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Zlatan, roi sans carrosse

Par Maxime Brigand
Zlatan, roi sans carrosse

Ce devait être la première finale européenne d'une carrière qui touche à sa fin. Puis, le meilleur buteur de la saison de Manchester United, premier à taper les vingt buts sur un exercice pour le club depuis Robin van Persie, a vu son genou le lâcher le 20 avril dernier. Résultat, cette pièce qui avait été écrite pour lui se jouera sans lui.

Un putain de dernier défi, comme une dernière claque dans la gueule à envoyer. En dix-huit piges, le monde du foot aura vu tout ce qu’il est possible de voir de Zlatan Ibrahimović. Tout a été écrit, toutes les critiques ont été formulées, toutes les louanges ont été dressées, et lui aura presque tout gagné. Tout, sauf ce foutu trophée européen, ce qui lui laisse scotché aux crampons cette vieille étiquette qui reste dans la tête comme une création estivale de Magic System : Zlatan ne réussit jamais dans les grands matchs et cet homme, malgré tous ses succès, n’est pas taillé pour les grands rendez-vous. Alors, il a débarqué à Manchester l’été dernier avec un objectif finalement assez simple : faire tomber les mâchoires des sceptiques. Oui, à trente-cinq ans, Zlatan Ibrahimović voulait se prouver à lui-même qu’il pouvait réussir dans un nouveau championnat, dans la peau d’une figure tutélaire – presque paternaliste – au cœur d’un effectif jeune et en chantier, et qu’il pouvait encore empiler les pralines, même en Premier League. Il l’a fait et a même porté Manchester United tout au long de la saison, accompagnant un groupe qui cherche encore sa nouvelle identité et un effectif qui avait besoin de ce genre de types pour avancer et se sortir de certaines situations bordéliques. Cette saison, l’attaquant suédois a planté 28 buts toutes compétitions confondues, là où aucun joueur de United n’avait dépassé les vingt buts sur une campagne depuis Robin van Persie. Juste assez pour sécher ces mecs payés pour « raconter de la merde » , tirant un premier bilan au début du mois de janvier dernier : « J’ai vécu une année fantastique.(…)Je suis venu ici, mes six premiers mois ont été plus qu’incroyables.(…)Je suis venu en Premier League et tout le monde pensait que c’était quelque chose d’impossible pour moi, mais, comme souvent, je leur ai fait bouffer leurs couilles. » Merci, au revoir.

« Tu as combattu toute ta vie »

Et la chute. Comme ça, un soir d’avril, lors d’un quart de finale retour de Ligue Europa face à Anderlecht. Pour la première fois de sa vie, Zlatan Ibrahimović a vu son corps le lâcher. Brutalement : les croisés. Sa saison s’est terminée comme ça, peut-être que son aventure anglaise aussi. La science a commencé à rêver en voyant un tel physique – « Son genou est si solide que les médecins ont dit qu’ils n’avaient jamais rien vu de tel. Ils souhaitent le revoir après sa carrière pour l’étudier. Donc une fois que ce sera fini, on retournera sur place et on l’ouvrira à nouveau pour étudier ses ligaments. » (Mino Raiola, amoureux) – et José Mourinho lui a murmuré du réconfort à l’oreille, lui glissant qu’il a « combattu toute sa vie » et que cette blessure ne serait finalement qu’une épreuve de plus à surmonter. Manchester United a bouclé sa saison sans lui et sans vraiment d’envie, la tête étant déjà tournée vers cette finale de Ligue Europa. Son absence a finalement été réduite au silence, Mourinho souhaitant à plusieurs reprises faucher le sujet en conférence de presse. Alors, parce que c’est Zlatan, on a reparlé de lui à travers d’autres angles, d’autres sujets. Cavani a évoqué dans Stade 2 dimanche dernier sa chance d’avoir pu « apprendre beaucoup de choses à ses côtés. J’ai pu voir son attitude sur le terrain. C’est un guerrier. Sincèrement, je me suis beaucoup inspiré de son attitude. » Maxwell l’a vu débarquer sur un écran – « Max, c’est la légende qui te parle » – lors de son hommage au Parc des Princes. Et Peter Bosz, l’entraîneur de l’Ajax, l’a comparé au symbole de sa nouvelle génération, Kasper Dolberg. Ibrahimović, lui, s’est contenté d’un petit message sur Instagram : « Ready for the final » . Une surprise à laquelle personne ne peut rationnellement croire, sauf exploit historique de la médecine. Cette finale devait être sa finale. La première européenne d’une vie et probablement la seule. Une finale organisée chez lui, en Suède, dans un stade – la Friends Arena – qu’il a inauguré par un quadruplé contre l’Angleterre (4-2) et un but de dingue en novembre 2012. Une finale contre son ex, l’Ajax. Une finale avec Manchester United. Une finale avec Mourinho, pour qui il « est prêt à mourir » . Mais une finale sans lui, alors que son contrat se termine en juin prochain et qu’on l’annonce avec insistance en MLS. Putain de destin.

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