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Xavi, le fils du curé
Comme dans une saga d'été, deux héritiers s'affrontent ce soir dans un duel final. Xavi et Sneidjer ont presque le même père mais n'ont pas le choix. Pour être le meilleur, il faudra vaincre son rival. A gagner ? Tout. Xavi est prêt. Focus.
« Toutes les équipes sont bien préparées et nous connaissent. Les gens croyaient quoi ? qu’on allait gagner tous nos matchs 3-0 ? J’hallucine. Je vous rappelle qu’on est en train de jouer une Coupe du Monde… » . Xavi mesure 1,70m, est né en 1980 et n’aime pas trop qu’on vienne le taquiner sur ses performances en Afrique du Sud. L’Espagne est en finale mais ne gagne plus ses matchs avec 70 % de possession. Depuis que les choses sérieuses ont commencé, l’Espagne porte (un peu) moins le ballon et tout le monde n’a d’yeux que pour Villa. En échange, les transmissions se sont accélérées et on joue à une touche de balle. Mais le patron veille. La preuve par les chiffres : 570 passes, 464 réussies et seulement 6 ballons perdus pendant tout le Mondial. Xavi n’enflamme pas les tapis verts, ne slalome pas dans les défenses, ne porte pas de boucles d’oreilles et n’a pas d’enfant aux Etats-Unis. Mais Xavi est une machine à la précision mathématique.
Taliban du football à la sauce Barça, le milieu espagnol a son idée de la justice divine : « la victoire de la Suisse, c’est comme la victoire de l’Inter sur le Barça : une injustice footballistique » . Il faut dire que le natif de Tarrasa (30 km au nord de Barcelone), n’a jamais vu grand chose d’autre que les montagnes du Montserrat et les vestiaires de la Masia. Il entre au centre de formation blaugrana à 11 ans et joue son premier match en équipe première le 18 août 1998. Abreuvé de Cruyffisme, Xavi est un milieu comme l’a inventé le hollandais volant. Placé devant la défense, il distribue les ballons au lieu des savates à base de jeu court et de décalages.
Entre les lignes
Chez Cruyff, c’est Guardiola qui occupe ce poste. Chez Guardiola, c’est Xavi le curé de l’entre-jeu. Pep le place un brin plus haut pour profiter de son habileté dans les petits espaces et lui colle Busquets en chien de garde. En Seleccion, « on joue pareil qu’au Barça. La seule différence est que je suis censé jouer un peu plus entre les lignes. Le truc c’est qu’il n’y a même pas de lignes. Pas un seul mètre. Tous les espaces sont bouclés » . La solution ? « une-deux, une-deux, une-deux, sinon t’es mort. Si tu contrôles, tu la perds parce que d’un seul coup deux mecs arrivent sur toi » . Exemple ? Le but de Villa contre le Paraguay. Xavi ne fait pas de roulette, ne rate jamais une passe et ne perd pas de ballon. Ce type-là est un artiste de la protection de balle et de la passe croisée dans l’espace. Mais ça, vous ne le verrez pas sur les ralentis de la FIFA. Trop compliqué.
Car en 2010, tout est plus difficile qu’en 2008. A l’époque, personne n’aurait parié un rond sur les esthètes espagnols : « pendant l’Euro, des équipes comme la Suède ou la Russie nous laissaient jouer. Il restaient bien regroupés derrière et ne basculaient pas vers le milieu comme le Chili ou ne pressaient pas à 2 contre 1 comme le Paraguay » . Une bonne surprise ne fonctionnant qu’une seule fois, l’Espagne était attendue en Afrique du Sud. Cette fois-ci, la surprise a été de voir les espagnols renoncer à des possessions aussi longues et accepter de lâcher la gonfle par moment. Grâce à une défense en acier (seulement deux buts encaissés) et un milieu en or, les gamins de Del Bosque ont surpris… en défendant.
Le meilleur d’entre nous
Meilleur joueur de l’Euro 2008 et vainqueur du triplé le plus commenté de l’histoire du foot en 2009, Xavi attrape finalement un ballon de bronze l’an dernier, derrière les starlettes Messi et Cristiano Ronaldo. En 2010, les masques tombent devant les défenses adverses. Xavi, lui, continue à prôner le bon goût footballistique. Si l’Espagne est championne du monde, Xavi sera élu crack du football 2010. Chose rare, Cruyff n’a pas osé dire le fond de sa pensée. Qui préfère-t-il ? Ses fils légitimes – les Oranje – ou ses fils naturels – les Rouges ? Mais bon, on a compris, « l’Espagne, c’est la photocopie du Barça et la meilleure publicité pour le football » . Si même Monsieur le Curé le dit.
Thibaud Leplat, à Madrid
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