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Yannick Kamanan : « Le footballeur azerbaïdjanais est fantaisiste »

Propos recueillis par Quentin Müller
Yannick Kamanan :  « Le footballeur azerbaïdjanais est fantaisiste »




De la génération Drogba au Mans, de celle de Peter Crouch et de Ledley King à Tottenham, Yannick Kamanan croit frôler son plus grand rêve : celui de devenir le nouveau Thierry Henry. Quand ce dernier prend conscience de l'impossibilité du challenge, il choisit de bourlinguer jusqu'en Azerbaïdjan.

Qui as-tu connu au centre de formation du Mans ?

Des gars comme Frédéric Thomas, Didier Drogba, Yohan Pelé, Yohan Hautcœur. Mais attention ! Didier, il jouait déjà avec la CFA et pas en U17 avec nous.

Pourquoi ne pas avoir fini ta formation avec Le Mans ?

J’étais en sport étude à l’époque, et les coachs ont décidé de ne pas me conserver parce que mes notes à l’école, c’était pas trop ça. Du coup, ils m’ont proposé un contrat en alternance. J’étais prêté dans un club de CFA partenaire et, en parallèle, je bossais à côté dans une entreprise. Au final, je devais me trouver un logement aux frais de ma mère. On n’avait pas les moyens, et puis, je ne me voyais pas galérer à bosser dans une entreprise. J’ai alors décliné l’offre du Mans et je me suis mis à contacter tous les agents de France pour voir si mon profil les intéressait. Seuls trois m’ont répondu. Il y a eu Pape Diouf qui m’avait promis de me rappeler, mais qui, au final, ne m’a jamais recontacté. J’ai eu aussi Frédéric Dobraje. Lui m’a demandé texto si je voulais faire du fric ou jouer au ballon. Moi, j’ambitionnais de devenir un bon footballeur. Je frappais pas à la bonne porte apparemment. À 17 ans sérieux, comment tu peux avoir la tête au fric ? Heureusement, j’ai eu Bruno Satin.

Il t’avait contacté l’été dernier pour la première édition du championnat indien ?

Il était venu l’hiver dernier en Turquie, mais pour Escudé. On s’était croisés, et il m’en avait vaguement parlé. Mais moi, je n’y prêtais pas trop attention. J’étais déjà sous contrat et je n’ai aucun regret de ne pas y être allé.

Revenons au début. Avec Bruno, tu arrives à signer à Tottenham. Comment un jeune au chômage technique arrive à signer chez les Spurs du jour au lendemain ?

Bruno m’a demandé : « Bon, garçon, quel pays te branche ? » Moi, direct, je lui dis que l’Angleterre me bottait bien. On est donc parti faire des essais. Au début, Bolton était intéressé. Mais au final, ça ne s’est pas fait pour des raisons que j’ignore. Puis Tottenham, après avoir vu une de mes vidéos, a bien kiffé. Donc je suis parti à Londres en essai. Après quelques jours d’entraînement, on devait jouer Arsenal. Ça avait beau être un match amical de jeunes, tout le monde prenait ça très au sérieux. C’est un derby quoi. On m’avait dit : « Tu gagnes ce match, tu signes, sinon tu peux rentrer chez toi. » Pendant le match, je fais plier la défense d’Arsenal et je marque un doublé. Je sais pas si tu te rends compte, mais signer à Tottenham quand tu viens d’une banlieue un peu pourrie, c’est comme gagner le million.

On est alors à la fin des années 90, début des années 2000. T’as bien dû faire tes gammes avec quelques briscards de Premier League ?

Exact, y avait Ledley King chez les jeunes, qui est maintenant ambassadeur du club. Crouch aussi. Peter, contrairement à ce que les gens pensent, n’est pas qu’un joueur de tête. Il n’est pas « très technique » , il est très très technique. Du point de vue du rapport gabarit-aisance balle au pied, pour moi, y a que Zlatan qui le dépasse. Et en équipe première, t’avais Gustavo Poyet, Les Ferdinand, Ginola…
En Corse, en match, les tribunes me gueulaient dessus en disant : « Le corbeau ! » Ça veut dire le noir, la poisse là-bas.

Pourquoi être parti de Tottenham sans avoir joué le moindre match pro ?

