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Ya basta las remontadas

Par Vincent Riou
4 minutes
Ya basta las remontadas

Au-delà des supporters de la Roma, de ceux du PSG qui prenaient une revanche par procuration, et des téléspectateurs neutres qui ont passé « un bon moment », qui peut se féliciter de la victoire hier de la bande à De Rossi ? Les dealers de matchs payants ? Oui, parce qu’ils misent sur des camés peu regardants sur le matos. Car il faut être clair : les « remontadas » sont le cancer du football. En tout cas la preuve qu’il est malade.

La Roma a créé l’exploit mardi soir en explosant le Barça 3-0. Un score mérité. Exactement ce qu’il fallait quand on a perdu 4-1 à l’aller. Est-ce que cela fait de la Roma une grande équipe ? Non. La Roma est simplement une équipe qui a vendu sa peau contre onze joueurs. Et pas des moindres : le meilleur de tous les temps, onze points d’avance sur leur dauphin en Liga. Quinze sur le Real, qui lorgne sur un troisième titre continental d’affilée, comme au bon vieux temps de Kopa et Di Stéfano. Une sale histoire quand on défend la Catalogne. Alors, comment diable le Barça du génial Messi peut-il donc se faire humilier par une équipe qui dispute une place sur le podium en Serie A, à 21 points de la Juve, qui elle-même vient de se faire humilier par le Real ? Pour certains, c’est la magie du football. Pour d’autres, c’est une catastrophe.

Le Barça qui remonte le PSG après avoir perdu 4-0, c’est une balayette à Iznogoud qui a montré les muscles : « Non, Nasser, tu ne seras pas Khalife à la place du Khalife. » Quand on est un cador, on a le droit de boire le bouillon à l’aller, si c’est pour finalement faire ripaille au retour. Les grandes équipes ne meurent jamais. Les grands joueurs répondent toujours présent au grand rendez-vous. Les dictons populaires pendant longtemps avaient un sens, dans le football. On veut bien se faire traiter de vieux réacs, mais on aimerait que cela continue. Il y a quelque chose de pathétique, non pas dans cette victoire de la Roma, mais dans cette défaite du Barça. C’est la remontada de trop.

Comment des joueurs réputés parmi les meilleurs et évoluant dans de telles institutions peuvent-ils être aussi inexistants et friables en ayant autant de marge au coup d’envoi ? Gagner sur un score fleuve à l’aller, se faire éliminer sur un score fleuve au retour : ce que l’on considérait comme impensable ou miraculeux avant (un La Corogne-Milan ou un Monaco-Real, on s’en souvient encore 14 ans après), est devenu un scénario répandu. Où sont les défenses ? Où est la tactique ? L’orgueil ? Où sont les couilles de ceux qu’on nous présente comme des grands joueurs ? Un club, une équipe digne de ce nom, ne peut pas être branché sur courant alternatif à ce point-là. On plaint presque ceux qui paient pour voir les matchs. C’est gratuit et beaucoup plus drôle sur FIFA, quand Bilou grisé par la confiance et ses trois buts d’avance fume le joint de trop et se fait sortir par Paco.

Que font les coachs ? Est-ce que défendre un résultat, une qualification, des couleurs, est devenu un gros mot ? Si l’époque est aux remontadas, c’est aussi la preuve d’une immense débandade collective. Il serait bon de s’y intéresser, à cette faillite de caractère, de solidarité, de capacité de révolte, d’estime de soi. Cette faillite mentale. Le foot est un sport collectif, il est le reflet de la société ? Eh bien, les héros sont bien peu de choses, de nos jours. De tels scénarios rappellent l’époque de la Coupe des villes de foire, quand les Barcelonais étaient amateurs, venaient à Rome en bateau, et jouaient avec une crise d’appendicite. On découvre que les grands joueurs peuvent être tout petits, que les équipes qui envoient du rêve se font dessus au moindre début de cauchemar, et tout le monde continue d’applaudir. Il faut siffler la fin de la récré : il y en a assez des remontadas. Elles ridiculisent le football, et les footballeurs. Il ne manque plus que Guy Lux et Léon Zitrone aux commentaires. Et les vachettes sur le rectangle vert. La Ligue des champions, c’est pas Intervilles.

Dans ce jardin d’enfants, le Real Madrid de Zidane ressemble à une bande de papas. À tel point qu’on a du mal à imaginer la Juve faire le coup de la Roma ce soir. Ce ne sont en tout cas pas les Bianconeri qui iraient se faire éliminer au retour après avoir gagné par trois buts d’écart à l’aller, comme ils l’avaient prouvé l’année dernière justement face au Barça (3-0, 0-0). Elle est à l’abri de ce genre de mésaventure, la Juve. Et c’est déjà une raison suffisante pour la supporter.

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