- CDM 2018
- 8es
- Belgique-Japon
Chapeau M. Nishino
Arrivé en catastrophe sur le banc du Japon, Akira Nishino ne partait pas favori au vu de la préparation en dents de scie de Samouraïs bleus vieillissants. Et pourtant, le sélectionneur du Japon est parvenu à déjouer tous les pronostics en proposant un système de jeu efficace. À défaut d’être séduisant.
Choc des cultures. Trois mots qui résument l’éviction de Vahid Halilhodžić après une campagne de qualification démarrée en demi-teinte (à l’image d’un match nul obtenu face à Singapour) et pourtant conclue par une encourageante première place. Pour remplacer coach Vahid, un nom relativement inconnu hors des frontières de l’archipel, mais qui rime avec constance en première division japonaise : Akira Nishino. Taulier du Kashiwa Reysol, Gamba Osaka et Nagoya Grampus, l’homme est âgé de 63 ans au moment de reprendre les rênes des Samouraïs bleus. Ça tombe bien : son groupe, avec 28,6 ans de moyenne d’âge, fait partie des plus âgées du tournoi. Entre vieux, on se comprend et c’est déjà un progrès.
Puisqu’en plus de la différence culturelle qui a poussé Halilhodžić vers la sortie, la rupture avec son groupe était consommée. Le Japon se prépare alors à sa sixième Coupe du monde d’affilée avec un statut peu enviable : celui de l’équipe contre laquelle les trois points devraient être les plus faciles à prendre. Les amicaux d’avant-Mondial sont là pour le confirmer : Nishino reprend un effectif qui n’a pas gagné une seule de ses trois premières rencontres et poursuit sur la lancée avec deux défaites consécutives face au Ghana et à la Suisse. Avant de finalement s’imposer face au Paraguay, mais sans briller. La Coupe du monde commence dans la foulée et les prévisions sont à l’opposé du beau fixe.
Avec l’aide du destin
Mais la particularité des tournois internationaux, c’est que rien n’est joué d’avance. Si dans le groupe, un semblant de cohésion paraît accompagner une belle entente retrouvée, les Samouraïs bleus peinent à régaler les spectateurs sur le terrain. Et c’est là qu’interviennent ces petits riens qui, au bout du compte, finissent par faire toute la différence. Contre la Colombie, par exemple. Il suffit d’un carton rouge inespéré au bout de seulement trois minutes pour permettre à Kagawa d’ouvrir le score sur penalty et de placer le Japon dans une position de force qui n’était pas gagnée d’avance.
Preuve en est par l’égalisation de Quintero sur coup franc et une boulette magistrale de Kawashima. Face à la Pologne, le seul but inscrit par Jan Bednarek a prouvé à quel point cette défense japonaise pouvait être naïve. Cela s’est également vérifié face au Sénégal, qui a mené par deux fois avant de se faire rattraper grâce au mental, élément qu’on ne pourra pas enlever aux guerriers de M. Nishino.
Vaincre sans gloire
Quoique. La dernière joute face à des Polonais déjà éliminés avait tout du match piège. D’un côté, trois équipes pour deux places, de l’autre, un animal blessé et qui ne refusera pas un dernier coup de griffe avant de rendre son dernier soupir. On s’attendait logiquement à voir onze guerriers filer vers l’avant et tenter de remporter une vraie victoire. Il n’en a rien été. Anémiques, les Japonais se sont contentés de répondre aux quelques attaques polonaises. Sans jamais convaincre. La fin du match s’est révélée être une parodie de football. Visiblement informés du but victorieux de Mina à un quart d’heure du terme, les joueurs de M. Nishino ont commencé une partie de passe à dix interminable alors qu’ils étaient menés. D’abord étonnante, elle se révèle agaçante, puis franchement insultante. Pour le public, pour la Pologne et pour le football.
Car finalement, le Japon s’est qualifié à la faveur de deux minuscules cartons jaunes éliminant le Sénégal. On notera également la passivité de l’arbitre zambien, qui aurait pu dégainer quelques biscottes pour ce flagrant délit d’antijeu. Difficile, donc, de se montrer confiant pour les Nippons à l’approche des huitièmes de finale qui leur réservent la Belgique, qui assure son statut d’outsider avec la manière. Tout le contraire du Japon, qui a illustré à merveille l’adage « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire » . Même si à la fin, seul le résultat compte. Chapeau quand même pour ça, M. Nishino.
Par Julien Duez