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Zidane, l’homme-sandwich
Zinédine Zidane, ses deux buts en 1998, son Ballon d’or, et tout ce qui va avec, c'est également un immense produit marketing que toutes les marques s'arrachent. Et ZZ ne sait pas dire non.
Leader Price
En février 1998, Zidane n’est pas encore une immense star. Il accepte donc une campagne de pub pas vraiment glamour. Leader Price placarde sa photo sur tous les murs de métro, les kiosques et les pages intérieures de magazines avec le slogan « J’aime vous faire gagner » ou « Gagnez avec Zidane » . Sauf que le champion, qui tire une gueule infâme sur les photos, devient un héros entre-temps. Pendant que la notoriété de la marque explose (de 23 à 74%), Zidane commence à regretter. « Vous m’avez mis la honte avec votre pub Leader Price, je n’aurais pas dû vous écouter, tous autant que vous êtes » , balance-t-il à Mustapha, son ami d’enfance qui a joué les intermédiaires pour cette campagne. Mais non, si peu.
Dior
Tout s’accélère. La directrice des parfums de Christian Dior le remarque sur les affiches de Leader Price et veut en faire son égérie pour la prochaine eau de Cologne du groupe. Un coup de fil, trois heures de shopping et 2 millions de francs plus tard, et c’est dans la poche. Zizou devient le visage de Eau Sauvage. Enfin, les yeux. Sur l’affiche, l’espiègle Zinédine cache son visage derrière son pull noir. Seul ses yeux rieurs dépassent, suffisant pour le reconnaître. « Méfiez-vous de l’eau qui dort. »
Volvic et la jambe gauche
« C’est toujours les mêmes gestes. D’abord la jambe gauche, toujours. Chaussette, chaussure. Puis la jambe droite. Puis une gorgée de Volvic, toujours. » Ces quelques mots résonnent encore dans nos têtes. Le 21 juin 2000, date du dernier match de poule de l’Euro, Volvic a tout compris de la manière dont il faut utiliser Zinédine Zidane dans une publicité. Il faut avant tout le mettre à l’aise. Première étape : le mettre dans un contexte qu’il connaît très bien, un vestiaire avant un match. Deuxième étape : ne lui donner aucune réplique face caméra, la voix de ZZ étant posée sur les images comme une voix off. Troisième étape : engager un réalisateur que Zizou connaît déjà bien pour le mettre en confiance, à savoir Stéphane Meunier, qui a tourné Les Yeux dans les Bleus. La plus réussie.
Ford
En janvier 2001, la marque automobile s’offre Zinédine Zidane pour une vidéo très osée. Au lieu de faire dire des phrases banales mal jouées au footballeur, Ford décide de jouer sur le côté peu loquace de ZZ. Une minute de plan séquence sur le visage de Zidane qui se dandine devant la caméra sans dire un mot. « L’important, ce n’est pas ce que l’on dit. Mais ce que l’on fait. » Bonne idée, mais une minute, c’est très très long finalement.
Orange
En 2002, Orange met six millions d’euros sur la table pour trois ans de contrat. Zidane multiplie alors les pubs avec l’opérateur de téléphonie mobile. Et eux aussi ont bien compris qu’il ne fallait pas contourner le manque d’aisance verbale du champion. Une boulette de papier suffit. Dans cette pub de 2004, Zidane shoote dans une boulette pour l’envoyer dans une poubelle. Entre-temps, le bout de papier est touché par pas mal de passants, voyage sur un skate et un vélo. Bref, un enchaînement d’événements improbables qui a pour but de représenter la communication entre les gens.
Canal Satellite
En août 2002, juste après l’échec cuisant de l’équipe de France à la Coupe du monde de la même année, Canal Satellite, diffuseur de la Ligue 1, embauche Zidane pour une publicité courte mais très réussie. Huit secondes d’images suffisent. La caméra filme quelqu’un en train de refaire les lignes d’un terrain, sans dévoiler le visage du jardinier. Puis elle remonte. On voit Zidane, qui balance « Eh oui ! C’est la reprise » en se marrant. Magique. Renouvelé depuis 1999, le partenariat entre Zizou et CanalSat s’achève en 2006 avec la fin de sa carrière de joueur.
Generali
Pas grave, dans la foulée, il trouve un autre partenariat avec le groupe d’assurances Generali. « Quand je m’engage avec un partenaire, c’est toujours parce qu’il y a d’abord une histoire de personnes. J’ai rencontré son président, Claude Tendil, et le contact est passé tout de suite » , explique-t-il selon des propos retranscrits par le groupe lui-même. Et puis, il touche 500 000 euros par an aussi. Pendant cinq ans, il enchaîne les spots et les affiches publicitaires plus gênants les uns que les autres. Même s’il a compris tous les rouages (parole fluide, louanges autour de la marque, regard caméra au bon moment, petit sourire en coin pour finir), il y a quand même quelque chose qui ne va pas. Et puis ce globe qu’il tient dans sa main et qu’il observe avec insistance tel Gollum et son anneau, c’est non.
Danone
En 2004, Frank Riboud, PDG de Danone et ami de Zizou, fait signer un contrat de onze ans à la star du Real Madrid. L’idole des Français devient ambassadeur mondial de la marque. « Nous voulons être le deuxième moteur de la fusée Zizou » , explique Riboud à l’époque dans une interview pour L’Express. Dès la première pub, le ton est donné. Zidane a rejoint Danone pour aider les enfants du monde entier, le géant de l’agro alimentaire étant engagé dans près de 150 programmes pour l’enfance. Un beau message, mais une voix off de Zizou qui fait froid dans le dos.
Grand Optical
Tout aurait pu être parfait dans cette pub de 2009. D’abord, tout simple, Zinédine Zidane va chez son opticien et essaie une paire de lunettes. Normal. Ensuite, on joue sur sa célébrité, deux ados le reconnaissent et sont tout émerveillés. Ça roule. Enfin, Grand Optical met en avant le talent de Zidane balle au pied, pour offrir un peu de spectacle. Il jongle avec le ballon de basket des gamins et envoie la balle un peu partout pour vérifier que les verres lui vont bien. Bref, tout semble en ordre jusqu’à ce que Zizou balance sa dernière réplique : « C’est bon, je les prends » , avec un sourire gênant. Le jeu d’acteur le moins naturel du monde, mais en même temps, c’est finalement ça qui fait tout le charme.
Mango
Depuis qu’il est l’entraîneur du Real Madrid, Zinédine Zidane est passé dans une autre dimension en matière de classe. Costume cintré, visage de beau gosse, pose de mannequin, regard de braises, on est bien loin du Zizou discount de Leader Price. Aujourd’hui, ZZ est l’égérie de Mango dans un spot en noir et blanc et il n’a plus « la honte » .
Par Kevin Charnay