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Yassin Fortuné : « Thierry Henry, je l’appelle le vieux »

Propos recueillis par Tanguy Le Seviller
11 minutes

C’est un joli clin d’œil du destin. Ce mercredi, Yassin Fortuné recroisera la route d’Angers, l’un de ses anciens clubs. Car le gamin du 93, qui n’a que 25 ans, a déjà connu pas mal de choses dans sa carrière. Des grands joueurs, des grands coachs, mais aussi la guerre en Ukraine et pas mal de désillusions. Il raconte tout avant ce 16e de finale de Coupe de France.

Yassin Fortuné : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Thierry Henry, je l’appelle le vieux »

Salut Yassin, comment t’as démarré le football ?

C’est venu tout seul… J’ai toujours eu cette passion. Où j’habitais à Stains, il y avait toujours un ballon. C’était bien, t’avais des copains. T’es dans un quartier, tu t’amuses, il y a du monde dehors.

Et t’as commencé à jouer où ?

À Stains, justement, où j’ai fait une année. En fait, ma famille est plus à Saint-Ouen, et du coup, à 9 ans, je suis parti au Red Star à cause de mon père. Il disait que c’était un meilleur club, mais moi, je voulais rester à Stains. Quand j’avais entraînement, je dormais chez mon oncle Ricardo, c’était plus simple. Ça évitait de prendre le métro, car j’étais encore petit. Ce sont des beaux souvenirs, c’est une affaire de famille. Et au Red Star, le niveau était bon.

Toi, tu décides de signer à Lens. Pourquoi ?

Il y avait plusieurs clubs de Ligue 1, Ligue 2, qui étaient intéressés. J’avais visité les installations de Lens avec Marc Westerloppe et j’ai été convaincu. Il était venu à la maison prendre le café, à Stains dans le 93, je me souviens de ça. Il y avait Caen et un autre club aussi qui étaient sur le coup.

Ça se passe comment au départ au centre de formation ?

C’était du plaisir. Je voulais, mais je ne savais pas comment on devenait professionnel. J’avais pas l’idée encore. C’était de l’amusement. Je me souviens des bêtises qu’on a faites, des matchs qu’on a joués, de toutes ces heures où on restait dans les chambres. Avec la génération 99, on gagnait tous les tournois. Il y avait Jean-Kévin Duverne, Jean-Ricner Bellegarde, Modibo Sagnan, Djibril Diani, Moussa Sylla, Charles Boli, Enzo Ebosse, William Bianda, Randy Mavinga, Tom Ducrocq. C’était une très belle promo. Tous les noms que je t’ai cités, on se parle encore tous les jours. Il y a un amour vrai. On va au restaurant ensemble, en vacances. On joue à la Play ensemble, surtout sur Call Of. C’est Moussa Sylla qui fait le moins de kills. (Rires.)

Tu parlais de bêtises, c’était quoi ?

Il y en a eu plein. Un jour, on dormait au centre, on avait faim. La cuisine était fermée, on est passé par-derrière. Mais le responsable du centre dormait là et rentre dans la cuisine. Et on voit la lumière s’allumer. On est tous partis en courant. Il y en a deux qui se sont fait choper. Nsama Simon faisait partie des prisonniers. (Rires.) Et il y a eu la fameuse histoire de l’extincteur, comme Adil Rami. (Rires.) Au self, Enzo Ebosse faisait semblant de courser Djibril (Diani). Il tombe et il s’éclate. Il fait tomber l’extincteur qui part dans tous les sens. C’était abusé, tout le monde rigolait.

 

Toi à cette époque-là, tu survoles tout ?

À 16-17 ans, je jouais déjà contre des seniors en réserve. Il y avait beaucoup de clubs qui me suivaient, oui. Avec l’équipe de France, quand tu fais des tournois en Angleterre et que tu marques, ça ramène les clubs. À 13 ans, je savais déjà qu’il y avait des recruteurs. J’ai grandi avec ça. C’était devenu normal.

Il y a eu une offre de Manchester United, mes parents sont allés là-bas, ils ont rencontré Louis van Gaal. Donc un jour, je vais dans le bureau des dirigeants lensois pour le transfert, et on me passe le contrat… d’Arsenal.

Parmi les clubs qui te veulent à ce moment-là, c’est Arsenal qui te signe…

De base, je ne voulais pas y aller. Si je partais de Lens, c’était uniquement pour aller à Manchester United. J’étais fan du club ! Il y a eu une offre des Red Devils, mes parents sont allés là-bas, ils ont rencontré Louis van Gaal. Donc un jour, je vais dans le bureau des dirigeants lensois pour le transfert, et on me passe le contrat… d’Arsenal. Ils donnaient plus que Manchester United et ils prenaient aussi Jeff-Reine Adélaïde avec moi. J’ai pas eu trop mon mot à dire. Lens avait des soucis financiers à cette époque-là avec l’actionnaire azéri (Hafiz Mammadov). Le club venait de vendre Baptiste Guillaume, David Faupala, Dimitri Cavaré…

Direction l’Angleterre, donc.

