AS Saint-Étienne, justement, vit un début de saison très compliqué. Avais-tu observé des signes avant-coureurs, toi qui étais encore le capitaine des Verts il y a quelques mois ?(Il soupire…) J’espérais me tromper, mais je te réponds honnêtement : oui, je l’avais senti venir.
Pourquoi ?Quand ça ne va pas, il faut changer des choses. Mais là, ils n’ont presque rien changé et sont sur la continuité de la saison dernière, qui était déjà difficile. Financièrement, la situation est aussi très délicate. Malgré tout, je sais qu’il y a de la qualité dans cette équipe, même si ça a du mal à prendre. J’espère qu’ils vont pouvoir sortir la tête de l’eau.
La stratégie de Claude Puel a été de miser à fond sur l’émergence des jeunes, quitte à mettre de côté plusieurs joueurs d’expérience. A-t-il poussé le curseur un peu trop loin ?C’est sa philosophie. Il l’a fait dans tous les clubs dans lesquels il est passé. Je le sais bien, parce que c’est lui qui m’a lancé à Lille. Ça a peut-être été trop rapide à Sainté, car ils étaient nombreux à découvrir la Ligue 1. C’est bien, mais il faut réussir à trouver un équilibre entre jeunesse et expérience.
Tu as souvent clamé ton souhait de finir ta carrière à Lille. Est-ce que c’est toujours d’actualité ?Non, plus du tout. Maintenant, Lille est dans une logique complètement différente. Il y a quelques années, ça m’aurait vraiment botté de pouvoir boucler la boucle au LOSC. Mais pourquoi pas revenir plus tard, avec un autre rôle à jouer au club…
Tu envisages une reconversion comme entraîneur ou dirigeant ?On verra bien. (Sourire.)
John en chie.
Propos recueillis par Raphaël Brosse
Tous propos recueillis par RB.