Les trois premières années avec les U19 se passent super bien, jusqu’à que je sois appelé en équipe de France U19 avec la génération de Djibril Cissé, Bernard Mendy, Mexès, Nicolas Penneteau, Gaël Danic. Eux jouent en CFA et font déjà quelques apparitions en Ligue 1. Perso, je ne me trouvais pas moins bon qu’eux. Du coup, je me dis que comme je ne joue pas à Tottenham, je vais revenir en Ligue 1 pour gagner plus de temps de jeu. Marc Keller me fait venir à Strasbourg, mais le coach ne me voulait pas. Puis j’ai eu quelques soucis d’adaptation en France. Tu vois, en Angleterre, c’était le kick and rush. Tu réfléchis pas trop, tu cours, tu sautes. Pour moi, c’était super, car j’ai la vitesse et la puissance. Le style anglais me convenait le plus. En Ligue 1, j’ai compris qu’il fallait réfléchir un peu plus. Je ne dis pas que je suis complètement benêt, mais fallait que je bosse la tactique. Tu vois, j’étais comme un Brésilien qui débarque en France. Du coup, je jouais peu et on ne me filait pas ma chance. Puis un jour, on m’aligne milieu gauche contre le gros Bordeaux de Dugarry, Pauleta, Darcheville. Les gars en face se sont limite foutu de ma gueule. Ils ont vite vu que j’étais pas à l’aise sur un côté. Je n’ai presque plus jamais rejoué après ça. Puis Kombouaré est arrivé. Au stage de pré-saison, je lui demande s’il va se baser sur ma saison mitigée ou s’il va me laisser une chance pendant le stage. Il me lâche qu’il se basera sur ses a priori et exige de moi que je reste milieu gauche en CFA, à sa disposition.

Et donc tu files en National…

Moi, je voulais absolument jouer, je ne me voyais pas faire un an en CFA. Du coup, je fais le choix de partir jouer en National à Dijon. Quand je vais pour chercher mon bon de sortie à Strasbourg, je croise Kombouaré qui me dit : « J’ai appris que tu partais à Dijon. Dommage, un de nos milieux gauches est blessé pour la saison, on aurait eu de la place pour toi. » J’avais une très grosse envie de le défoncer (rires).

Après Dijon, tu pars en Corse. C’est vraiment compliqué pour un joueur de couleur là-bas ?

Tu veux que je te raconte mon douloureux périple là-bas ? Dès mon arrivée, je vais à la pizzeria. Là, tout le monde s’arrête de manger. Et je te parle pas de vieux papys, mais de tables entières de familles. Ils me dévisagent tous (rires). Et moi, avec ma grande bouche, je lâche : « Et ouais, même les Noirs mangent des pizzas ! » Je sais pas si c’était une vengeance, mais du coup, en match, ils gueulaient : « Le corbeau ! » Ça veut dire le noir, la poisse là-bas.

Vient le tour de la Belgique.

J’essaye de retourner à l’étranger. Le KV Ostende me prend. Je marque 10 buts et fais 10 passes dé. Le Standard, Anderlecht et Bruges me veulent, mais les approches n’aboutissent à rien. Et puis, comme j’avais dit à mon club que j’allais signer dans un gros club, je ne pouvais plus faire machine arrière. Il faut être réaliste, je n’étais pas Ronaldo à l’époque, donc je n’étais pas indispensable au point que le KV vienne me repêcher. Je me retrouve donc au chômage à l’UNFP. Mais ça n’a pas duré. Je pars alors en D1 suisse, mais je me blesse. Je cours seul dans la forêt pour me maintenir en forme, et à ce moment-là, Strasbourg, mon ancien club, s’entraînait au même endroit. Je parle de l’anecdote à mon kiné suisse qui a dû mal me comprendre et raconte ça à mes supérieurs comme une trahison. Du coup, je suis licencié assez rapidement. Je signe alors en Israël, au Maccabi Herzliya. À l’époque, le niveau n’était vraiment pas terrible. Je fais une grosse saison. Le Maccabi Tel Aviv qui jouait à l’époque l’Europe me transfère. Il y avait Rudy Haddad qui débarquait du PSG. La première année, je termine meilleur buteur du championnat avec 17 bus, et 3 buts en Coupe d’Europe. Mais la saison suivante, un nouveau coach débarque et décide de mettre sur le banc tous les Français de l’effectif. Me demande pas pourquoi, mystère.

Pourquoi le Sivasspor après ?

