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Yéhvann Diouf (Reims) : « Au basket, j’ai vite commencé à taper le ballon avec mes pieds »

Propos recueillis par Adrien Hémard-Dohain
11 minutes
Yéhvann Diouf (Reims) : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Au basket, j’ai vite commencé à taper le ballon avec mes pieds<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Approché par le Bayern, la Juventus ou Tottenham à 16 ans, le portier du Stade de Reims Yéhvann Diouf s'installe enfin dans un but de Ligue 1 à 22 ans. Entretien avec un gardien passionné de F1, mais qui a pris son temps pour s'envoler.

Être long à la détente, ce n’est pas forcément une bonne chose quand on est gardien de but. À 22 ans, Yéhvann Diouf s’apprête à vivre une huitième titularisation de rang dans les buts du Stade de Reims, après avoir démarré la saison en tant que numéro deux. Une éclosion qu’on pourrait presque trouver tardive, puisque l’on parle d’un joueur approché par le gratin européen (Bayern, Juventus, Tottenham…) à l’adolescence. Mais après avoir quitté Troyes pour le rival rémois à l’été 2019, et appris dans l’ombre de Predrag Rajković, Yéhvann Diouf tire enfin son épingle du jeu dans la Marne. Barré en début de saison par la recrue Patrick Pentz, le Franco-Sénégalais, qui a pour modèles Manuel Neuer, Alphonse Areola et Mike Maignan, a su renverser la situation, avant de stabiliser l’arrière-garde champenoise. Depuis, Diouf enchaîne les prestations de haut vol, et s’impose comme le nouveau pape de la cité des sacres. Rencontre avec un dernier rempart ancien basketteur, adepte de promenades dans les vignes avec son chien, et bientôt en vacances dans les Alpes.


Bonjour Yéhvann, comment as-tu réagi à ta non-sélection pour la Coupe du monde ?(Rires.) J’ai regardé la liste, oui. Évidemment, je n’imaginais pas être dedans. Mais j’avais ma petite liste en tête, comme tout le monde. Deschamps n’a pas forcément la même que moi, surtout pour les gardiens, et au milieu de terrain. Je ne suis pas surpris du retour de Mandanda, mais comme je connais Alban Lafont, je voulais qu’il y soit. Après, ce n’est pas illogique non plus de prendre ces trois-là qui ont été champions du monde ensemble.

Je serais très fier, parce que je me sens autant français que sénégalais. On verra bien.

En fait, on voulait juste te parler des Bleus, parce que lorsqu’on a autant porté le maillot tricolore en jeune, on en rêve forcément chez les pros, non ? Je suis né en France, j’y ai toujours vécu, donc évidemment que les Bleus, ça me fait rêver. Mais attention, j’ai aussi un côté sénégalais parce que j’ai de la famille là-bas, que je vais voir depuis tout petit. J’ai la double nationalité, donc les deux possibilités. C’est cool. Quoi qu’il arrive, je serais très fier, parce que je me sens autant français que sénégalais. On verra bien.

À Reims, tu occupes les cages gardées par un grand gardien sénégalais il n’y a pas si longtemps, d’ailleurs…Ah oui hein ! Et pas n’importe lequel ! Edouard Mendy est super fort. Pourquoi pas faire comme lui…

En 2016, tu es devenu le plus jeune professionnel de l’histoire de l’ESTAC, pourtant tu ne t’installes en L1 qu’aujourd’hui, à 22 ans. Pourquoi tu as pris tout ce temps ?Soyons francs : avec du recul, au moment où je signe professionnel, je n’étais pas prêt à être numéro 1 à l’entraînement ou en match. La Ligue 1, c’est du très haut niveau. Des gardiens jeunes, titulaires, il y en a très peu, à part Alban. Il a su maintenir sa place. On voit Illan Meslier à l’étranger, Paul Bernardoni à l’époque à Troyes. Mais un très jeune gardien titulaire, ce n’est pas courant. Au-delà de ça, je me suis toujours concentré sur ma position. De la frustration, j’en ai eu à Troyes parce qu’à un moment donné, je devais jouer la Coupe de France, mais je me suis blessé. J’en ai eu ensuite quand je suis parti à Reims, où l’on me promet un poste de numéro 2, et je me retrouve numéro 3. Forcément, ça frustre. Mais je me dis qu’il faut travailler, ne pas baisser les bras, et au pire des cas on aura une chance ailleurs. La frustration, il faut savoir la transformer en quelque chose de positif, s’en servir de carburant pour avancer.

La frustration, il faut savoir la transformer en quelque chose de positif, s’en servir de carburant pour avancer.

