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Comment je suis tombé amoureux de… León, Évrard, Mead (épisode 16)

Par Quentin Ballue, Anna Carreau et Gabriel Joly
8 minutes
Comment je suis tombé amoureux de… León, Évrard, Mead (épisode 16)

Parfois, il suffit d'une action pour tomber amoureux d'une joueuse. En voilà trois qui ont fait battre la chamade à nos petits cœurs pendant cette phase de poules de l'Euro 2022 : l'Espagnole Mapi León, la Belge Nicky Evrard et l'Anglaise Beth Mead.

Mapi León

L’action qui nous a fait succomber Non, la Bretagne n’a pas le monopole de la galette. L’Espagne se débrouille plutôt bien en la matière, la preuve avec Mapi León. La centrale de la Roja a régalé lors de la première journée face à la Finlande (4-1). À la 41e minute, son délicieux pied gauche a magnifiquement déposé le ballon au point de penalty pour trouver la tête d’Aitana Bonmati. D’humeur généreuse, la numéro 16 a sorti un autre galette du four à un quart d’heure de la fin en bottant un coup franc, cette fois destiné à Lucía García. Deux caviars qui la placent juste derrière Beth Mead, Kosovare Asllani et Fran Kirby au classement des passeuses.

Pourquoi elle est si captivanteDéfenseuse remarquable (26 ballons grattés depuis le début de l’Euro, seule Lia Wälti fait mieux), Mapi León est avant tout, à 27 ans, une formidable footballeuse, capable de faire rugir un Camp Nou de 91 533 personnes en inscrivant un golazo dans le Clásico. Surtout, l’Aragonaise ne fait pas les choses comme tout le monde, et ne s’embarrasse pas de ce que peuvent penser les autres. Passionnée de dessin et de tatouage, elle a posé elle-même l’aiguille sur son bras gauche. « Le premier que j’ai fait, je ne l’ai pas très bien réussi, mais peu importe, confiait à El Pais celle qui a refusé une école d’art pour se concentrer sur le football. Beaucoup de gens me disent de m’entraîner sur une peau de porc… Mais je m’en fous, c’est mon corps. » Et quand il s’agit de faire bouger les lignes contre l’homophobie, León est encore là. En 2018, elle a ouvertement critiqué le choix d’organiser le Mondial en Russie, où les droits LGBT sont très limités, après avoir fait son coming out. Si certains n’étaient pas au courant, ils ont pu s’en rendre compte samedi lorsqu’elle a embrassé Ingrid Engen à la sortie du stade. Who run the world ?

Et elle vient d’où ?Après le volley-ball et le futsal, la jeune María Pilar, fan de Ronaldinho, se met au foot au poste d’ailière et gravit les échelons au sein du Prainsa Zaragoza, en reculant progressivement sur le terrain. Lancée dans le bain de la Primera División à 16 ans, elle file ensuite à l’Espanyol puis à l’Atlético, où elle explose. Cadre de l’équipe qui remporte la Copa de la Reina en 2016, elle honore sa première cape avec la Roja dans la foulée, à 21 ans, et soulève la Liga Iberdrola la saison suivante. Le FC Barcelone débourse alors 50 000 euros pour l’arracher à l’Atléti. Joli coup si l’on en croit le palmarès que la partenaire d’Irene Paredes s’est forgé en Catalogne – trois championnats, une Ligue des champions, trois Coupes de la Reine et deux Supercoupes d’Espagne.


Nicky Evrard

L’action qui nous a fait chavirer « Encore un penalty et encore une fois je l’ai arrêté », rigolait Nicky Evrard après le bon match des Belges contre la France (2-1) durant lequel elle a stoppé la tentative de Wendie Renard. Encore, oui, car elle n’en était pas à son coup d’essai. Déjà contre l’Islande, la gardienne des Red Flames avait sorti le grand jeu en bloquant la frappe de Berglind Björg Þorvaldsdóttir. Une réussite insolente avec un détail qui tue. « Je sais que ce sont des trucs bizarres, mais avant chaque rencontre, j’ai l’habitude de mettre de la vaseline sur mes gants et d’en tapisser le pied des poteaux de mon but. Je l’ai encore fait et à l’évidence, ça m’a porté chance », a déclaré la portière aux 54 sélections à la RTBF. Ce rituel, elle l’effectue depuis une rencontre des éliminatoires au prochain Mondial contre le Kosovo en octobre dernier. Ce jour-là, la portière de 27 ans était allée chercher deux penaltys au ras de son montant droit, enduit de vaseline pour l’occasion. Une technique visiblement bien huilée.

Pourquoi elle est si craquanteParce que c’est une revancharde. Si les Belges sont en quarts de finale, c’est en grande partie grâce à Nicky Evrard. Au-delà des penaltys stoppés, elle a surtout évité deux valises. Une manière d’acter définitivement son retour en grâce alors qu’elle avait un temps perdu sa place de titulaire en sélection. Mais depuis que sa concurrente Justine Odeurs a annoncé sa retraite internationale à 24 ans, Evrard a été plus que décisive. Lors de la finale de la Pinatar Cup contre les Russes fin février, elle a préservé le 0-0 avant de marquer et de réaliser deux arrêts décisifs lors de la séance de tirs au but victorieuse. Et au vu de la capacité des Flames à parker le bus, sa présence dans les buts devrait être d’une grande aide si les prochaines échéances se jouent aux penaltys. La Suède est prévenue.