D’abord, j’étais pas trop chaud pour rejoindre la Turquie. Tu sais, les a priori… genre « Fort comme un Turc. » Du coup, je croyais que ça cognait vraiment sévère là-bas et que les gens étaient un peu brutaux. Mais au final, grosse surprise. C’est un pays magnifique et surtout Sivas. C’est la montagne, la nature à l’état brut. Y a rien à faire dans la ville, mais pour un casanier comme moi, ça m’allait vraiment. Sinon, les gens sont très gentils. « Le milieu du trou du cul du monde » , comme on l’appelait avec ma femme. Le tout sous la neige. En fait, si j’ai choisi Sivas, c’est parce qu’ils avaient fait une saison 2008-2009 de folie où ils perdent le titre dans les dernières journées du championnat en réussissant tout de même à se qualifier en Ligue des champions. Le problème, c’est qu’en Turquie, à chaque mercato estival, t’as 50% des effectifs qui changent et ça déstabilise les équipes. Bref, ça a été notre cas. Quand du jour au lendemain, t’as beaucoup plus de moyens et tu joues l’Europe, tu veux tout changer. Et ça a été le souci du club. Ils ont fait l’erreur de virer tous les joueurs qui avaient qualifié Sivas en LDC. En tout, on a consommé trois coachs pendant la saison. On finit 15es, un cauchemar. Donc sportivement, là-bas, ça n’a pas été facile.
En Azerbaïdjan, les plus gros contrats de joueurs se chiffrent autour de 500 000, voire 800 000 euros par saison.

Et t’as pu apprendre le turc alors ?

Ouais, je le parle couramment maintenant. Au départ, c’est une langue dure. Mais il y avait un Français dans l’effectif qui m’a conseillé au début, quand j’avais pas le mot, de le remplacer par le mot français. Et ça a marché à de nombreuses reprises quand j’étais en galère. Je te jure ! Après, je te dis pas que si tu parles français, ils vont te comprendre, mais y a souvent des ressemblances.

Après ton crochet au Sivasspor, tu as le dilemme Nantes en Ligue 2 qui a l’ambition de vite remonter en Ligue 1. Pourquoi tu ne signes pas là-bas ?

J’avais 30 ans, je me suis dit : « Bon Yannick, tu ne deviendras au final jamais le Thierry Henry que tu as toujours voulu être. Donc maintenant, il est temps de penser au financier. » Nantes me proposait donc un trop petit salaire.

Mersin t’offre quelques zéros de plus, mais tu n’y joues pas, c’est là que te vient l’idée de l’Azerbaïdjan. Qu’en disent tes proches ?

Je voulais gagner ma vie, mais bien entendu jouer. En Azerbaïdjan, les plus gros contrats de joueurs se chiffrent autour de 500 000, voire 800 000 euros par saison. C’est pourquoi je signe à Qabala FK. Au départ, les miens m’ont dit : « L’Azerbaïdjan ?! Mais qu’est-ce que tu vas foutre là-bas ? » Je leur ai dit que je n’avais pas 70 sélections en bleu et 40 matchs en LDC, que j’avais besoin de penser à l’après (rires). Le championnat azerbaïdjanais est en pleine expansion. Le niveau moyen, c’est du bas de Ligue 2, voire du National.

Et c’est comment la vie au pays du feu ?

Ma vie sur place ? Dans un premier temps, je crois qu’il est vital de ne jamais critiquer le pays en public. Parce qu’ils ne rigolent pas avec l’image de leur pays. C’est soit tu viens et à la rigueur tu te tais. Soit t’es pas de leur côté… et là tu ferais mieux de te barrer. Sinon, la vie à Bakou, la capitale, t’as quelques trucs, mais quand tu sors un peu de la ville, c’est le Moyen-Âge. Il n’y a plus rien. Mais attention, quand tu es en Azerbaïdjan, faut savoir pourquoi t’es là-bas. Au club, c’était quand même assez pro. Il y avait un jardinier anglais et le buteur jamaïquain Deon Burton notamment.

Qu’est ce qu’un Jamaïquain vient faire en Azerbaïdjan ?

Tony Adams était entraîneur du club, puis directeur technique. Il avait apporté le joueur dans ses valises.

Et le foot azéri, ça joue ou ça casse ?

Le footballeur azéri n’est pas mauvais. Je dirais qu’il est fantaisiste. C’est un pays où les centres de formation n’existent pas. Donc c’est pas discipliné, ça part dans tous les sens. Les gars jouent un peu n’importe comment là-bas.
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