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Bleus : Boubacar Kamara ne s’est pas caché
Seul novice de la liste initiale de Didier Deschamps pour le rassemblement de juin, avant d'être rejoint en cours de route par Ibrahima Konaté, Boubacar Kamara ne s'est pas caché sur le terrain, à l'image d'une première titularisation convaincante en Autriche, vendredi soir. Ce n'est qu'un début pour l'ancien Marseillais, qui peut déjà se réjouir d'avoir gagné le droit de faire partie des débats à cinq mois de la Coupe du monde.
L’aventure de Boubacar Kamara chez les Bleus a commencé par une petite déception, celle de s’installer en tribunes au Stade de France pour assister à la défaite de ses nouveaux coéquipiers contre le Danemark (1-2), le 3 juin. Dix jours plus tard, ce devrait être une autre histoire. Le Marseillais de naissance aura au moins le privilège de s’asseoir sur le banc de l’enceinte dyonisienne pour vivre la réception de la Croatie à l’intérieur du groupe, ce lundi soir, pour boucler ses deux semaines de classe découverte. À la veille de la dernière rencontre de la saison pour la bande à Didier Deschamps, Kamara s’est entraîné à part aux côtés de Karim Benzema pour « bien récupérer » moins de 48 heures après avoir fêté sa première titularisation et une deuxième cape sous le maillot frappé du coq et des deux étoiles à Vienne, lors du nul arraché face à l’Autriche (1-1). Son nom n’a pas été sur toutes les lèvres, les questions à son sujet n’ont pas animé les conférences de presse de ce rassemblement, et pourtant Kamara a marqué des points en confirmant qu’il n’avait pas seulement été appelé par le grand patron pour son statut de binational.
Bouba grimpe
La question était arrivée sur le tapis dès les rumeurs d’une convocation quelques heures avant l’annonce de la liste par Deschamps et la théorie d’un appel opportuniste avait été balayée d’un revers de main par le sélectionneur, puis par le joueur. « J’ai appris que j’allais être appelé la veille quand j’ai eu une discussion avec le coach. Je n’ai jamais hésité par rapport au Sénégal, assurait Kamara le mois dernier lors de son premier passage face aux médias dans ses nouveaux équipements. Certes, on m’a vu sur les réseaux sociaux avec un maillot du Sénégal, car mon père est sénégalais. J’étais très content qu’il gagne la CAN, très content pour mon père aussi. » Un début de polémique immédiatement éteint pour faire de la place au traditionnel émerveillement des novices en débarquant à Clairefontaine pour la première fois : « On m’a fait visiter le château, mais je pense que ça va être dur de tout se rappeler. On dirait un peu un labyrinthe. »
Celui qui va découvrir un autre championnat avec Aston Villa la saison prochaine ne s’est en tout cas pas perdu sur le terrain. Après avoir croqué dans sa première sélection en remplaçant Aurélien Tchouaméni à l’heure de jeu en Croatie en début de semaine, il a pu dévoiler toute sa panoplie en disputant l’intégralité de la partie contre l’Autriche. Titulaire aux côtés du néo-Madrilène dans l’entrejeu dans le 4-2-3-1 concocté par Deschamps, Kamara ne s’est pas planqué (88 ballons touchés), se montrant d’abord solide dans les duels (six récupérations), puis sans complexes en tentant de se projeter à plusieurs reprises ainsi qu’en se montrant aussi précieux dans le jeu court que brillant dans le jeu long. Ses deux belles ouvertures pour Kingsley Coman et Karim Benzema auraient d’ailleurs pu déboucher sur un but à chaque fois. « J’ai été bien accueilli par tout le groupe, donc ça facilite les choses. Sur le terrain, je suis resté concentré, j’ai essayé de faire le boulot et d’être à l’aise, murmurait-il en zone mixte du stade Ernst-Happel vendredi soir. J’ai joué mon jeu, sans me poser de questions si je ratais des choses. Maintenant, tout ne peut pas se jouer sur un match, il faut toujours répéter, que ce soit en sélection ou en club, pour revenir. » Comme pour confirmer que le désormais ancien Marseillais espère être bien plus qu’un one-shot.
Polyvalence et références
Son profil est un atout considérable, surtout dans une telle période, où Deschamps jongle entre les systèmes et tâtonne encore pour trouver la bonne formule à cinq mois du Mondial. Formé comme défenseur central, Kamara connaît le poste par cœur et n’aurait aucun mal à rendre des services dans une défense à trois puisqu’il a déjà joué dans ce schéma avec l’OM ou encore en équipes de France jeunes, où il a longtemps été le compère de Dan-Axel Zagadou et Malang Sarr. Mais jouer un cran plus haut ne l’effraie pas non plus. Ces dernières années, c’est dans une position de numéro 6 ou numéro 8 que le joueur de 22 ans a continué de se construire pour s’épanouir sous le maillot phocéen. Cette saison, il a même pris une autre dimension en s’imposant comme le garant de l’équilibre défensif de l’équipe dirigée par Jorge Sampaoli, qui lui a montré des images de Sergio Busquets et Rodri pour l’aider à assimiler le rôle d’un numéro 6. Deschamps ne peut pas cracher sur ces qualités sachant la fragilité de N’Golo Kanté, même si Kamara manque de références au très haut niveau avec 28 matchs européens au compteur, dont cinq en Ligue des champions, une compétition qu’il a décidé de ne pas retrouver la saison prochaine. Le réservoir est immense au milieu de terrain, et le sélectionneur n’avait d’ailleurs pas caché que la présence du Franco-Sénégalais dans le groupe était liée « à l’absence d’autres joueurs qui ont l’habitude d’être là ». Paul Pogba reviendra, Eduardo Camavinga toque à la porte, mais Boubacar Kamara a gagné le droit de faire partie du débat. C’est déjà une première belle victoire.
Par Clément Gavard