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Xavi : la fin de l’état de grâce ?
Alors qu’il fêtait son deuxième anniversaire sur le banc barcelonais face au Shakhtar, Xavi n’a pas vraiment eu le temps de sortir un gâteau et des bougies. L’homme providentiel du FC Barcelone jusqu’ici épargné par les critiques a été rattrapé après la défaite (1-0) par une presse espagnole toujours aussi exigeante vis-à-vis du jeu catalan.
Dans les couloirs du Volksparkstadion, les journalistes espagnols n’ont qu’un nom à la bouche : Xavi. Parce qu’il vient de fêter sa deuxième année sur le banc du Barça ? Pas vraiment. L’entraîneur de 43 ans est plutôt au cœur de la tourmente. Pour avoir perdu contre le Shakhtar, 1-0. Mais surtout pour n’avoir pas proposé grand-chose. « Rien ne s’est passé comme prévu, reconnaît le Catalan en conférence de presse avec la mine des mauvais jours. Nous n’avons pas compris les exigences du jeu, nous avons perdu beaucoup de ballons, nous n’avons pas bien attaqué, nous n’avons pas bien défendu les centres tendus, et les erreurs se paient cher. Nous avons joué l’un des pires matchs de ces deux dernières années sur le plan tactique. » Après une victoire « pas méritée », selon les propres aveux de Xavi, face à la Real Sociedad le week-end précédent (1-0), le Barça devait faire mieux à Hambourg. L’ancien milieu de terrain avait même prédit que ce déplacement en Allemagne serait « un tournant » de la saison blaugrana. Raté.
Mental à trou
Au milieu de terrain, la triplette Gündoğan-Romeu-Gavi a pris une leçon par les deux jeunes Ukrainiens Georgiy Sudakov (21 ans) et Dmytro Kryskiv (23 ans). Le style de jeu mis en place par Xavi depuis son arrivée, s’éloignant du tiki-taka pour mettre en place un pressing haut et des transitions usant des ailiers, s’est comme volatilisé le temps de 90 minutes. Ou peut-être plus. D’où la montée des critiques. À son pupitre, celui qui bénéficiait jusqu’ici d’un totem d’immunité plaide un blocage mental, la nécessité de faire un reset, botte en touche quand on l’interroge sur la performance de ses milieux… Mais ces excuses ne semblent plus passer. Se filmant en direct pour Twitch, Ricard Torquemada, journaliste de Catalunya Radio, s’agace : « Xavi a parlé énormément du mental, mais il faut qu’on parle de football. Et ne pas se cantonner à un sujet aussi subjectif. On est dans un moment charnière de la saison. Ce n’est pas une question de résultats, mais de se sentir comme le Barça. On ne peut pas subir autant, on doit avoir une idée précise de comment on veut gagner ! »
Le Barça a eu la possession face au Shakhtar, certes (64% contre 36%). Mais n’a cadré qu’une seule frappe. « Pour moi, la domination, ce n’est pas seulement la possession, c’est aussi ce que tu fais avec la balle, rappelle l’entraîneur du club ukrainien Marino Pušić. Et ce soir, on était meilleurs dans ce domaine-là. On a marqué une fois, mais on aurait pu marquer plus. Donc on a mérité cette victoire. » Pourtant, avec un match nul, les Catalans se seraient qualifiés directement pour les huitièmes de finale, fameuse quête du Barça depuis trois saisons. Et ils auraient en plus engrangé quelque deux millions d’euros supplémentaires. Pas vraiment négligeables vu les finances du club. Seul point positif de la soirée : l’énervement des joueurs. « Nous sortons de deux mauvais matchs. Et même lors du Clasico, nous avions fait un bon match jusqu’à la 60e minute, puis nous avons baissé de régime, et je ne peux pas vous dire pourquoi », commente Marc-André ter Stegen, capitaine de (la) soirée. « Nous devons faire notre autocritique, en commençant par moi et tous mes coéquipiers. Parce que je pense qu’il est inacceptable qu’un joueur de Barcelone joue à ce niveau », emboîte João Cancelo.
Une « crise » éphémère ?
Et c’est justement vers ces joueurs expérimentés que va se tourner Xavi pour se sortir de la tourmente. Au retour de Hambourg, la presse catalane se fait l’écho d’une réunion de plus de 45 minutes au sein du vestiaire, pour traiter du « mauvais moment » que traverse le Barça. Loin du terme « crise » que brandissent déjà certains médias espagnols après deux matchs et demi ratés. La défaite face au Shakhtar aura tout de même fait passer un cap à ce FC Barcelone glorifié il y a moins de deux mois après ses deux victoires 5-0 face au Betis et à Anvers : désormais, on peut critiquer Xavi. La gloire passée ne suffirait plus à masquer les performances décevantes du milieu devenu coach. Enfin presque. 24 heures seulement après avoir titré « De pire en pire », le journal catalan SPORT change son fusil d’épaule avec à la Une : « On ne touche pas à Xavi ». Mais jusqu’à quand ?
Par Anna Carreau, à Hambourg
Tous propos recueillis par AC