Avant tes 18 ans, on parlait de toi au Bayern, à la Juventus ou encore à Tottenham. Être autant attendu aussi jeune, c’est difficile à gérer ?Ce n’était pas dur à gérer parce que j’étais plutôt déconnecté de tout ça, je ne réalisais pas. J’étais focalisé sur le terrain, la performance. En fait dans la vie, quand ce n’est pas concret, ça ne m’intéresse pas.

Tu as commencé cette saison en tant que numéro 2, avant de renverser la hiérarchie. Comment ça se passe dans ta tête à ce moment-là ? Quand j’apprends que le club fait venir un autre gardien pour être numéro un, après le départ de Rajković, je suis déçu. Je croyais que le club voulait me mettre en avant, me faisait confiance. J’ai douté, je me suis remis en question en me disant que le problème venait soit du club, soit de mes performances. J’ai demandé à être prêté, et puis finalement heureusement que je suis resté… Une fois que la saison a démarré, il n’y a plus de place pour les états d’âme : je bosse. D’autant que j’ai la chance d’être dans un groupe hyper soudé. Peu importe qui joue, on reste ensemble. Ensuite j’ai réfléchi un peu, et je me suis dit que le club avait peut-être peur de démarrer une saison à 4 descentes avec un gardien de 22 ans. Ça peut se comprendre. Il faut penser club, et aussi à sa carrière personnelle, c’est parfois délicat de concilier les deux.

Finalement Patrick Pentz a déçu, et il a pris ta place sur le banc. Votre relation a dû en souffrir, non ?Pour moi, forcément c’est plus simple à vivre. Patrick vient d’un club où il était titulaire, il est titulaire en sélection – d’ailleurs ses matchs contre la France, wouah ! Passer sur le banc après quelques matchs, ça ne peut être facile à gérer, surtout qu’il ne parle pas le français, et qu’il est dans un pays étranger. Mais ça ne nous touche pas au quotidien, on s’entend toujours aussi bien. C’est toujours un type très pro, très souriant. On se charrie beaucoup sur le terrain, on parle d’autres sujets que du foot.

Rajković était très blagueur, taquin avec les joueurs et le staff, toujours le premier à faire des conneries.

Être accompagnés de Nicolas Penneteau en troisième gardien, ça doit vous aider aussi ?Nico nous aide beaucoup entre gardiens, mais aussi le groupe. C’est le doyen ! Il est plus vieux que le coach. (Rires.) Il a surtout 700 matchs en pro à son actif, donc on prend tous ses conseils. Surtout qu’on sent qu’il prend du plaisir à être là, à nous booster, à nous gronder.

Bon, et entre nous, Predrag Rajković, tu l’as déjà vu sourire ?Rajko, c’est quelqu’un de très froid quand il ne connaît pas les gens. Mais alors après… (Rires.) Avec nous, c’était un gars souriant, très blagueur, taquin avec les joueurs et le staff, toujours le premier à faire des conneries. Sauf pendant les matchs. Les fois où je l’ai remplacé, il venait me parler à la pause, donner des conseils. C‘est vraiment un super gars, en plus d’être un super gardien.

Revenons à 2022. Ta saison a basculé lors du derby à Troyes, ton club formateur, à l’occasion duquel tu es devenu numéro un, malgré une grosse boulette qui a coûté la victoire aux tiens. Tu es passé par toutes les émotions ?Ouais, pfff. L’approche du match était cool parce que malgré toutes les années que j’ai faites à Troyes, je n’ai joué qu’un match, le dernier. J’étais content de retourner là-bas dans un derby, c’était un bon match à vivre. Et puis, tout se passait bien jusqu’à mon erreur. Sur le moment, c’est très difficile, mais mes coéquipiers m’ont soutenu tout de suite, ils m’ont aidé. De toute façon, il fallait relever la tête, l’erreur était faite. Et puis, étonnamment, faire cette erreur m’a détendu. C’est bizarre, hein ? Je me suis reconcentré, et voilà.

Depuis, tu t’es installé dans les cages de Reims, avec 4 clean sheets en 7 matchs. Comment tu t’es relevé de cette première compliquée ?
Je ne veux pas faire le modeste, mais les clean sheets, c’est aussi parce qu’on subit moins d’occasions qu’en début de saison, donc je suis moins sollicité. Je suis bien aidé par ma défense, j’ai trois beaux bébés devant moi. (Rires.) Je prends confiance depuis le derby. En rentrant, j’ai coupé mon téléphone. Je me suis ressourcé avec ma femme et mon fils. Et puis le match contre le PSG est vite arrivé, c’était idéal pour se relancer.

Je connais bien Ekitike, je ne les ai jamais vus dans la même pièce avec Wembanyama.

