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Bruno N’Gotty : « Ma frappe ? C’est un peu inné… »
Près de 17 ans après avoir fait entrer le PSG dans l'histoire du football français et des coupes d'Europe, le Koeman noir fait toujours parler de lui sur les pelouses du monde amateur, lui qui vient de signer une licence à Belleville-sur-Saône, club de DHR du Rhône. À 42 ans !
Avant de parler de football, peux-tu nous dire ce que tu deviens depuis l’arrêt de ta carrière ?Depuis que j’ai arrêté, je suis à Montpellier, pour aller un peu au soleil. J’ai continué à jouer un peu au foot à Lattes, à Mauguio et à Pérols, trois clubs en DH et PHR. Tout s’est bien passé pour moi ces derniers temps. L’an passé, on a raté la montée de pas grand-chose pour la DHR. Mais je reste plus que sur le foot, j’ai un peu coupé par rapport à tout ce que j’ai pu faire. Juste un peu de repos et de foot pour garder la forme. Mais maintenant que je suis venu à Belleville-sur-Saône, je vais me rapprocher d’ici, comme ma famille et mes attaches sont sur Lyon. Je suis déjà souvent ici. Ça fait du bien de revenir, je serai proche de tout le monde comme ça.
Et qu’est-ce qui t’a fait reprendre une licence dans ce coin précis, à 50 bornes au nord de Lyon ? Les vins du Beaujolais ?C’est un peu un tout. Depuis deux ou trois ans, je fais les stages d’été avec Pierre Chavrondier (N.D.L.R. : entraîneur principal et ex-pro passé par Lyon, Gueugnon, Châteauroux, Lorient…). J’ai bien aimé l’accueil, les joueurs, les gens, les dirigeants… Et Pierrot a fait du super boulot (N.D.L.R. : quatre montées en cinq saisons). Comme j’étais encore dans le foot, il m’a un peu titillé, pour me motiver à le rejoindre et ça m’a fait plaisir. On a débuté ensemble plus jeunes à l’OL, donc pourquoi pas boucler la boucle avec lui. Son équipe monte tous les ans ou presque. Ils ont raté la DH de peu cette saison, donc pourquoi ne pas venir l’épauler pour l’année prochaine.
Tu viens aussi ici pour l’encadrement ?Pour aider un peu. Pierrot a vécu quelque chose de différent, j’ai connu de belles choses et l’étranger. C’est bien d’apporter un peu de vécu et parler à quelqu’un d’autre. Confronter deux avis pros, ça peut être pas mal parce qu’on sait de quoi on parle. Ça peut être un plus pour continuer à voir cette association grandir. Il y a un vrai projet club à structurer ici.
Et tu vois plus loin, avec une carrière de formateur ou d’entraîneur ?Pourquoi pas. D’un côté, j’ai passé mes diplômes, tout en jouant. Je me rapproche un peu plus de la fin et pourquoi ne pas regarder vers ce milieu. Mais plus en seniors qu’avec les jeunes, j’ai moins de facilités pour la formation.
Compte tenu de ton vécu et de tes qualités, dans quels domaines précis apporterais-tu le plus ta pierre à l’édifice dans l’encadrement ?Peut-être une vision d’ensemble dans un premier temps ici. Je pourrais regarder un peu toutes les équipes et apporter un regard de conseiller. Après, on pourrait se partager un peu les tâches. Faire travailler peut-être la défense. En plus, Pierre était attaquant et moi défenseur. On peut s’entraider par rapport à tout ça.
Tu viens aussi pour jouer. Tu as du mal à couper le cordon avec le football?Oui, c’est un peu vrai, même si c’est surtout pour garder un peu la forme. Et si on peut le faire à un niveau qui nous fait courir un peu plus, c’est bien. En dilettante, c’est sympa, mais c’est au ralenti. Là, il y a des enjeux et une carotte au bout avec des montées, des derbys… J’aime bien ça. À mon âge, il y a des joueurs qui sont lassés de tout ça. Pas moi. Même si c’est un peu plus dur avec l’âge.
Justement, à 42 ans, pas trop dur de cavaler aux fesses des attaquants, même de DHR ?C’est dur. Plus jeune, je courais et réagissais beaucoup plus vite. On le ressent aussi sur la récupération, mais c’est normal. Après, j’anticipe des choses que les jeunes ne voient pas. On voit plein de trucs plus rapidement. Et c’est aussi à moi d’échanger avec ces jeunes pour leur donner des astuces sur les mouvements, les appels, les replacements, les jaillissements qu’il faut faire.