Et elle vient d’où ?Flamande comme l’énorme majorité de ses comparses de sélection, Evrard s’est imposée à La Gantoise après ses premiers ballons tapés dans les équipes mixtes du Racing Strijpen et au SK Munkzwalm. Son départ au FC Twente a été vécu comme un déchirement chez les Buffalos. Après un titre de champion des Pays-Bas glané en 2019, Evrard pensait ensuite aller s’éclater en Espagne. Mais le Sporting Huelva en a décidé autrement, lui faisant miroiter un contrat pro dont elle n’a jamais vu la couleur. Au bout de six mois à dormir sur un matelas à même le sol, elle est donc retournée dans sa Belgique natale : à La Gantoise, sa bonne étoile de toujours. Une cure de jouvence bienvenue pour la portière qui a brillé au point de conclure un accord avec l’OH Louvain cet été. Elle gardera tout de même une attache bien particulière à Gand, puisque depuis 2020, elle a lancé son entreprise de location de châteaux gonflables. Pas du genre à se dégonfler, la Nicky !


Beth Mead

L’action qui nous a fait fondreRéveiller tout Old Trafford et permettre de relancer l’insupportable « It’s coming home » des supporters anglais était une mission pas si compliquée pour Beth Mead. La très remuante numéro 7 des Lionnes n’a eu besoin que de seize petites minutes pour ouvrir le score lors du match d’ouverture de son Euro, enfinn celui de l’Angleterre au moment où elle marque. La talentueuse ailière d’Arsenal qui s’était projetée entre les deux défenseuses centrales autrichiennes enchaîne un beau contrôle de la poitrine – lob par-dessus la gardienne adverse. Un but symbolique, qui permet de libérer toute la nation anglaise et sa peur bleue des grandes compétitions à domicile. Elle ne le sait pas encore, mais elle va inscrire quatre autres buts en phase de poules, dont un sublime messiesque lors de la victoire 8-0 de l’Angleterre face à la Norvège, où elle inscrit un triplé.

Pourquoi elle est si excitanteParce qu’en plus d’être la meilleure buteuse de cette phase de poules de l’Euro avec cinq buts et deux passes décisives, elle est aussi celle qui célèbre comme une malade le moindre but, sans avoir de célébration vraiment à elle, mais avec toujours un sourire gigantesque, même quand elle inscrit le huitième but de la raclée norvégienne. L’attaquante de 27 ans a aussi explosé le record de Jimmy Greaves, inscrivant 19 buts en 16 apparitions sous la tunique des Lionesses cette saison, soit six de plus que le joueur des années 1960. And still couting. Cette rage, elle la puise dans son éviction de la liste anglaise pour les derniers Jeux olympiques : « Ça a allumé une flamme au sein de moi. En fait, je n’avais jamais été aussi déterminée et concentrée… Je joue mon meilleur football quand je suis en colère. » Une énergie qui lui a permis de tout déchirer en club, inscrivant 11 buts et délivrant 8 passes décisives avec Arsenal, avant d’entamer cet Euro, que certains nomment aujourd’hui « Beth Mead Revenge Tour ». Et pour cause. Sans la pandémie et donc le report de l’Euro d’un an, l’attaquante avoue elle-même qu’elle n’aurait pas forcément été de la partie. On aurait ainsi loupé le formidable chant à son honneur : « Your defence is terrified, Beth Mead’s on fire ! Na-na-na ! »

Et elle vient d’où ? Surnommée « la bombe de Hinderwell » , la petite Bethany, de son nom complet, a grandi dans le parc national des North Yorkshire Moors, dans le village de Hinderwell, près de Whitby. Après avoir tapé ses premiers ballons dans la cour de récré et s’être essayée au football de club dans des équipes locales, elle rejoint les California Girls de Middlesbrough. Très vite repérée par l’équipe de D1 anglaise de Sunderland, elle est même nommée jeune joueuse de l’année 2016 par le syndicat anglais des footballeurs professionnels alors qu’elle terminait son diplôme de développement sportif à l’université de Teesside. Ce qui suffit à convaincre Arsenal d’en faire sa buteuse, avant qu’elle ne soit poussée sur l’aile droite par l’attaquante néerlandaise Viviane Miedema, débarquant à Londres à l’été 2017. Faisant ses débuts avec la sélection en 2018, elle se prend la tête avec Phil Neville, qui l’accuse d’être « trop décontractée » et d’être seulement « heureuse » lorsqu’elle se rend à Whitley Bay, une station balnéaire du nord-est de l’Angleterre, pour « manger un fish and chips ». L’arrivée de Sarina Wiegman sur le banc anglais lui permet de « prendre confiance » en son jeu, « sans trop réfléchir »… et de faire preuve de sérieux : lors de cet Euro, elle est aussi devenue lanceuse d’alerte, mettant la lumière sur le problème des shorts blancs lorsqu’on est une femme réglée.

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