- Ligue des champions
- 8e de finale
- Leverkusen/PSG
Zlatan, le roi des préliminaires
Avec huit buts en cinq matchs de Ligue des champions cette saison, le Suédois devrait faire peur à tout le monde. Sauf que le numéro 10 du PSG s’est forgé une sale réputation : quand les matchs comptent, le type ne marque plus. Une sale habitude à laquelle il doit tordre le cou.
Zlatan Ibrahimović n’est pas un clutch player. Ne comptez pas sur lui pour prendre la balle quand la pression est énorme et balancer le tir décisif sur la sirène. Ibra, c’est plutôt un mec de première mi-temps. Un type qui soigne ses statistiques personnelles avant la pause. Histoire de ne pas trop se fatiguer et de pouvoir balancer sa feuille de stats quand on vient lui chercher des poux par la suite. Oui, on est sévère avec un mec qui pèse quand même 40 buts en 104 matchs de Ligue des champions dont 8 en seulement 5 matchs cette saison. Sauf que le numéro 10 parisien a des statistiques d’enfant quand il s’agit des matchs à élimination directe. Autrement dit, quand ça compte pour de « vrai » . La preuve : 5 petits buts en 30 matchs à partir des huitièmes de finale en quatorze campagnes européennes. D’aucuns parleraient de joueur planqué. C’est plus complexe, en réalité, même si on se demande comment ne pas abonder dans leur sens quand on regarde dans le rétroviseur et le nombre de gros matchs ratés par le Suédois.
Hormis une énorme prestation contre Arsenal avec le maillot de l’AC Milan (victoire 4-0 en 2012, un but et deux passes pour le Suédois), les matchs importants se sont toujours déroulés sans lui. On ne compte plus les matchs au cours desquels Ibra s’est énervé, désolidarisé du collectif alors qu’il fallait qu’il porte les siens… Quand l’enjeu du match compte, Ibra se ferme, joue de manière trop individualiste et complique son jeu et, par ricochet, celui de son équipe. Bref, en dépit de son talent énorme, se pose toujours la même question au sujet du Z : est-il capable de faire gagner un match à lui tout seul en Europe en dehors des poules ? Se poser la question, c’est un peu y répondre. De l’Ajax à Paris en passant par Milan, Turin et Barcelone, Ibrahimović n’a jamais porté ses coéquipiers dans les moments fatidiques. L’an dernier ? Il prend un rouge à Valence à l’aller, rate le retour, marque un but hors-jeu et facile contre Barcelone au Parc des Princes et laisse Javier Pastore briller au retour. C’est trop peu pour un mec de son calibre et de son aura.
Fragile, le Z ?
Le Z serait-il tétanisé par l’enjeu quand celui-ci est plus important que sa prestation personnelle ? On peut se le demander. Pourtant, en sélection, quand il s’agit de prendre ses responsabilités et poser ses attributs sur la table, il est là. On pense notamment aux barrages du dernier Mondial où il a essayé de rivaliser avec un énorme Cristiano Ronaldo au match retour (un doublé pour le Suédois, un triplé pour le Ballon d’or. En fait, c’est surtout la coupe aux grandes oreilles qui complexe le joueur de 32 ans. Dans les différents championnats qu’il fréquente, il répond toujours présent par des buts dans les grandes affiches. Pas de doute là-dessus. C’est sur la scène européenne qu’il s’affole facilement. Il n’est pas le seul dans ce cas, puisque des grands noms perdent un peu de leur influence quand les matchs comptent : Robin van Persie, Mesut Özil, et, pendant un temps, on a même rangé Cristiano Ronaldo dans cette catégorie. Comme quoi.
La Ligue des champions, justement. La crème de la crème. Le seul trophée qui manque au géant suédois. Une tache sur un CV. Récemment interrogé par l’UEFA avant le match du Bayer Leverkusen, Ibrahimović se confiait sur sa relation très particulière avec la C1. « Il y a énormément de moments particuliers à travers la Ligue des champions, même si je n’ai pas encore gagné la compétition. Et ces moments, je les savoure. J’ai marqué quelques buts, je vais encore essayer de tenter ma chance. J’ai déjà porté les maillots de clubs fantastiques en LDC, j’en suis très heureux. Mais bien sûr, j’en veux d’avantage. » On sent l’homme amoureux. Jaloux, presque. Il sait qu’il doit mieux faire.
Un mec comme ça n’a pas le droit de rater à ce point tous les rendez-vous qu’il s’est fixés avec l’histoire. Surtout qu’à 32 ans, le joueur n’a jamais semblé aussi fort. C’est le moment ou jamais. Car, mine de rien, il ne faudrait pas que l’attaquant parisien termine sa carrière avec cette sale réputation. Celle d’un grand joueur de petit match. Après tout, comme le disait si bien Gianluca Vialli : « C’est quand le jeu devient dur que les durs deviennent bons. »
par Mathieu Faure