Justement, tu déconnectes comment ?Je suis beaucoup la F1, des essais libres au GP. Je regarde aussi le basket le dimanche soir à 21h. J’essaie de ne jamais louper NBA Extra aussi, même si j’ai moins le temps en ce moment. Sinon je suis classique : FIFA, Call Of, lecture et promenades. J’habite dans un village en dehors de Reims, il y a des belles balades à faire dans la forêt et les vignes avec ma femme et mon petit. En revanche, je ne cuisine pas, mais je lis.

Tu as joué au basket ?Oui, j’ai commencé par ça. Au basket, j’ai très vite commencé à taper le ballon avec mes pieds. Puis j’avais des amis déjà inscrits au foot, donc voilà. Peut-être que cette courte carrière m’aide au niveau de la dextérité des mains, mais les appuis sont très différents.

Du coup, vu que tu t’y connais, tu peux nous confirmer qu’Hugo Ekitike et Victor Wembanyama ne sont pas les mêmes personnes ?(Rires.) Je l’ai sentie venir celle-là ! Ecoutez, je connais bien Hugo, je ne les ai jamais vus dans la même pièce avec Wembanyama, mais il me semble qu’il y en a un bien plus grand que l’autre quand même.

À Troyes, tu as remporté la Gambardella, été approché par plusieurs grands européens… Mais tu n’as joué qu’un match. Que s’est-il passé ?La direction a changé depuis, mais quand j’ai signé mon contrat professionnel, je devais le prolonger dans l’année. Ça n’a pas été fait. Je n’ai rien dit, j’ai travaillé. Et finalement, on ne m’a jamais proposé de prolongation avant la troisième année. Sauf que je serais resté numéro 3, il n’y avait pas de progression. Puis plusieurs clubs sont venus se renseigner, dont Reims et son projet qui me plaisait. J’ai signé libre. Troyes m’a privé des matchs officiels, et je n’ai donc pas pu disputer la Coupe du monde U20, mais sans ce sacrifice, je n’en serais peut-être pas là aujourd’hui.

À l’époque, on te colle une réputation de joueur au boulard. À cet âge-là, ça doit être difficile à encaisser ?Plus jeune, ça aurait pu me déranger, parce que ce n’est pas vrai. Mais en vérité, je m’en tape. Ceux que je connais savent comment je suis. Je sais qu’on ne peut pas plaire à tout le monde, mais me taxer de prétentieux, ça a toujours été faux.

Tu portes le numéro 94 depuis cet été, on imagine qu’un club parisien te fait rêver ?Mon numéro 94 veut tout dire. J’ai toujours vécu dans le 9-4, je ne sais pas pourquoi, je suis né à Montreuil d’ailleurs. (Rires.) Ce numéro, c’est avant tout un clin d’œil à ma famille, mes racines. Jouer à Paris, ce n’est pas un objectif, l’objectif c’est d’enchaîner les matchs, de jouer. Je suis très bien à Reims, pas loin de ma famille. Je connais tout le monde ici, l’équipe progresse.

N’empêche que tu n’as pas pris le 13…Ah ça, non ! Mais c’est juste parce que je n’aime pas ce numéro, comme le 15.

On a essayé de se détendre, de plus se faire confiance, pour changer les choses, parce que là, ces cartons rouges, ça nous a plombés le début de saison.

Vous avez un jeune entraîneur à Reims, c’est comment de bosser avec Will Still ?Il était super proche du groupe quand il était adjoint, et il n’a pas changé cela. Surtout qu’il est parfaitement trilingue. Il a instauré une mentalité qui nous va bien, proche du groupe, et exigeant. Ce n’est pas le même management qu’avec Garcia, ni les mêmes séances d’entraînement, parce qu’il a un schéma tactique différent. Will a gardé sa proximité avec le groupe, ce qu’on apprécie.

Le début de saison a été compliqué par les nombreux rouges, comment réagissait le vestiaire à cette incroyable série ?Au début, on ne réalisait pas trop. On en parlait après le match, mais c’est tout. Ce qui nous énervait, c’est qu’on prenait des rouges sur des fautes évitables, discutables. Ça arrive de prendre un rouge, mais la manière est importante. On était trop agressifs, même si ça partait de bonnes intentions. On a essayé de se détendre, de plus se faire confiance, pour changer les choses, parce que là, ces cartons rouges, ça nous a plombés le début de saison. Quand tu joues la moitié des matchs à 10 contre 11, ça touche tes performances.

Sur ton instagram, on voit beaucoup de photos avec des palmiers… Tu fuis souvent Reims ? Disons que dès qu’on a des vacances, on va chercher le soleil, oui. (Rires.) Mais là, pour le coup, on va peut-être changer. J’aimerais bien aller aux Pays-Bas, ou près de la neige en montagne. Même si je n’ai pas le droit de skier, évidemment, j’irais bien à la neige, ouais. On va organiser ça.

Dans cet article :
Strasbourg et Reims n’offrent aucun but à la Meinau
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