- L1
- J33
- Guingamp-PSG
Younousse, c’est le goût
Après le PSG de Loris Arnaud et David N’Gog, et des passages à Reims, Dijon et Valenciennes, le gaucher s’est posé à Guingamp en 2013. Entre Christophe Kerbrat et Lionel Mathis, Sankharé démontre enfin qu’il pue le football. À l’heure de retrouver son club de cœur, le gaucher aimerait que l’on arrête de le cataloguer comme « petit con ». Car, au vrai, Sankharé est un sacré joueur de football.
Younousse Sankharé est un garçon discret et pas forcément souriant. Rare dans les médias, discret sur sa vie personnelle et furtif en zone mixte, l’homme s’exprime uniquement sur le terrain. On parle d’un garçon qui, à 17 ans, s’amusait de la défense du FC Valence avec le maillot du PSG lors de l’Emirates Cup disputée à Londres. Passements de jambes, virgule, récupération, conduite de balle de l’extérieur, le gamin de Sarcelles avait tout pour lui. À tel point qu’à l’époque, Arsène Wenger aurait fait passer le message à son ami Alain Cayzac, alors président du PSG, que le club de la capitale n’avait pas besoin de recruter vu le talent de ses pépites, à commencer par Sankharé. Neuf ans plus tard, Sankharé joue à Guingamp, 15e de Ligue 1, et lutte pour ne pas tomber en Ligue 2. Certains le disent caractériel. D’autres un peu tête à claques. Il y a un peu de vrai. Mais pas que. Jérémy Pied, millésime 1989 comme Sankharé, défend son ancien coéquipier guingampais (2014-2015) : « Parfois, il renvoie l’image d’une tête à claques, alors que c’est tout le contraire. Oui, c’est un caractériel, mais il a cet état d’esprit sur le terrain car c’est un gagnant. En dehors, c’est une crème. C’est un garçon toujours de bonne humeur, il s’adapte à tout le monde. Sur un terrain, il lui arrive de vite monter en pression, mais de redescendre dans la foulée. Quand il s’énerve, c’est que l’agressivité du match est montée d’un cran. »
Sous contrat avec l’En Avant jusqu’en 2017, le gaucher a mis du temps pour se poser. Lancé par Paul Le Guen avec les « jeunes » du PSG en 2007 lors du fameux match à Valenciennes où Mamadou Sakho hérite du brassard dans un onze de départ où Younousse fraye avec Loris Arnaud, David N’Gog et Granddi Ngoyi. Une entrée en matière qu’il faut digérer dans un club à la dérive. Pour exister, Sankharé va quitter Paris. Son apprentissage est long et compliqué : Reims en Ligue 2, une nouvelle saison à Paris principalement sur le banc, puis Dijon et Valenciennes en Ligue 1. C’est là que Guingamp tente sa chance. Le gaucher doit se fixer, être entouré pour se libérer. Le prometteur milieu offensif qui avait ébloui Arsène Wenger s’est perdu en chemin. Par moments, son caractère lui joue des tours. Il s’éparpille. Perd du temps. Oscille entre gestes de génie et expulsions. La rencontre avec Jocelyn Gourvennec va lui faire du bien. Quand il est concentré, l’homme est capable de matchs incroyables.
Il met Thiago Motta dans son short
L’an dernier, pour la première défaite du PSG en Ligue 1 sur la pelouse de Guingamp (0-1), Younousse Sankahré brille dans un rôle nouveau pour lui. Son but ? Ne pas lâcher Thiago Motta et isoler la relance de l’Italien. L’homme aux Mizuno passe à côté de son match, et le PSG se prend le mur du Roudourou en pleine gueule. Unique buteur du match, Pied se souvient d’un Sankharé « tactiquement exceptionnel. Il a une technique individuelle incroyable, quand il reçoit le ballon face à son but, qu’il l’arrête avec la semelle et attend son adversaire… souvent il passe les bras ou l’épaule en se retournant et il a cassé deux lignes. Dans ce registre, il est très, très fort. Contre Salonique, à la 90e, il amène le but de Beauvue comme ça. C’est un beau bébé, dur, technique, avec un pied gauche incroyable. C’est un 10 qui peut jouer 8. C’est un vrai box to box, pas dans le sens des courses, mais il t’amène le ballon du rond central à la surface de réparation. Parfois, on peut lui reprocher de trop la garder, de prendre des risques, mais c’est un risque calculé. » Face au PSG, le gaucher n’avait pas hésité à soutenir le regard de Thiago Motta, quitte à rentrer dans son jeu d’intimidation. Une réussite. L’Italien n’était jamais passé autantà côté de son sujet en Ligue 1. International sénégalais depuis après avoir fréquenté les sélections jeunes en équipe de France, Sankharé n’oublie pas d’aller à l’essentiel. Cette saison, il facture 5 buts et 2 passes décisives en Ligue 1. Sur ses cinq pions, quatre ont été plantés à l’extérieur et trois ont donné lieu à des victoires. Clutch ? Assurément. Pour ce qui est sans doute sa dernière saison dans les Côtes d’Armor, le milieu de terrain aimerait partir la tête haute. En laissant Guingamp en Ligue 1. Ensuite, il pourra migrer vers d’autres cieux et corriger ses petits défauts. « Son principal ? Son niveau au ping-pong. Il parle beaucoup quand il joue » , conclut dans un sourire Jérémy Pied. Comme quoi, dans l’intimité, Younousse Sankharé peut sourire.
Par Mathieu Faure