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Zoco, ou l’idée d’un certain Madridismo
Un nom inconnu pour les jeunes générations, mais qui renvoie aux heures dorées du Real Madrid pour les amoureux du club blanc. En quelques mots, voici Ignacio Zoco, décédé ce lundi, mais à jamais étendard d'un madridismo à l'ancienne qu'il a mené vers les sommets avec ses comparses des Yéyé.
Loin des considérations sportives ou pécuniaires, le Real Madrid pleure. À chaudes larmes. Depuis ce lundi, l’un des plus grands joueurs de son histoire a quitté ce monde. Un an après Di Stéfano, le madridismo se retrouve donc orphelin d’Ignacio Zoco (1939-2015). Cette grande gigue, cet « étalon » , comme le surnommait affectueusement Santiago Bernabéu, laisse derrière lui une ribambelle de titres et des souvenirs en pagaille. Pour Carlos Mendoza, président de l’association pour les Valeurs du Madridismo, « Zoco a représenté les valeurs historiques qui ont fait du Real Madrid le plus grand de tous » . Autrement dit, « il avait cette capacité à souffrir, à se battre face à l’adversité jusqu’à remporter la victoire. Il a toujours eu cette volonté ferme de décrocher la victoire plus que tout autre chose. Cet esprit compétitif a toujours caractérisé le Real et Zoco. » Un esprit qui, selon des socios de plus en plus nombreux, se perd. La faute à une mercantilisation du fanion madridista et à un oubli des fondements même du club le plus titré au monde. En plus de Zoco, une certaine idée du madridismo s’est également fait la malle ce lundi.
L’étendard d’une nouvelle génération
La carrière footballistique de Zoco ne connaît pas d’avant-Real Madrid. Ou presque pas. Bien que natif de Garde, en Navarre, il ne dispute qu’une seule saison avec Osasuna, plus grand club régional, avant de rejoindre la Casa Blanca en 1962. La génération dorée d’Alfredo Di Stéfano et Ferenc Puskás se trouve sur la fin et cherche ses hypothétiques successeurs. Bref, c’est dans un Madrid en reconstruction que ce jeune milieu de terrain débarque. Autour du seul Gento, une pléiade de jeunes joueurs compose l’effectif du Real Madrid. Rapidement, Zoco en devient le leader. « Nous avons réussi quelque chose qui ne se répétera jamais, prévient son compagnon Pirri, dans une tribune publiée par El Mundo. L’équipe est restée tout en haut avec des joueurs qui venaient tous de notre pays. C’est sans doute pour cela que nous étions une petite famille qui ne s’est jamais désunie malgré les virages du destin. Ensemble, nous avons écrit des passages sans lesquels on ne pourrait comprendre l’histoire de ce club. » Dans les faits, ce passage renvoie à sept Liga et une sixième Coupe d’Europe. Et à un nom : le Madrid des Yéyé.
« Cette jeune équipe a mis fin à quelques années de disette après les cinq premières coupes, relance Carlos Mendoza. On a appelé cette équipe celle des Yéyé parce qu’elle est apparue au même moment que les Beatles. Cette équipe a illustré cette génération de jeunes Espagnols qui s’ouvrait à la nouvelle culture pop. » Un surnom attrayant qui n’empêche Zoco de faire dans le libéro à l’ancienne, histoire de protéger ses comparses Pachin, Amancio Amaro ou encore Ramon Grosso. « Joueur sérieux et sûr » , dixit Pirri, « il allait sur chaque ballon comme si c’était le dernier, ce qui ne l’empêchait pas d’avoir un profond respect pour l’adversaire. Il savait toujours où il devait se trouver, sur le terrain comme dans la vie. Et ça, c’est important. » Ainsi, ses décisions sont dictées par le sens de l’honneur et du respect. Il décide par exemple de prendre sa retraite après une cinglante manita encaissée au Bernabéu par le Barça d’un Cruijff joueur. Une retraite qui devient effective quelques mois plus tard, à 35 ans, au soir d’un succès 4-0 contre ces mêmes Blaugrana en finale de la coupe nationale. Le sens du timing, sans conteste.
Une vie au service du Real Madrid
Après une carrière sportive dédiée au madridismo, l’histoire de Zoco avec le club blanc ne s’arrête pas là. Pirri, encore : « Tant lui que moi, nous savions que notre relation avec le Real Madrid ne pouvait s’arrêter après avoir rangé les crampons. Après tant de soirées d’été passées ensemble, nous avons de nouveau partagé un banc : lui comme délégué, moi dans le staff médical. » Cette relation fusionnelle avec le club blanc ne s’estompera jamais. Après quatre années de délégué, il reprend le flambeau d’Alfredo Di Stéfano à la tête de l’association des anciens joueurs merengues. Le temps d’une année, avant de trépasser. « Le meilleur hommage que pourrait rendre le club serait de remettre les valeurs historiques du Real Madrid au cœur du projet. Les valeurs mercantiles de Florentino Pérez n’ont strictement rien à voir avec celles de Zoco » , affirme le président des Valeurs du Madridismo. Un vœu pieu que ne renie pas son ami de toujours, Pirri : « Le jeu est toujours à onze contre onze, mais les clubs sont devenus des entreprises. De nouveaux Ronaldo ou Messi pourront arriver, mais il sera difficile que de nouveaux Zoco arrivent dans un club aussi grand que le Real Madrid. »
Par Robin Delorme, à Madrid