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Yann M’Vila, et maintenant on fait quoi ?
Il y a cinq ans, il était censé devenir le meilleur joueur de l'équipe de France. Mais, en une moitié de décennie, Yann M'Vila a surtout connu le pire : une virée en boîte malvenue, un choix de carrière douteux vers la Russie, et une relance foirée en Italie. Quant à la possibilité d'une relance en Premier League, elle a capoté pour une histoire de gros sous, un comble dans le championnat le plus riche de la planète. À 27 ans, Yann M'Vila a du retard à rattraper. Peut-il le faire ?
Juin 2012, quart de finale de l’Euro. La France vient de se faire surclasser par l’Espagne et le grand public vient de comprendre que Laurent Blanc n’était pas le magicien envisagé après la Coupe du monde 2010. Pas tant que le technicien ait un bilan déshonorable avec les Bleus, mais plutôt que les séquelles du fiasco de Knysna sont lentes et difficiles à résorber. Symbole de cette promesse non tenue, Yann M’Vila : pas encore 22 ans, déjà 22 sélections. Dans les petits papiers du Président comme dans ceux du coach qui l’avait lancé en Ligue 1 avec Rennes, Fredéric Antonetti, l’homme qui a inventé le concept de « passes Ligue des champions » à propos du milieu relayeur. A priori, les Tricolores se sont fait tauler par des Ibériques futurs doubles champions d’Europe, mais l’avenir appartient à Yann M’Vila, forcément. Ce sera bientôt sous le maillot d’Arsenal ou de tout autre grand club européen prêt à satisfaire les appétits financiers du Stade rennais. Pourtant, un semestre plus tard, le jeune international est redescendu en Espoirs, s’est fait gauler avec Antoine Griezmann, Wissam Ben Yedder and co dans un taxi entre Le Havre et Paris, puis a enfin quitté son cocon breton… pour signer au Rubin Kazan contre une indemnité estimée entre 12 et 18 millions d’euros.
Le cœur brisé par les Black Cats
La carrière du natif d’Amiens a pris un mauvais tour. Dans un championnat techniquement à sa portée, M’Vila ne s’adapte pas et se perd très vite. Quelques apparitions à partir d’avril, puis une sortie quasi complète de l’équipe avec l’arrivée du nouveau coach Rinat Bilyaletdinov, qui lui reproche de manquer certains entraînements. La suite : un prêt non concluant et écourté à l’Inter (8 apparitions, retour en Russie en janvier), une sombre histoire de saccage de maison et d’extorsion de fonds à Moscou, où il aurait été victime du chef de sécurité du Dinamo Moscou, et un transfert foiré à Sunderland. « J’ai le cœur brisé » , écrivait le joueur le 1er septembre 2016 sur son compte Instagram. Il faut dire que 2015-2016, en Premier League, avait été sa première saison pleine depuis des lustres. Suffisament pleine pour lui valoir les éloges de Sam Allardyce et l’amour des Black Cats. Mais le plan de relance idéal en Angleterre n’a pas eu de suite. La faute à un employeur russe, le Rubin Kazan, pas décidé à brader son joueur malgré un contrat arrivant alors à terme à l’hiver. Environ dix millions d’euros d’indemnité et un salaire estimé à plus d’un demi-million mensuel par le Sunderland Echo se sont donc dressés devant l’idylle naissante. Sunderland aurait pu casser sa tirelire, M’Vila faire un sacrifice financier… Personne n’a bougé et le Français est resté dans sa prison dorée, un club que Chris Mavinga estimait il y a quelques mois facile à rejoindre, « mais plus difficile à quitter » .
Prolonger pour mieux partir
Aujourd’hui, Yann M’Vila arrive donc dans ce qui sera a priori le meilleur moment de sa carrière, celui de la maturité, à 27 ans. Et il le fera sans avoir joué le moindre match de Ligue des champions dans sa carrière, sous les couleurs d’un club russe où il a prolongé son contrat jusqu’en 2020. Sans contrainte ? Sur son compte Instagram, le milieu relayeur aux passes « Ligue des champions » a communiqué sur un enthousiasme un peu trop beau pour être parfaitement spontané : « Merci à Dieu » , « De retour dans le game » … Point positif du deal, le Français est redevenu titulaire depuis octobre sous les ordres de Javi Gracia, probablement en partie grâce à cet accord contractuel. À défaut de rattraper le retard accumulé, Yann M’Vila est donc redevenu un footballeur à plein temps. À 27 ans, il était temps. Mais il a désormais dix mois devant lui pour crever l’écran et pousser une grosse écurie à venir le libérer de son exil doré.
Par Nicolas Jucha