- Ligue 1
- J3
- Lille-Saint-Étienne (3-0)
Victor Osimhen n’a pas le temps
Face à Nantes puis Saint-Étienne, Victor Osimhen a impressionné avec deux doublés très bien exécutés. À 20 ans, le Nigérian affiche quelques belles promesses et une volonté de tout faire à fond.
Un long ballon, un raté de la défense, un affût, un contrôle un peu long, mais une grosse course pour le rattraper et une frappe croisée au fond des filets : ça, c’est le premier but de Victor Osimhen en Ligue 1, contre Nantes, après 19 minutes de jeu dans notre championnat. C’est aussi le schéma du but le plus rapide de l’histoire de la Jupiler League, inscrit au bout de neuf petites secondes. C’était contre Anvers, en mai dernier. Et bien sûr, il a été inscrit par un gamin de 20 printemps aux cheveux blonds. Car Victor Osimhen n’a tout simplement pas le temps.
Le phénOsimhen
Pas le temps pour les vacances : après la CAN cet été, le Nigérian ne prend qu’une semaine de vacances pour pouvoir débuter avec son nouveau club. Pas le temps pour les automatismes : cinq jours, six entraînements collectifs et, donc, moins de vingt minutes de match précèdent son premier pion lillois. Pas le temps pour être adolescent : Soulier d’or du Mondial U17 en 2015 au Chili (dix buts en sept matchs), il enchaîne avec la CAN U23 moins de trois semaines plus tard. Au bout, deux trophées pour le Super Aiglon et un nom qui commence à tourner en Europe.
C’est Wolfsburg qui emporte le morceau d’1,83m en janvier 2017. Plus jeune Africain et seul Nigérian de Bundesliga, Osimhen découvre un nouvel environnement. L’éloignement du cadre familial ? « Je n’ai pas à être nerveux ou intrigué, répond le jeune majeur à la Deutsche Welle. Je dois seulement faire face. » Mais s’il est couvé par Josuha Guilavogui, il doit aussi se frotter à la concurrence de Bas Dost, Mario Gómez ou Divock Origi chez les Loups. La marche depuis la bien-nommée Ultimate Strikers Academy, son club à Lagos, est trop haute. Pour la première fois, Osimhen doit apprendre la patience.
De Peter Odemwingie à Nolan Roux
Problème, la patience ne fait pas partie des valeurs inculquées. Ainsi, son grand frère lui conseille de « revenir faire (son) boulot » pendant la semaine passée auprès de son père malade, cet été. De toute façon, à l’attente, Victor Osimhen préfère la douleur. C’est ce qu’il raconte au magazine Sport Magazine en mai dernier, alors qu’il s’apprête à péter un record, puis à terminer une saison à 20 buts et cinq passes en 36 matchs avec les Zèbres de Charleroi : « J’essaie toujours d’aller jusqu’à la limite, jusqu’au point où la fatigue manque de me faire tomber. Si je ne fais pas ça, si je n’appuie pas à fond sur l’accélérateur, c’est comme si je n’étais pas dans le match. » Et de conclure par un leitmotiv : « Plus tu marques des buts, plus ta vie s’améliore. » Direct, comme son jeu.
Son jeu ? Des appels, du combat, un sens du placement et du but. Sa gestuelle et ses deux doublés en trois sorties ne disent que ça : Osimhen est un finisseur. Galtier aussi quand, après la victoire contre Saint-Étienne, il prend soin de préciser : « Je ne cherche pas à faire le même jeu que l’an passé, on a des joueurs avec des profils différents. » Un profil dont se souviendra désormais Nicolas Pallois, qui avouait après l’avoir joué en ouverture : « Pour être honnête, je ne savais pas comment il s’appelait. » Ou peut-être oubliera-t-il rapidement un joueur à la réussite aussi éclatante qu’éphémère. On ne peut pas écarter l’hypothèse. Certes, Osimhen se verrait bien mettre ses pas dans ceux d’Odemwingie ou Enyeama à Lille. Mais n’oublions pas qu’avant Super Victor, le dernier à avoir inscrit un doublé pour sa première sous le maillot nordiste s’appelait Nolan Roux.
Par Eric Carpentier