Je suis parti tout seul ! J’atterris en famille d’accueil, chez Steve et Elaine Greenfield. Leurs enfants étaient plus grands, mais ils m’ont considéré comme leur fils. C’était des fans d’Arsenal. J’étais là tous les week-ends avec eux. Mais j’ai appris l’anglais, je me suis vite adapté, à la nourriture notamment. Je mangeais comme eux. Le matin, je mangeais les toasts, les œufs brouillés et les haricots rouges. Aujourd’hui, si je vois le petit déjeuner anglais à l’hôtel, je peux prendre ça. (Rires.)

Côté foot, ça se passe comment ?

La première année, j’étais avec les U18. Deuxième année avec les U23, et parfois j’alternais avec les entraînements des pros. Il y avait Reiss Nelson, Donyell Malen, Ismaël Bennacer, Eddie Nketiah, Joe Willock, Stephy Mavididi, Josh Da Silva, Jeff (Reine-Adélaïde) bien sûr. Bon, lui, il était tout le temps avec les pros, il avait sa place dans le vestiaire. Il était au-dessus de tout le monde chez les jeunes, meilleur que moi. (Rires.) C’était facile pour lui.

Francis Coquelin, Mathieu Debuchy ou encore Olivier Giroud me demandaient souvent si j’avais besoin de quelque chose.

À cette époque, en plus, il y avait beaucoup de Français au club, dont un certain Arsène Wenger.

Je discutais souvent avec lui. Quand c’était un peu plus dur pour moi, il venait me voir. C’était une chance qu’il y ait autant de Français. Yaya Sanogo, je parle encore souvent avec lui. Il m’avait pris sous son aile à l’époque. Francis Coquelin, Mathieu Debuchy ou encore Olivier Giroud me demandaient souvent si j’avais besoin de quelque chose. On se voyait au centre d’entraînement.

Tu as connu Arsène Wenger coach, mais aussi Thierry Henry chez les U18.

Je l’appelle « le vieux ». (Rires.) Il a été important. Il m’appelait souvent. C’était bien. Il passait ses diplômes d’entraîneur à mon époque. Il a vu que je venais de Paris, que j’étais français. Il s’est vu en moi. Il disait la vérité, comment bien se placer par rapport à l’adversaire. C’est Monsieur Thierry Henry, tu ne peux qu’écouter. Je ne l’ai pas recroisé. Maintenant, il est loin de Robert-Diochon, je crois. (Rires.) J’ai vu qu’il avait parlé de moi récemment, ça m’a fait plaisir !

C’est quoi ton meilleur souvenir chez les Gunners ?

Quand on part en tournée en Afrique du Sud, avec les jeunes. J’avais jamais voyagé aussi loin. On gagne le tournoi, je termine meilleur joueur, homme du match. C’était contre le PSV Eindhoven, la finale. Je me dis que je commençais fort. (Rires.) Le contexte était beau.

 

Finalement, tu n’as jamais joué en pro là-bas et tu as rebondi à Sion en Suisse. Pourquoi ce choix ?

Arsenal voulait me prolonger et m’avait fait une offre de quatre ans supplémentaires. Je voulais rentrer en France, pour jouer en pro. Des clubs étaient intéressés, comme Nantes et Lille, mais ça n’avançait pas. Du coup, je signe à Sion. Le seul point positif, c’est que j’y ai rencontré ma femme. Le président était super gentil, mais un peu foufou. Il y a des choses qui me sont promises… Il avait le contrôle de tout. Quand il avait une idée, il ne lâchait pas. Ce sont les gens qui l’entourent plutôt avec qui ça ne s’est pas bien passé. Moi, à cette époque, je suis jeune, encore en plein développement. Ma première année, j’ai eu quatre entraîneurs. Pour la progression, c’est difficile. J’ai demandé à partir. Je voulais aller là, on m’envoyait ici. On m’a mis dans un loft. Chaque mois, il y avait un nouveau joueur dans le loft.

Ensuite, t’enchaînes les prêts. Angers, que tu vas retrouver en Coupe de France, c’est ta première destination.

La Ligue 1, j’étais intéressé ! Je suis arrivé en janvier, un peu à la rue physiquement. C’est un peu de ma faute. Je signe le dernier jour du mercato, je n’étais pas prêt. Je dois refaire une prépa pendant un mois. Je perds du temps, c’est la période COVID en plus. Il n’y avait pas de matchs. J’y ai toutefois rencontré des belles personnes, et ça va me faire plaisir de les revoir. Sinon, ça sert à rien d’y aller. J’ai des bons souvenirs avec eux, Melvin Zinga, Lilian Rao Lisa, Ziné (Ould Khaled), Yassin Belkhdim. Le tirage au sort, j’étais content ! Il y a moyen de créer la surprise. J’ai toujours aimé les stades où il y a une grosse ambiance : Strasbourg, Lens, Saint-Étienne, Marseille. Ça me galvanise. J’espère que ce sera bouillant contre Angers.