Justement, ces mêmes attaquants, est-ce qu’ils te respectent ou est-ce qu’ils veulent te rentrer dedans quand ils te voient dans l’autre camp ?De ce que j’ai vécu dans le Sud, il y a une forme de respect. Après, c’est toujours stimulant de jouer contre un ancien pro. Mais la compétition est normale et saine, c’est juste une question d’adaptation au monde amateur. Et avec les coéquipiers, c’est pareil, il y a cette forme de respect.
Le monde amateur et ses pelouses parfois défoncées ou ses ambiances franchouillardes, ça ne te refroidit pas ?Non, il faut faire abstraction. J’ai connu des choses extra-sportives avec des tas de gens qui crient dans les tribunes. Mais il faut sortir de l’univers professionnel. C’est sûr que tout y est plus facile, mais une fois en amateur, tu sais que tu vas avoir des gens qui vont venir pour insulter, d’autres pour crier, d’autres pour soutenir l’équipe. Il faut faire abstraction de tout ça et ne pas se prendre la tête. Et puis bon, il y a toujours des abrutis sur les bords de touche.
Rassure-nous : malgré ton âge, ta frappe de balle reste la même ?Ouais, mais un peu moins (sourire). Ce n’est plus comme avant, c’est sûr. Mais elle est toujours un peu là et quand il faut l’utiliser, il n’y a pas de soucis…
Quand tu dois dégainer, tu ne te fais pas prier en gros…Voilà ! (rires)
Tu la tiens d’où ta frappe de mammouth ?C’est un peu inné. J’ai fait avec des facultés qui sont ce qu’elles sont. Dès les catégories de jeunes, c’était ça. Pourtant, je ne l’ai jamais travaillé plus que ça. On m’a dit de l’utiliser plus au début, chose que je ne faisais pas. Et puis je me suis mis à frapper et ça marchait.
On connaît tous la plus fameuse de tes pépites, mais est-ce qu’il y en a d’autres qui gardent une place toute particulière dans ton esprit ?Oui, à Paris, il a quelques coups francs qui ont été sympas. Je me rappelle un match, je ne sais plus contre qui par contre, où on se tirait la bourre pour les frapper avec Paul Le Guen. On avait eu deux coups francs dans le match : un à droite et un à gauche. J’avais pris celui à droite et je l’avais mis en lucarne et lui a pris le ballon plus tard pour celui à gauche et avait fait la même chose (Rires). Deux buts de folie. Pourtant il y avait un peu de monde pour les tirer, mais ça rentrait souvent. On avait la chance de pouvoir changer la tournure d’un match juste avec cette faculté.
Justement, puisqu’on parle du PSG, que t’inspire ce que réalise celui de cette année et gardes-tu une certaine affection à son égard ?On tourne un peu la page en sortant du foot, mais c’est bien que Paris redevienne la grosse équipe et la capitale, c’est le plus grand club français à mes yeux. Après, les Qataris ont mis les moyens et ça fait avancer le foot. Après, je ne sais pas si c’est bénéfique pour tout le football car il y a moins de formation. À mon époque, il y avait un peu de formation et des jeunes qui sortaient. Maintenant, ça me semble plus difficile. Rabiot est sorti mais a tout de suite été prêté. S’il revient, ils le prêteront de nouveau sûrement et peut-être qu’il ne jouera pas avec le PSG. Enfin je pense…
Puisque tu parles de formation, gardes-tu un œil attentif au club où tu as percé, l’OL ?C’est sûr, oui. Je ne suis pas droit sur une équipe. J’ai percé là-bas, donc forcément, je suis ce que le club fait. Il y a eu quelque chose d’extraordinaire avec les sept titres de champion et cette invincibilité. Maintenant, il a un peu de difficultés. On ne peut pas être toujours en haut de l’affiche, surtout avec l’impératif financier. Après, par rapport à Paris, Lyon a toujours réussi à sortir de jeunes joueurs prometteurs qui éclatent, comme Grenier cette année. Les exemples ne manquent pas. C’est une bonne chose, on ne peut pas jouer qu’avec des stars. C’est bien de voir arriver des jeunes qui jouent dans le club qui a les a fait éclore.
Propos recueillis par Arnaud Clement