Quand je me blesse au tendon rotulien, ça a duré 14 mois ! Il n’y a pas eu de complication, mais après trois mois d’attelle à zéro degré, on réapprend à plier la jambe, à marcher, à courir, il faut se remuscler.

Le club avait une option d’achat avec ce prêt. Pourquoi tu n’es pas resté ?

Le club était interdit de recrutement à cause de la DNCG. Du coup, je repars à Sion. Le nouveau coach ne savait même pas que j’étais en prêt. Je me dis alors que je ne peux pas refaire une saison blanche et je pars à Cholet où je réalise une de mes meilleures saisons. J’avais un super coach : Richard Désiré. J’ai pris du plaisir sous ses ordres. Mais je me suis blessé au tendon rotulien. J’ai été coupé en plein élan… Et en février, je retourne à Sion.

 

C’était comment cette période loin des terrains ?

Mon tendon était usé, donc ça a lâché. Ça a duré 14 mois ! Il n’y a pas eu de complication, mais après trois mois d’attelle à zéro degré, on réapprend à plier la jambe, à marcher, à courir, il faut se remuscler. C’est un travail très long. Je suis allé deux fois à Clairefontaine pour me soigner. C’est bien, on rencontre d’autres athlètes. Arthur Cazaux, notamment, qui est devenu un ami. Il y avait (Kévin) Monnet Paquet, deux basketteurs aussi. Je reviens de blessure en avril 2023. C’est David Bettoni, le coach. Il me refait jouer directement, titulaire. Je fais les 8 matchs. Le président ne le garde pas. Un nouveau coach arrive, c’est la direction qui parle pour lui. Je n’ai pas le temps de jeu que je mérite, je trouve, à ce moment-là.

En Ukraine, j’ai vu les tanks, les militaires. On a fait un match sur deux jours. J’ai été dans un bunker en plein match. Tu dors, t’entends un missile passer.

Direction alors l’Ukraine. Un choix plus qu’étonnant.

Je vais là-bas pour jouer, pour avoir des matchs et des vidéos, afin qu’on puisse constater que je peux jouer. Tu voyais que c’était un pays en guerre, mais il n’y avait pas de bombardements là où j’étais. J’ai pas vu mes enfants pendant cinq mois. Je devais faire 10 heures de voiture pour aller en Pologne afin de prendre l’avion. J’ai vu les tanks, les militaires. On a fait un match sur deux jours. J’ai été dans un bunker en plein match. Tu dors, t’entends un missile passer. C’est une expérience. On a gagné contre le Shakhtar et on s’est qualifiés pour la Ligue Conférence. Sans la guerre, je serai resté.

Finalement, l’aventure suisse s’est arrêtée l’été dernier et tu as réussi à revenir en France.

Ça s’est fait rapidement avec Quevilly-Rouen-Métropole. J’avais d’autres propositions, en Turquie, en Roumanie, en Serbie, en Azerbaïdjan, mais, comme je revenais de l’étranger, j’avais besoin de retrouver mes enfants (Inaïa, 4 ans, et Kaïs, bientôt 2 ans). Ils me manquaient. Maintenant, il faut que j’enchaîne des matchs, que je fasse une saison pleine. Ça va revenir. On va essayer de se maintenir et on n’est pas très loin des premiers. Faut aller chercher au moins les play-off.

On n’en a pas encore parlé, mais tu es originaire d’Haïti. Jouer pour les Grenadiers, ça te tenterait ?

J’en ai la possibilité. Le sélectionneur m’a déjà appelé pour m’expliquer le projet. Je peux aussi choisir l’Algérie, grâce à ma mère. Je n’ai pas encore fait mon choix. C’est pas le moment, même si des joueurs ont déjà essayé de me convaincre. (Sourire.)

Enfin, dernière question, est-ce que t’as un regret dans ta carrière, même si tu es encore jeune ?

J’ai connu tellement de choses qu’on pourrait penser que j’ai 30 ans. Le seul regret que j’ai, c’est en 2018, en janvier. Je dois signer à la Juventus. Tout était OK, et ça a bloqué. Arsenal ne voulait pas me laisser partir, je crois. J’étais dégoûté. Là, ça me dérangeait pas d’aller avec les jeunes, c’est la Juve quand même. (Rires.) Il y avait un plan qui avait été fait. Je commençais déjà à utiliser Duolingo, une appli de traduction. (Il se marre.)

Propos recueillis par Tanguy Le Seviller

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